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Roman

Les Rois d’Islande, Einar Már Guðmundsson

Ecrit par Grégoire Meschia , le Lundi, 25 Juin 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays nordiques, Zulma

Les Rois d’Islande, février 2018, trad. islandais Eric Boury, 336 pages, 21 € . Ecrivain(s): Einar Már Guðmundsson Edition: Zulma

 

Pays qui fascine du fait de son éloignement géographique et ses paysages uniques, l’Islande reste encore une nation étrangère à nos yeux. Un de ses ressortissants, Einar Már Guđmundsson, écrit sa légende et fait de cette île singulière la patrie des rois. En faisant se succéder histoires truculentes et anecdotes farfelues, il attribue une origine mythologique à ses personnages qui est empreinte de fantaisie et de trivialité.

Les Islandais, fiers de leur identité, s’emploient à « faire remonter leur lignage jusqu’aux rois des sagas légendaires, aux rois des mers ». De la même manière, le narrateur des Rois d’Islande est à la recherche de l’origine de la famille Knudsen. La part accordée à la fiction prime tout au long du récit : on se demande tout le temps si le narrateur n’affabule pas tant les histoires racontées semblent loufoques et cocasses. Peut-être ne fait-il que rêver cette famille héroïque ? Il cite Steinn Steinarr (poète islandais ayant véritablement vécu dans la première moitié du XXe siècle) et on a envie de le croire :

A l’aube, Philippe Djian

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Lundi, 25 Juin 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

A l’aube, avril 2018, 192 pages, 19 € . Ecrivain(s): Philippe Djian Edition: Gallimard

 

Philippe Djian aime les vastes espaces ruraux ou urbains, dans lesquels il place des personnages pulsionnels et torturés et des intrigues sulfureuses.

Dans ce roman, la scène se passe autour de la très Old-England, East-Coastville de Boston, dans la campagne de l’état du Massachussetts, mais en fait d’Amérique il s’agirait bien plutôt d’une France sudiste, brute et profonde, à l’image de celle de 37°2 le matin, ou encore d’une lointaine inspiration du fabuleux roman Le Bruit et la Fureur de William Faulkner. Ainsi, les prénoms des personnages, tous américanisés sauf celui de Sylvie, la femme du shérif, et l’omniprésence de Marlon, qui, comme le Benjy de Faulkner, souffre de maladie mentale, tissent un entrelacs de références torrides que le désert froid et enneigé des dernières pages ne suffit pas à oblitérer.

Surtout, ce que l’on retrouve dans les romans de Djian, ce qui fait sa force, son charme et qui forge sa prose narrative, ce sont les dialogues, mi-intérieurs mi-extériorisés, à peine signalés par un retour à la ligne, sans ponctuation, sans marque énonciative distincte, souvent sans incise. Des phrases hâchées qui sont le propre de personnages sous tension.

Bitna, sous le ciel de Séoul, J.M.G. Le Clézio

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 21 Juin 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Stock

Bitna, sous le ciel de Séoul, mars 2018, 217 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): J-M G. Le Clézio Edition: Stock

 

Les talents de conteur de J.M.G. Le Clézio sont mondialement connus. Ce nouveau roman en est une autre illustration.

Le roman est à double niveau de narration. Tantôt la narratrice, Bitna, raconte à la première personne l’histoire dont elle est le personnage principal, tantôt, ouvrant un second tiroir narratif, elle prend le statut de conteuse pour aider un autre personnage, Salomé, à supporter sa réclusion solitaire provoquée par une maladie dégénérative.

Le roman, comme l’indique le titre, se déroule « sous le ciel de Séoul », où Bitna, jeune fille issue d’une famille pauvre de pêcheurs, est venue entreprendre des études universitaires. D’abord hébergée chez une tante qui l’exploite, la maltraite et l’humilie, elle ira, au cours d’une unité de temps s’étendant sur une année scolaire, de chambres insalubres en petits logements plus ou moins précaires. C’est pour payer son loyer qu’elle accepte, à la demande d’un mystérieux Frederick, alias M. Pak, vendeur en librairie avec qui elle noue une relation équivoque et sans issue, de faire fonction de dame de compagnie pour la paralytique.

Une verrière sous le ciel, Lenka Hornakova-Civade

Ecrit par Lionel Bedin , le Mardi, 19 Juin 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Alma Editeur

Une verrière sous le ciel, février 2018, 18,50 € . Ecrivain(s): Lenka Hornakova-Civade Edition: Alma Editeur

 

Automne 1988. Paris, gare de l’Est. Ana, une jeune tchécoslovaque de 18 ans, à Paris pour une colonie de vacance organisée par le Parti communiste tchèque, décide de ne pas prendre le train du retour. En plein doute, elle erre dans Paris jusqu’au Père Lachaise. Près de la tombe de Modigliani, elle y rencontre Grofka – « elle doit être une fée, voilà ce que je pense » – qui va lui trouver un point de chute et lui faire rencontrer quelques personnes.

Au début Ana semble un peu perdue, mais c’est peut-être aussi une volonté : elle parle peu, elle écoute. Elle pense à son passé, hier à Prague, à ses parents et à leur difficile relation. Elle tente de concilier les souvenirs, ce qui lui a été inculqué dans sa jeunesse, avec l’instant présent, tout en essayant d’y lire le futur. Elle qui a des aspirations, qui a choisi de forcer son destin, confronte ses rêves et la réalité.

Le Livre d’Amray, Yahia Belaskri

Ecrit par Fawaz Hussain , le Lundi, 18 Juin 2018. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Zulma

Le Livre d’Amray, mai 2018, 144 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Yahia Belaskri Edition: Zulma

 

Mais où sont les vainqueurs ?

Yahia Belaskri écrit un roman aussi sombre que les ténèbres qui ont précédé la Genèse. Il n’a pas à s’en excuser : l’encre de son stylo est noire, et il n’y peut rien. S’il avait l’intention d’amuser, n’importe quoi de drôle eût fait l’affaire, peut-être même un conte de fées, quelque histoire se terminant sur le mariage du prince et promettant la naissance d’une ribambelle de chérubins tout roses et potelés sortis de la peinture de Raphaël. Mais il est loin de tout cela, et n’a guère l’intention de se dérober à une autre histoire, celle de son pays, et d’ajouter à la longue suite des trahisons dont elle est faite, une trahison de plus… Ayant une conscience aigüe d’où il vient et de sa mission, son narrateur Amray laisse les histoires drôles aux autres et fait le travail de mémoire. Il connaît sur le bout des doigts la terre qui l’a engendré. « Je suis né et le monde a basculé dans la terreur. Qui n’a pas vécu la guerre connaît peu de la détresse des hommes. La guerre n’est que sang, larmes et ruines ».