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Amérique Latine

Coup de sang, Enrique Serna

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 05 Juillet 2013. , dans Amérique Latine, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Métailié

Coup de sang (La sangre erguida), traduit de l’espagnol (Mexique) par François Gaudry, avril 2013, 335 pages, 20 € . Ecrivain(s): Enrique Serna Edition: Métailié

 

Bulmaro Diaz, alias Amador Bravo, a pour habitude de dialoguer avec son sexe. Le roman débute sur une période de relations tendues entre eux deux. Bulmaro en effet accuse son alter ego d’avoir fait preuve d’une concupiscence scandaleusement égocentrique lorsqu’il l’a obligé à quitter sa famille et à abandonner l’affaire prospère de mécanique générale qu’il possédait à Vera Cruz pour suivre à Barcelone Romalia, une chanteuse peu talentueuse mais fort voluptueuse :

« Ce que je ne te pardonne pas, c’est de m’avoir fait céder quand Romalia m’a annoncé à grand renfort de trompettes qu’on venait de lui proposer de chanter comme soliste dans un club de salsa à Barcelone ».

Juan Luis Kerlow a lâché ses études de biomédecine au grand dam de sa famille d’intellectuels pour faire une brillante carrière d’acteur du porno à Los Angeles. Il entre en scène en ce roman au moment où les producteurs, à la recherche de nouveaux talents, commencent à le laisser sur la touche. Par défaut, il accepte un contrat médiocre de cinq films sur un an à Barcelone.

Côté cour, Leandro Ávalos Blacha

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 17 Juin 2013. , dans Amérique Latine, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Asphalte éditions

Côté cour, traduit de l’espagnol (Argentine) par Hélène Serrano, mai 2013, 192 pages, 15 € . Ecrivain(s): Leandro Avalos Blacha Edition: Asphalte éditions

 

Imaginez un monde où un omnipotent opérateur téléphonique, Phonemark, règne en maître absolu sur votre existence, peut supprimer d’un simple coup de rayon votre maison si vous ne rechargez pas votre portable de crédits suffisants. Imaginez que cette entreprise vous oblige à emprisonner entre vos murs, contre une modique rémunération, des petits délinquants ou des tueurs en série, vous transformant en geôliers domestiques, qu’elle surveille tous vos faits et gestes, et qu’au final, gratification suprême, elle vous rende malade ou fou à lier…

Vous habitez un quartier où les maisons possèdent toutes une cour isolée, et c’est dans ces lieux clos que l’horreur s’installe… l’horreur, le fantastique et le magique.

Dans ce roman bâti autour de cinq chapitres, que l’on peut lire comme autant de nouvelles, le lecteur glisse peu à peu dans un univers cauchemardesque, où les protagonistes subissent le joug du diktat de la firme, s’en accommodent tant bien que mal, vont parfois bien au-delà de ce qu’elle leur impose, ou tentent de s’engouffrer dans les failles du système pour garder une certaine marge de manœuvre individuelle.

Tes yeux dans une ville grise, Martin Mucha

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 08 Janvier 2013. , dans Amérique Latine, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Asphalte éditions

Tes yeux dans une ville grise, 10 janvier 2013, 16 €, 192 p . Ecrivain(s): Martin Mucha Edition: Asphalte éditions

 

 

Martin Mucha offre avec ce roman singulier et attachant un panorama kaléidoscopique d’une époque et d’une ville. L’époque est la fin du vingtième siècle, la ville est Lima, une ville qu’il traverse chaque jour et qui lui donne l’occurrence d’une perception plurielle du monde urbain. Si Jeremias, le narrateur, nous fait voyager dans la capitale péruvienne de long en large, Lima est le personnage principal du texte. Deux moyens de transport sont privilégiés en raison de la modicité du coût, le bus et le combi. « A voir les gens derrière les vitres du bus, on dirait qu’ils sont attrapés dans un écran ». Vision du monde urbain qui n’offre aucun attrait, sauf à considérer les populations comme canalisées par une force qui les contraint. Jeremias n’aime pas sa ville, d’autant moins qu’elle sécrète des « prophètes », tel ce « cinglé qui monte dans le bus pour disserter sur la société et la folle religion qui est la sienne ».

Le voleur de cadavres, Patricia Melo

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 29 Novembre 2012. , dans Amérique Latine, Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres, Roman, Actes Noirs (Actes Sud)

Le Voleur de Cadavres. Trad. Du portugais (Brésil) par Sébastien Roy. 218 p. 19,80 € . Ecrivain(s): Patricia Melo Edition: Actes Noirs (Actes Sud)

 

Livre étrange et fort, bousculant tous les archétypes du roman noir, le voleur de cadavres interroge sur la frontière ténue qui sépare le bien et le mal chez des personnages pourtant bien « gentils », presque touchants d’humanité.

Première surprise, le cadre de l’histoire. Loin des villes grondantes, du bitume mouillé, des néons blafards et des truands. Le narrateur/héros de l’histoire a quitté la ville qu’il ne supportait plus, Sao Paulo, pour se reposer dans une sorte de paradis terrestre, le Pantanal, dans le Mato Grosso à l’ouest de Brésil. Paradis écologique qui constitue l’écosystème le plus dense de la planète, avec un réseau extraordinaire de cours d’eau et de lacs, des forêts somptueuses et une faune d’une richesse exceptionnelle.

Notre homme va à la pêche sur le fleuve Paraguay. Il fait un temps splendide. Tout est paisible. Soudain un petit avion se fait entendre, tombe dans le fleuve nez en avant, et se plante dans l’eau devant notre pêcheur ébahi.

L'employé, Guillermo Saccomanno

Ecrit par Yann Suty , le Jeudi, 22 Novembre 2012. , dans Amérique Latine, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Asphalte éditions

L’employé (El Oficinista), trad. espagnol (Argentine) Michèle Guillemont, 172 p. 18 € . Ecrivain(s): Guillermo Saccomanno Edition: Asphalte éditions

L’employé. C’est le titre du livre, c’est aussi la fonction de son protagoniste principal. Mais c’est aussi son nom. Comme tous les autres personnages du livre, il n’est désigné que par sa fonction. L’univers est bureaucratique : on pense tout de suite à Kafka.

L’employé reste tard à son travail. Ce n’est pas que son travail lui plaise, mais « il préfère retarder autant que possible son retour au foyer » pour des raisons qu’il serait dommage de révéler.

Son travail est pourtant loin d’être un havre de paix. Ses collègues ne peuvent être que des ennemis. La tension et la violence latente sont d’autant plus vives qu’elles sont accompagnées de non-dits.

« Ce matin, à son arrivée, il comprend qu’un licenciement va avoir lieu. Un garçon bien mis attend à la réception, près de l’accès principal aux bureaux. Une jeune fille ou un jeune homme à cette place signifie, chacun le sait, le remplacement d’un membre du personnel. Les nouveaux attendent, prêts à occuper un poste et à entrer immédiatement en fonction, tandis que les employés commencent leur journée dans la crainte, en se demandant qui va être remplacé, qui sera licencié. Le jeune aux cheveux gominés, au costume gris, à la chemise blanche et à la cravate bleue, est posté là tel un soldat en faction ».