Paru en 1965, Les Choses, le premier roman de Georges Perec (1936-1982), méritait bien une réédition en grande pompe pour son cinquantenaire. Las ! Le coche a été loupé chez Jullliard : certes, un bandeau du plus beau vert annonce « 50 ans après » et l’édition est soignée (pas une seule coquille relevée, ce qui est quasi un exploit en 2015), mais rien n’accompagne le texte, qui mériterait pourtant commentaire. D’un autre côté, la position de Julliard peut se défendre : Les Choses est un roman tellement fort qu’il se suffit à lui-même, que sa lecture bouscule suffisamment de certitudes pour qu’elle s’accompagne plutôt d’une réflexion que de commentaires, aussi éclairés soient-ils.
En fait de roman, d’ailleurs, il n’en est guère question, tant les personnages sont dépourvus de motivations et, surtout, de psychologie : certes, le lecteur est confronté à un couple, formé par Sylvie et Jérôme, mais ce couple n’a pas de problèmes de couple, aucune discussion relative au sens à donner à leur existence commune. Ce couple avance comme une entité indissociable motivée par l’acquisition de « choses ».