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Les Dossiers

Léon Bloy : Exégèse des lieux communs (3/3)

, le Jeudi, 21 Février 2013. , dans Les Dossiers, Etudes, La Une CED

 

 

Comment résister à la pesanteur des lieux communs ? Quelle parole lui opposer qui ne soit pas contaminée par ce qu’elle prend pour cible. Là où Flaubert, dans le Dictionnaire des idées reçues, optait pour la litote et se contentait de dresser une liste de poncifs, comptant sur la distanciation critique opérée par cette répétition, Bloy choisit au contraire d’accompagner les lieux communs d’une glose hyperbolique.

Le projet d’une exégèse a déjà en soi valeur de contestation d’une parole essentiellement tautologique, puisqu’elle pose qu’il y a, même dans ces poncifs et souvent à l’insu des locuteurs, un excès de sens. Mais la critique s’exprime aussi en contrepoint du caractère lénifiant des lieux communs dans une écriture délibérément combative et singulière.

Entretien avec Ameziane Ferhani : la BD algérienne, un art en expansion

Ecrit par Nadia Agsous , le Mercredi, 13 Février 2013. , dans Les Dossiers, Etudes, La Une CED

 

50 ans de bande dessinée algérienne. Et l’aventure continue, Ameziane Ferhani, éditions Dalimen, Alger, 2012

 

A travers l’entretien qui suit, Ameziane Ferhani, auteur de l’ouvrage 50 ans de bande dessinée algérienne. Et l’aventure continue, publié aux éditions Dalimen, propose une rétrospective de l’histoire de cet art qui est né après l’indépendance.

 

En tant qu’auteur d’un ouvrage qui traite de l’histoire du neuvième art en Algérie sur une période de cinquante ans, quel est l’intérêt que vous portez à cet art ?

Léon Bloy : Exégèse des lieux communs (2/3)

, le Lundi, 11 Février 2013. , dans Les Dossiers, Etudes, La Une CED

 

À ce point, on peut se demander quel est le sens d’une exégèse des lieux communs puisque, réducteurs par essence, ils résistent au symbole comme à l’allégorie et ne délivrent tous qu’un même simpliste message.

En fait, l’exégèse des lieux communs doit mettre à jour non un sens second implicitement compris dans l’expression, mais bien le Sens en tant qu’occulté par le ressassement. Ce que cette vulgate donne à voir dans son inanité même, c’est l’Autre en tant que perpétuellement bafoué, comme dans « un sombre miroir plein de la Face renversée de ce même Dieu quand il se penche sur les eaux où gît la mort ». Si bien que c’est dans l’insignifiance, la bassesse et l’ordure qu’il faut à ce moment de corruption de la parole chercher quelque révélation. Si l’on pose comme Bloy que les hommes parlent la langue que Dieu a parlée, quelque chose du Verbe même infiniment assourdi doit s’y faire entendre, fût-ce sous la forme de ce qui fait défaut. La vérité déniée dans ces propos fait nécessairement retour comme une sorte de symptôme que l’exégèse se donne comme tâche d’interpréter « des mots plus qu’humains [qui] rôdent comme des loups autour de ceux qui en abusèrent. Ils sont dans la nécessité invincible d’exprimer n’importe comment et à quelque prix que ce soit une réalité indiscutable ».

Un critique littéraire singulier à l'aurore du XXème siècle : Alfred Jarry (3/3)

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Vendredi, 08 Février 2013. , dans Les Dossiers, Etudes, La Une CED

 

Cependant, il faut également remarquer que Jarry déforme de nombreux passages des textes chroniqués, par l’hyperbole notamment (42), en remplaçant un rapport de succession par un rapport de cause à effet (43), en modifiant certains noms propres (44) ou termes étrangers (45), en opérant un montage de plusieurs passages distincts qu’il synthétise en une seule formulation (46), ou en allant jusqu’à forcer le sens de tel passage jusqu’au contre-sens (47). Tout cela est-il le fruit de souvenirs de lectures quelque peu distanciés (et l’on sait comme Jarry avait une immense mémoire) ? Cela ne semble pas possible car Jarry, sauf exception, rendait compte des livres qu’il lisait juste après les avoir lus. De plus, il s’y reporte très précisément, pour y puiser, à la virgule près, ses citations (directes ou indirectes), lesquelles sont le plus souvent voisines dans le cours du texte chroniqué. Et même quand Jarry ne déforme pas le propos du livre, il transforme un détail en totalité, ce qui est une autre forme de déformation : il rend compte de certains aspects seulement d’un ouvrage mais sans jamais le spécifier comme si au travers de ces aspects l’on pouvait saisir la totalité de l’ouvrage, développant ainsi la synecdoque comme si elle se confondait avec la synthèse (48) (et c’est du reste l’un de ses grands principes esthétiques). Jarry ne conserve du texte source que des éléments à ce point réduits qu’ils ne font à la limite plus écho aux propos de l’auteur.

Un critique littéraire singulier à l'aurore du XXème siècle : Alfred Jarry (2/3)

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Vendredi, 01 Février 2013. , dans Les Dossiers, Etudes, La Une CED

 

Je m’explique : tandis que dans la première période critique de Jarry, le compte rendu s’affichait ostensiblement comme poème en prose du fait de l’obscurité de sa langue, à La Revue blanche, l’auteur de Messaline ruse, « trich[e] avec la force », pour reprendre la formulation de Roland Barthes (27). Sa langue est d’une grande clarté mais il utilise un grand nombre de « raccourcis » dans le domaine de l’encyclopédique. S’il le fait, c’est par goût personnel pour l’érudition, lequel paraît notamment sous la forme d’un mépris affiché et tonitruant pour la vulgarisation, mais c’est aussi et d’abord parce que l’auteur de Faustroll navigue sans obstacles apparents d’un secteur défini de l’épistémologie à un autre, rendant compte d’ouvrages portant sur l’astronomie, l’économie politique, la médecine etc. En conséquence, étudiant la critique littéraire de Jarry à La Revue blanche, si je me suis de facto placé dans le « contexte d’une historiographie renouvelée de la période (histoire littéraire, histoire des arts, histoire culturelle) plus soucieuse du champ éditorial des revues » (28), je me suis inscrit également pleinement « dans la mouvance des études menées, depuis plusieurs années, autour de l’interaction du scientifique et du fictionnel, et, plus généralement, sur la relation de la littérature et du savoir » (29).