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Les Chroniques

Les serpents sont-ils nécessaires ?, Brian De Palma, Susan Lehman, par Yann Suty

Ecrit par Yann Suty , le Vendredi, 01 Juin 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

Les serpents sont-ils nécessaires ?, Brian De Palma, Susan Lehman, Rivages Noir, mai 2018, trad. anglais (USA) Jean Esch, 240 pages, 16 €

 

On aime bien Brian De Palma, le réalisateur, l’auteur de quelques pépites du septième art comme Phantom of the paradiseLes Incorruptibles, L’Impasse ou Pulsions. Un cinéaste qui a un style identifiable, aussi bien par ses mouvements de caméra que par ses thématiques. Voilà qu’il se reconvertit comme écrivain (avec la collaboration de Susan Lehman).

Il était peut-être plus facile pour lui d’écrire un livre plutôt que de trouver des financements pour un film dans l’industrie hollywoodienne actuelle. On imagine que l’activité de romancier est moins fatigante que celle de réalisateur en charge d’une équipe d’une centaine de personnes. Surtout quand on a atteint un âge plus qu’auguste.

On était curieux de découvrir le travail de romancier de Brian De Palma. D’autres réalisateurs avant lui se sont essayés à l’écriture avec plus ou moins de succès, comme Michael Cimino ou, plus récemment, David Cronenberg avec Consumés. Pour ce dernier, même si le livre n’était pas à la hauteur de ses meilleurs films, on y reconnaissait bien sa patte, ses obsessions, développées dans une histoire originale.

Montréal, par Kamel Daoud

Ecrit par Kamel Daoud , le Mardi, 29 Mai 2018. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

 

A Montréal. Sous le ciel gris d’un hiver qui tarde. D’habitude, raconte-t-on, la neige est déjà là mais pas cette fois. Le Québec est peut-être le troisième pays des Algériens. Pour ceux qui y vivent, pour ceux qui en rêvent. Il a la langue française, sans le mal français aux yeux des voyageurs algériens. On y parle le français sans y ressentir l’histoire. Un pays nu et neuf. Avec des arbres immenses, de la neige qui suspend le temps, des diversités qui apaisent la peur d’être étranger et des villes belles avec des noms proches des prénoms de chacun. Donc, on y vit bien, dans cette France-bis épargnée par le procès de la colonisation/décolonisation. On est en France sans le poids de la France et on est en Algérie sans les guerres d’Algérie. Et on est même en Amérique.

Déchristianisation de la littérature, Richard Millet, par Gilles Banderier

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 28 Mai 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

Déchristianisation de la littérature, Richard Millet, Léo Scheer, coll. Variations n°XXXI, janvier 2018, 228 pages, 16 €

 

 

Avec le Désenchantement de la littérature (2007) et L’Enfer du roman. Réflexions sur la post-littérature (2010), Richard Millet avait posé le diagnostic de ce qu’on appellera pudiquement une situation de crise. L’analyse se poursuit avec Déchristianisation de la littérature. Même si le livre n’a pas la structure d’un essai, mais celle d’une suite de notations dont le lien n’est pas toujours apparent, la thèse se révèle de façon nette, qui associe deux phénomènes : la crise de la littérature et la déchristianisation du monde occidental (« la déchristianisation entraîne la fin de la littérature au profit de sa métamorphose dans les divertissements de l’athéisme marchand », p.13-14 – voir également p.182). Que le rapport au livre se modifie, nul n’en doute.

Plateau Virtuel club #5, par Marie du Crest

Ecrit par Marie du Crest , le Vendredi, 25 Mai 2018. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Et de cinq. L’émission de Radio Clapas, cette fois-ci est consacrée à la dernière pièce de Samuel Gallet, publiée comme l’ensemble de ses œuvres depuis sa sortie de l’Ensatt, en 2007, aux éditions Espaces 34. Sabine Chevallier aime à suivre le parcours de ses auteurs. Samuel Gallet prend la parole pour présenter la fable de cette pièce de commande, mise en scène par Jean-Pierre Baro, lors de sa création.

Il est donc question de trois jeunes femmes (Erine, Andréa et Suzanne) qui ne se connaissent pas mais qui vivent toutes dans des villes occidentales violentes socialement, empêchant de vivre sa vie, de vivre les rêves de leur vie. Elles se réfugient dans le sommeil et le monde onirique les confronte au pouvoir incarné ici par les figures de Denys, tyran de Syracuse et de Damoclès. Au réveil, elles échappent à leur vie d’avant et se rencontrent enfin dans la vie réelle.

Samuel Gallet revient à l’évocation du travail de l’allemande Charlotte Beradt qui a recueilli des rêves d’allemands, qui d’une certaine manière pouvaient éclairer les névroses du Troisième Reich. Les cauchemars ne parlent-ils pas de ce que nous sommes ?

Sur la religion, Rémi Brague, par Gilles Banderier

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 24 Mai 2018. , dans Les Chroniques, La Une CED

Sur la religion, Rémi Brague, Flammarion, janvier 2018, 244 pages, 19 €

 

Pour autant qu’il soit possible d’acquérir des certitudes relatives au passé très lointain, la croyance religieuse apparaît consubstantielle au processus d’hominisation. Vers 300.000 avant Jésus-Christ, on plaçait des fleurs sur des cadavres, avant de les inhumer. Nous ne saurons jamais exactement ce que représentait ce geste, dans l’esprit de ceux qui étaient déjà des êtres humains. La religion a accompagné notre espèce tout au long de son chemin tortueux et désespérant. D’aucuns avaient pensé que la croyance religieuse appartenait au passé et qu’elle s’évanouirait à l’aube du troisième millénaire (on connaît le mot de ce grand orateur que fut le pandit Nehru : « La politique et la religion sont dépassées ; le temps est venu de la science et de la spiritualité »). Ils en furent pour leurs frais : à peine le troisième millénaire eut-il commencé que la religion s’invita dans l’actualité, sous la forme d’avions de ligne lancés au cri de « Dieu est grand ! » sur un des symboles de la modernité. Certes, les signes avant-coureurs de cette tragédie n’avaient pas manqué, au moins depuis 1979 et la révolution iranienne. Les médias firent dès lors bon accueil à des experts plus ou moins autoproclamés, invités à disserter sur les rapports entre religions et violence.