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Les Livres

La Peinture et le cri, Jérôme Thélot (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 10 Janvier 2022. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Arts, L'Atelier Contemporain

La Peinture et le cri, Jérôme Thélot, octobre 2021, 184 pages, 25 €

N’es-tu pas reine ô toi que découronnera

La camuse au milieu des infâmes cris noirs

N’es-tu pas à présent le charnel chant du soir

N’es-tu pas la beauté que la mort posséda ?

Pierre Jean Jouve

Cri noir

La Peinture et le cri aurait pu se sous-titrer : Variations sur le cri. Car de Pollaiolo à Francis Bacon, Jérôme Thélot explore la production plastique occidentale du cri en peinture, s’appuyant sur l’effet de punctum qui prend sens dans la vision légèrement inquiète que suscitent les tableaux. Donc, il oriente le regard vers un suspens, un point d’orgue, un accent bruyant et muet, si cet oxymore convient, vers la bouche ouverte et béante de personnages sacrés ou profanes.

Imagine une ville, Elise Hurst (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 07 Janvier 2022. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Jeunesse

Imagine une ville, Elise Hurst, Éditions D’Eux, novembre 2021, trad. anglais, Christiane Duchesne, 32 pages, 16 €

 

Lanterne magique

Elise Hurst, artiste australienne basée à Melbourne, signe une nouvelle fois un délicieux album jeunesse, de facture classique, à mi-chemin entre l’illustration du 19ème siècle et les aventures de Mary Poppins. La trame graphique est bicolore sur fond blanc cassé, au format de 24,1 x 30,4 cm. Les gardes sont ornées de nuages rouges et blancs traversés par de mystérieux sujets. La rupture avec le réel est consommée quand une jeune mère, sa fille et son fils vont se trouver face à des situations les plus incongrues. Des scènes fantastiques créées pleine page vont transporter les enfants à l’intérieur d’un environnement hors du commun et des péripéties poétiques et ésotériques. C’est alors que les époques, les lieux, les genres, les personnages se mélangent. Par exemple, dans le train à vapeur, un petit-déjeuner plantureux est servi par un garçon de café à la mise orientale, tandis que mère lapine lit les dernières dépêches.

Dans les braises d’Hervé Guibert, Maxime Dalle (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 06 Janvier 2022. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Dans les braises d’Hervé Guibert, Maxime Dalle, éditions Louison, octobre 2021, 144 pages, 19 €

 

A la mémoire de Conrad Detrez et David Wojnarowicz

 

A quoi reconnaît-on un auteur important ? A la place qu’il occupe en son siècle, moins comme témoin que comme voix, petite musique, grincement, conscience malheureuse parfois ? A son monde, que l’on identifie en quelques lignes ? A sa langue et à son influence ? Aux pages insignifiantes qu’il s’est gardé de publier ? Hervé Guibert, mort du SIDA le 27 décembre 1991 à trente-six ans, fut un auteur important. Quiconque a eu vingt ans vers 1985, ayant ou non partagé ses préférences sensuelles, ayant été touché ou non, de près ou de loin, par la pandémie, ne peut être resté indifférent à ses livres et à sa trajectoire, exemplairement lumineuse et douloureuse.

A quoi reconnaît-on un livre important sur un auteur important ? A la manière dont il vous happe ; aux perspectives qu’il découvre. L’essai biographique de Maxime Dalle, Dans les braises d’Hervé Guibert, est un livre important.

Bouger les lignes, Florence Saint-Roch (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 06 Janvier 2022. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Poésie

Bouger les lignes, Florence Saint-Roch, L’Ail des ours, octobre 2021, 48 pages, Ill. Roselyne Sibille, 6 €

Ce livre tout consacré aux migrants d’une époque terrible nous demande, à nous lecteurs, de « bouger les lignes » de notre conscience.

À l’heure où tant de gens cherchent, par tous les moyens, de concevoir pour eux et leurs enfants une meilleure vie, à coups de voyages et d’errances, le poème peut, sans doute, apporter une sorte de salut, un brin de réflexion, une espèce de sauvegarde :

 

Notre solitude en croise d’autres

Le soir venu en lieux d’herbes et de taillis

On se réchauffe au même feu

Thé de fortune gruau épais

Nos pieds rendus à leur nudité (…) (p.33)

Les Communards, Michel Winock, Jean-Pierre Azéma (par Vincent Robin)

Ecrit par Vincent Robin , le Jeudi, 06 Janvier 2022. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Seuil, Histoire

Les Communards, Michel Winock, Jean-Pierre Azéma, mars 2021, 224 pages, 8 €

Par tradition, le terme de « Communards » désigne ces citadins qui prirent part à l’insurrection parisienne de 1871. Ce fut ainsi, au lendemain de la sévère défaite napoléonienne de Sedan (le 1er sept. 1870), que cette population urbaine entendit s’opposer vigoureusement, d’abord à l’invasion prussienne, ensuite à l’Assemblée versaillaise conduite par Thiers et préconisant une collaboration avec l’envahisseur. Par recul historique faut-il considérer que ces citadins révoltés furent essentiellement des ouvriers et artisans soutenus par des membres de la petite bourgeoisie parisienne. Forte de la Garde nationale qui se rangea majoritairement à ses côtés, cette importante fraction insurgée, le plus souvent populaire, entendit alors répondre aux menaces qui se profilaient face à elle de deux côtés. Par une réaction armée, par une reconsidération des statuts sociaux courants et par l’affirmation de son autonomie. C’est ainsi, grâce à une charte élaborée par l’assemblée communale élue à la majorité que cette émanation populaire définissait bientôt ses principes d’immunité et de régulation sociale. Au bout de quelques mois cependant, ce mouvement collectif aux aspirations d’indépendance démocratique et de justice sociale allait succomber dans un affreux bain sanglant, généré par l’acharnement et la sévérité militaires de « Français-Versaillais », finalement bien plus compréhensifs et dociles à l’égard de l’occupant germanique.