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Roman

Penjab, Éric Deschodt

Ecrit par Stéphane Bret , le Lundi, 12 Septembre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La rentrée littéraire, Editions de Fallois

Penjab, septembre 2016, 233 pages, 19 € . Ecrivain(s): Éric Deschodt Edition: Editions de Fallois

 

Les conséquences de la chute de Napoléon et de son exil à Sainte-Hélène ont provoqué le désespoir de ses soldats et officiers. Le capitaine Allard et le maréchal des logis Ventura, deux principaux personnages du roman d’Éric Deschodt, Penjab, vont aller chercher en Inde une sorte d’accomplissement qui est leur est dénié dans le cadre de la Sainte-Alliance qui dresse « les rois contre les peuples ». En effet, un autre empire ne cesse de s’étendre, il est situé au pied de l’Himalaya entre l’Hindoustan et l’Afghanistan. C’est l’empire Sikh du Penjab dirigé par Ranjit Singh, maharadjah de Lahore. Ces deux officiers, dont la curiosité intellectuelle est grande, vont se rejoindre pour parfaire l’organisation de l’armée de cet empire en pleine expansion. Mais qui sont-ils ? Pour le savoir, Allard et Ventura font appel à Baroud Singh Ahluwalia, un érudit local :

« Le mot Sikh vient du sanscrit. Il signifie “disciple”. Nous sommes les disciples du Guru Nanak, né au Penjab en 1469, fils d’un riche négociant. Le message tient en quatre mots : un seul Dieu, égalité, altruisme et tolérance (…) Sikh et altruiste sont synonymes. Le vrai Sikh n’agit que pour Dieu et pour son prochain. La paix est le bien suprême ».

A la lumière de ce que nous savons, Zia Haider Rahman

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 09 Septembre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Christian Bourgois

A la lumière de ce que nous savons (In the light of what we know), mars 2016, trad. anglais Jacqueline Odin, 515 pages, 25 € . Ecrivain(s): Zia Haider Rahman Edition: Christian Bourgois

 

 

Un pavé, mais un pavé en or !

Ce roman, qui n’est pas qu’un roman, le premier de Zia Haider Rahman, situe son auteur, d’emblée, parmi les maîtres du genre.

Le narrateur est anglais, fils de Pakistanais musulmans émigrés très aisés, héritiers eux-mêmes d’une « célèbre famille terrienne » et de riches industriels et armateurs du Pakistan. Les parents se sont installés, fort bien installés même (le père est professeur à Oxford, la mère est psychothérapeute) et totalement intégrés dans la société anglaise après avoir vécu aux Etats-Unis. Il se présente au début du roman comme « issu d’un milieu privilégié » et parle sans complexe de sa propre réussite professionnelle dans le domaine de la finance.

Un cheval entre dans un bar, David Grossman (2ème critique)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Jeudi, 08 Septembre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Bassin méditerranéen, Points, Moyen Orient

Un cheval entre dans un bar, août 2015, trad. hébreu Nicolas Weill, 176 pages, 19 € . Ecrivain(s): David Grossman Edition: Points

 

Le dernier roman de David Grossman est un livre grinçant à souhait, qui cultive l’auto-dérison à la puissance dix, jusqu’à l’auto-mutilation mentale, et qui peut se lire à un double niveau.

A un premier niveau, narratif, l’humoriste Dovalé, âgé de 57 ans, se livre à un « stand up », un one-man-show, sorte de comédie où l’acteur est debout devant son public, l’apostrophe, s’oppose à lui. Il a pris soin d’inviter à sa performance un ancien camarade de classe devenu juge, Avishaï Lazar, à présent retraité, et peut-être d’autres connaissances antérieures. L’humoriste énonce de mauvaises blagues, utilisant tous les registres du comique, des blagues qui non seulement ne font pas toujours rire mais qui semblent receler de la malveillance. « Qui sait quelle partie d’échecs complexe il joue avec nous ce soir ? »

Ce soir-là, le spectacle dérape, l’humoriste va trop loin et se livre à une alternance d’humiliations publiques et de séances d’auto-flagellation. Tout participe au malaise de la soirée, non seulement la succession des scènes de comédie plus ou moins réussies, mais aussi le voyeurisme du public, confronté à « la tentation de lorgner l’enfer d’autrui », et l’incompréhension méprisante du copain d’enfance vis-à-vis du métier d’amuseur de foule :

Nos lieux communs, Chloé Thomas

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 08 Septembre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard, La rentrée littéraire

Nos lieux communs, août 2016, 173 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Chloé Thomas Edition: Gallimard

La croyance à la révolution est-elle risible et naturellement hors de propos ? Chloé Thomas, dans son premier roman, s’attache à radiographier l’histoire de Bernard et Marie, étudiants dans les années soixante-dix, partis rejoindre les ouvriers en usine. Leur fils, Pierre, élevé solitairement par Bernard que sa compagne a quitté, tente avec l’aide de Jeanne, son amie, de reconstituer l’itinéraire de ce couple, mal placé dans l’histoire, arrivant toujours après les grandes batailles déjà livrées par d’autres générations ou perdues d’avance. Il faut constater que l’auteur n’éprouve guère d’empathie à l’égard des engagements politiques et convictions de ses personnages. Ils sont dépeints comme des êtres inauthentiques, dont les choix tombent, forcément, à plat :

« Au moins, avec le temps, avaient-ils donc appris, les autres, à ne pas s’émouvoir de la beauté supposée du geste ouvrier, des grandes mains puissantes et couturées. Leur propos n’est plus esthétique. Peut-être est-ce cela, la recherche du beau et ce goût du lyrique, qui les avait perdus, eux. C’était pourtant de leur âge ».

On attend tout au long du récit un soupçon de sympathie, de tendresse, pour ce couple d’adolescents en retard d’une époque, en recherche d’une révolution introuvable. Il ne vient jamais, et c’est un véritable réquisitoire qui s’abat sur eux :

Le Vieux Saltimbanque, Jim Harrison

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 06 Septembre 2016. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Flammarion, La rentrée littéraire

Le Vieux Saltimbanque (The Ancient Minstrel), trad. américain Brice Matthieussent septembre 2016, 148 pages, 15 € . Ecrivain(s): Jim Harrison Edition: Flammarion

 

Il se trouvera sûrement quelques pisse-froid pour dire que ce dernier opus de Maître Jim n’est pas un chef-d’œuvre. Peut-être que ce n’en est pas un, mais c’est un pur moment de bonheur et c’est déjà beaucoup. Big Jim nous dit adieu comme nous l’avons toujours connu : joyeux, débonnaire, exubérant. On peut dire, en paraphrasant La Palisse, que Jim Harrison, quelques semaines avant sa mort, était toujours vivant. Et quelque chose nous dit que, même après sa mort, il le sera encore. Lui, qui répétait à l’envi que ce qu’il craignait de la mort était de ne plus boire de bons vins, va certainement s’organiser pour, au moins, écrire encore. Il nous le dit d’ailleurs : « Peut-être qu’on radotera encore dans notre cercueil ».

Le Vieux Saltimbanque est une sorte d’autobiographie. Mais avec Big Jim rien n’est comme d’habitude. Son narrateur parle à la troisième personne. « J’ai décidé de poursuivre mes mémoires sous la forme d’une novella. A cette date tardive, je voulais échapper à l’illusion de réalité propre à l’autobiographie ». Il faut dire que le vieux Jim est pour le moins secoué par son entourage quand il annonce son projet lors d’un dîner de famille !