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Les Chroniques

Souffles 7. Les "mille et une nuits" et sidna Ramadhan : du temps plaisir au temps pervers

Ecrit par Amin Zaoui , le Lundi, 05 Septembre 2011. , dans Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers, La Une CED

"Souffles" in "Liberté"

 

“Tout ce qui n’est pas donné est perdu”. Jadis, pendant le mois sacré du Ramadhan, après le Livre sacré le Coran, les Mille et Une Nuits fut le livre le plus lu, le plus raconté par les musulmans. De Baghdad à Nouakchott, d’Ispahan à Khartoum, de Samarkand à Fès, d’Istanbul à Tamanrasset, de Damas à Tlemcen les musulmans célébraient leurs nuits et leurs après-midis ramadhanesques  par la revisite annuelle du livre les Mille et Une Nuits. Dans  toutes les bibliothèques familiales, aux côtés du Coran et des livres des tafassir (les interprétations) notamment Sahih Al Boukhari et Sahih Muslim, les Mille et Une Nuits disposait d’une place magistrale. Il ne faisait jamais défaut. On le lisait, on le contait, on le re-contait sur les places publiques ou dans les cercles nocturnes.

Omniprésent, entre les mains des intellectuels comme chez les petites gens. Les Mille et Une Nuits restera le chef-d’œuvre des arabo-musulmans. Il n’est, enfin de compte, que le fruit du génie exceptionnel de l’oralité. Certes la marge de liberté offerte par l’oralité a contribué, à travers les siècles, à ciseler ce texte, le façonner à l’image d’une pièce rare. Par sa forte liberté d’imagination, par l’intelligence populaire et par la fascination artistique de la narration, nul autre livre n’égale ni n’égalera les Mille.

La Mère Michel a lu (1)

Ecrit par Michel Host , le Dimanche, 04 Septembre 2011. , dans Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers, La Une CED

Chronique

DÉFENSE DU PAGANISME

« Contre les Galiléens »

de JULIEN L’APOSTAT


Traduction du Marquis d’Argens. Révision, postface (Le chant du cygne du Paganisme), annotations par Yannis Constantinidès. Éditions Mille.et.une.nuits, 2010, 100 pp., 3€50.


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Benoît, pape des catholiques apostoliques et romains, vient de nous rappeler que le triomphe de son Église est permanent. Madrid, cet été, a vu un million de jeunes vainqueurs de Julien l’Apostat camper dans ses murs. Peut-être certains d’entre eux ignoraient-ils qu’ils eussent pu ne jamais piétiner le sol de la plaza de Cíbeles, parce que des adorateurs de Zeus, d’Apollon, d’Héraclès et d’Aphrodite eussent pu danser en leur lieu et place sur l’asphalte madrilène.

Mystères sur Vienne (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Samedi, 30 Juillet 2011. , dans Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers, Chroniques régulières, La Une CED

Frank Tallis : mystères sur Vienne

Cinq livres et déjà un statut, une aura, une place incontestable pour Max Liebermann dans la lignée des grands détectives de fiction. L'écrivain anglais Frank Tallis, lui-même psychologue clinicien très renommé à Londres, a façonné un atypique et séduisant enquêteur en la personne d'un jeune psychanalyste juif, élève de Freud, dans la Vienne du début du XXème siècle. Sollicité par son ami, Oskar Rheinhardt, inspecteur de police, Max se plonge avec passion dans les noires affaires qui assombrissent encore les sombres rues de la Vienne impériale. A l'occasion, il n'hésite pas, il va prendre conseil auprès d'un « auxiliaire » de grand luxe : son professeur, le docteur Sigmund Freud ! Déviances sexuelles, drames familiaux, serial killers, notre psychanalyste apporte un regard perspicace et novateur sur la criminologie.

L'écrin de ces noires aventures, nous l'avons vu, c'est Vienne. Une cité mythique en ces temps : la patrie des poètes (Rilke), des musiciens (c'est la période glorieuse de Gustav Mahler, directeur artistique de l'Opéra de Vienne) , des grands écrivains (Stefan Zweig, Arthur Schnitzler), des peintres célèbres (Gustav Klimt). C'est aussi un « bouillon de culture » dont l'Unbewusste (l'inconscient) sera le joyau. C'est enfin la Vienne de la montée du pire : une agitation antisémite permanente, portée par une haine incoercible et dont on sait l'avenir effroyable.

Le corps et l'amour dans la littérature algérienne (2)

Ecrit par Amin Zaoui , le Samedi, 23 Juillet 2011. , dans Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers, Chroniques régulières, La Une CED

"Souffles"


Tantôt de gauche à droite, j’écris. Et ma mère me dit : c’est le chemin des roumis. Tantôt de droite à gauche, j’écris. Et ma mère me dit : c’est le chemin des musulmans, le chemin droit. Il en va de même pour la lecture. Dans cette valse de Sisyphe, je tâtonne le vide noir et j’écris : « je » en français ou « ana » en arabe, peu importe ! Ecrire le « je » ou le « ana » est un « jeu » draconien…

Et je vous raconte ce qui suit : en 1985, j’ai publié, à Damas, mon premier roman intitulé Le hennissement du corps. Un texte sur mon enfance diabolique. Toutes les enfances sont terribles ! Une sorte d’autobiographie romancée, dont j’ai focalisé sur mon éducation sexuelle et religieuse. Les jours d’un enfant de onze ans, écoulés entre une mère, le grand-père, un père fasciné par la lecture de la sira du Prophète amoureux de plusieurs femmes, une cousine charnelle et des tantes qui n’attendent que les mâles et des poules… Le roman a été interdit, la maison d’édition scellée, définitivement fermée, et l’éditeur jeté en prison. Pour moi, la répression ne fut pas uniquement politique et institutionnelle mais aussi familiale. Ainsi, j’ai subi des intimidations de la part de quelques membres de la famille qui n’ont pas admis de voir nos linges sales étalés sur la voie publique. Le roman ! J’ai senti que ma vie est doublement confisquée. La liberté de mon imaginaire est violée.

Le corps et l'amour dans la littérature algérienne : l'ange ou le démon (1)

Ecrit par Amin Zaoui , le Jeudi, 07 Juillet 2011. , dans Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers, Chroniques régulières, La Une CED

L'ange ou le démon

Tantôt, de gauche à droite, j’écris. Et ma mère me dit : c’est le chemin des roumis. Tantôt, de droite à gauche, j’écris. Et ma mère me dit : c’est le chemin des musulmans, le chemin droit. Il en va de même pour la lecture. Pour moi, cette valse n’est qu’une malédiction de Sisyphe. Cycle absurde où je me recherche, dans une lumière obscure. Chute de Sisyphe, je tâtonne le vide noir et j’écris : « je » en français ou « ana » en arabe, peu importe ! Ecrire le « je » ou le « ana » dans tous ses états, tous ses éclats et dans toutes ses brumes est un « jeu » draconien. Supporter, transporter la pierre de Sisyphe jusqu’au sommet du paradis, ensuite descendre jusqu’au fond de l’enfer de Dante : écrire le « je » ou le « ana ». Fixer le miroir, collé devant soi, afin de détailler les traits les plus délicats et compter toutes les rides discrètes et les vagues successives des soupirs parvenant d’un fond feu est un exercice sévère : écrire le « je » ou le « ana », qu’importe. Amertume ou allégresse ? Par ce chemin sauvage, incertain et rocailleux, passent la genèse et le défi du texte littéraire. Je ne suis pas sûr ! Incertain. Certain. L’écrivain appartenant à ce monde obscurci et complexe appelé « arabo-musulman », est conçu, depuis son enfance, dans l’hégémonie d’une culture dominante celle de « l’hypocrisie ». Depuis l’enfance, nous vivons dans le non-dit, dans le non-vu, le non-entendu. Et nous continuons à vivre cette situation aberrante et insensée.