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Critiques

Rouge Alice, Sylvie Huguet

Ecrit par Anne Morin , le Vendredi, 15 Novembre 2013. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Nouvelles

Rouge Alice, La Clef d’Argent, collection KholekTh, octobre 2013, 103 p. 6 € . Ecrivain(s): Sylvie Huguet

 

Un recueil de nouvelles peut se lire de la première à la dernière, mais tout aussi bien on peut en débusquer une par surprise, en fonction du titre, du temps qu’on a devant soi, ou de façon plus ou moins intrusive, en laissant faire, en se laissant faire, porter.

Ainsi, le titre de la deuxième nouvelle, Le renard bleu, s’est-il imposé et, de fait, il donne le ton : la cruauté, la barbarie de l’homme face au juste retour des choses : l’animal ne sait ni sacrifier, ni se venger mais il se souvient… et la porte s’entrouvre où tout se confond. Le fantastique atteint un monde différent, un univers parallèle où règles et raison s’inventent d’autres codes, d’autres noms, et où le lecteur est d’abord et au sens propre dérouté pour ensuite adhérer, faire corps :

« La sensation de chaleur est devenue trop vive. Il faut ôter cette fourrure, rafraîchir un peu cette figure rouge avant de soigner son maquillage. Chantal ne remettra le manteau qu’au moment d’ouvrir à Charles-Henri. Mais à présent les agrafes résistent, glissent entre ses doigts en sueur. Elle sent un fourmillement sous sa peau et soudain une piqûre à la nuque » (p.67).

Poèmes du festin céleste, Jean-Yves Masson

Ecrit par Didier Ayres , le Vendredi, 15 Novembre 2013. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Poèmes du festin céleste, L’Escampette, 2002 . Ecrivain(s): Jean-Yves Masson

 

Nombres à propos des Poèmes du festin céleste, anthologie personnelle de Jean-Yves Masson

 

Aborder la riche livraison des poèmes de l’anthologie personnelle de Jean-Yves Masson nécessite de petits préliminaires. Au regard de la question des temps et de la composition – 1983/1995, donc du très jeune âge du poète qui débute jusqu’au devant de la personne adulte, dont la trace est visible au fur et à mesure de la lecture – et le saut jusqu’au livre, je voudrais dire deux ou trois choses. Paru en 2002, donc presque une dizaine d’années après ma propre intervention ici – dix années de plus, après la dédicace que l’auteur m’a fait en 2003 –, je ne peux que dire que cela intéresse plus le sujet de l’auteur que ne le laisse entendre cette anecdote des nombres.

En effet, l’étoffe poétique de Jean-Yves Masson a souvent traité la question du mètre en poésie. Il est d’ailleurs connu pour des onzains et des neuvains chez Cheyne éditeur. L’anthologie que j’ai dans ma bibliothèque est dédicacée ainsi pour Didier Ayres : cet « album de vers anciens » revus, mais légèrement par celui que je suis aujourd’hui […] janvier 2003.

La vie secrète d'Emily Dickinson, Jerome Charyn

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 14 Novembre 2013. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Rivages

La vie secrète D’Emily Dickinson. Traduit de l’anglais (USA) par Marc Chénetier septembre 2013. 427 p. 24,50 € . Ecrivain(s): Jerome Charyn Edition: Rivages

 

Il faut en avertir le futur lecteur : quelle que fût la vie réelle d’Emily Dickinson, vous ne pourrez plus jamais penser à elle, ou rencontrer l’un de ses textes, sans donner au personnage une autre « réalité » que celle que bâtit Jerome Charyn dans ce livre brillant, attachant, délicieux !

Car c’est bien une partie importante de la vie de la grande poétesse américaine qui constitue le sujet de ce livre. Biographie alors ? Définitivement non, même si Charyn s’est armé jusqu’aux dents des outils nécessaires à rendre sa fiction parfaitement vraisemblable. Il s’agit bel et bien d’un roman dont l’héroïne est Emily Dickinson – la Emily Dickinson de Jerome Charyn, éperdument amoureux du personnage qui fut le premier poète qu’il ait jamais lu.

« Elle était le premier poète que j’eusse jamais lu, et je fus d’emblée accroché, hypnotisé, parce que son écriture enfreignait toutes les règles. Les mots provoquaient leur propre réaction en chaîne, leur propre feu. Elle était capable d’abasourdir, de charmer et de tuer « avec des dagues de mélodie ». Je ne me suis jamais vraiment remis de l’avoir lue. »

Le Turquetto, Metin Arditi

Ecrit par Victoire NGuyen , le Jeudi, 14 Novembre 2013. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Babel (Actes Sud)

Le Turquetto, juin 2013, 285 pages, 8 € . Ecrivain(s): Metin Arditi Edition: Babel (Actes Sud)

 

Splendeur et misère d’un peintre


En 2001, à l’occasion de l’exposition Venise ou la couleur retrouvée organisée par la ville de Genève, le Louvre lui a prêté la toile L’homme au gant du maître vénitien, Le Titien. Ce prêt a permis à un historien de l’art d’expertiser la signature du peintre et de conclure qu’il s’agit là vraisemblablement d’une œuvre d’un de ses disciples : « Du fait de la chronologie (le T a selon toute logique été peint en premier, dans l’atelier de l’auteur), on peut émettre l’hypothèse que le tableau n’est pas de la main du Titien ».

Reprenant donc cette analyse, Metin Arditi brode, imagine et laisse son esprit ainsi que sa main vagabonder sur du papier blanc. Il en résulte une histoire, une intrigue qui enchante les yeux, l’esprit et l’imagination du lecteur. L’auteur partant de l’hypothèse d’un peintre mystérieux qui se cache derrière la toile Renaissante, donne trait à un personnage hors du commun et façonne son histoire qui ne peut qu’être extraordinaire : Elie Soriano.

Un parfum d’herbe coupée, Nicolas Delesalle

Ecrit par Laurent Bettoni , le Jeudi, 14 Novembre 2013. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman

Un parfum d’herbe coupée, StoryLab, avril 2013, 3,99 € . Ecrivain(s): Nicolas Delesalle

 

À travers huit moments précis de son existence a priori anodins qui rythment le récit en autant de chapitres, Kolia, un homme presque quarantenaire, dresse un premier bilan de sa vie et saisit l’alchimie du bonheur. En réalité, ces petits riens, ces petits souvenirs de jeunesse constituent les étapes qui marquent le passage de l’enfance à l’âge adulte. Nicolas Delesalle nous montre là des instantanés empreints de nostalgie, de tendresse, d’humour, bref de tout ce qui fait le sel d’une vie.

 

« Le jour où mon père a débarqué avec son sourire conquérant et la Renault GTS, j’ai fait la gueule. Mais j’ai ravalé ma grimace comme on cache à ses parents l’odeur de sa première clope. J’ai dit “ouais”, j’ai dit “super”, la mort dans l’âme, même si j’avais compris que la GTS pour la GTX, c’était déjà le cinquième grand renoncement, après la petite souris, les cloches de Pâques, le Père Noël, Mathilde, la plus jolie fille de la maternelle, et ma carrière de footballeur professionnel ».