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Nouvelles

Et la vie continua, Jean Boisdeaufray (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Jeudi, 10 Septembre 2020. , dans Nouvelles, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Et la vie continua, Jean Boisdeaufray, Editions du Petit Pavé, 2010, 132 pages, 15 €

 

Ce recueil de nouvelles se tient comme un funambule adroit sur la corde séparant le rêve et la réalité : d’une part, en raison des différents genres qui sont représentés dans ces nouvelles ; d’autre part, par le fait qu’on y rencontre à la fois des personnages pleinement imaginaires et l’auteur lui-même, exposant des souvenirs à la teinte réaliste ou, au contraire, immergés dans le fantastique.

Ainsi, Le souterrain nous conduit vers un souvenir de jeunesse de Jean Boisdeaufray, condamné à être un découvreur solitaire et incompris, mais seul détenteur d’un secret qui persiste à enchanter son enfance et à lui rendre une saveur particulière. C’est l’une des nouvelles les plus émouvantes de ce recueil.

D’une manière différente, Les cavaliers de Noël s’appuie également sur la mémoire du jeune professeur qu’était Jean Boisdeaufray, mais pour nous emmener, cette fois-ci, dans un mystère qui se tient aux portes du merveilleux et de l’historique.

Dans le confessionnal, et autres nouvelles, Amelia B. Edwards (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mercredi, 26 Août 2020. , dans Nouvelles, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Editions José Corti

Dans le confessionnal, et autres nouvelles, Amelia B. Edwards, trad. Jacques Finné, 248 pages, 18,25 € Edition: Editions José Corti

 

Si la littérature, comme d’autres domaines, est un champ infini, c’est en partie parce qu’elle nous conduit à porter notre regard vers des écrivain(e)s un peu vite oublié(e)s.

Amelia B. Edwards en sait quelque chose : Jacques Finné s’est intéressé de près à la vie et à l’œuvre de cette romancière et nouvelliste britannique, qui fut également égyptologue. En vérité, Amelia B. Edwards était plus que cela : journaliste, musicienne (elle eut le bonheur d’être soliste en tant que chanteuse lyrique), elle fut par ailleurs une conférencière très appréciée à la fin de sa vie, sillonnant l’Amérique et l’Angleterre.

Dans le recueil Dans le confessionnal et autres nouvelles, ce sont sept récits fantastiques qui nous retiennent, sept récits habités par des fantômes qui ne se révèlent pas aussi effrayants qu’on pourrait l’attendre. Sept nouvelles qui n’apporteront pas de surprise supplémentaire aux amateurs du genre fantastique à l’époque victorienne.

La mer ne baigne pas Naples, Anna Maria Ortese (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 26 Août 2020. , dans Nouvelles, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard, Italie

La mer ne baigne pas Naples, juin 2020, trad. italien, Louis Bonalumi, 208 pages, 18 € . Ecrivain(s): Anna-Maria Ortese Edition: Gallimard

Sur la Naples d’après-guerre, du tout début des années cinquante, le livre d’Ortese (1915-1998) n’est pas seulement un témoignage insigne, juste, équilibré, incisif et puissant, mais aussi et surtout une leçon de littérature sans moralisme mais livre tenu par le ton d’une intense morale, non défaitiste mais ouverte, non pessimiste mais qui engage le lecteur à voir plus loin, à analyser en connaissance de cause et sans a priori la lourde réalité laissée, tombée de la guerre.

Voyageuse hors pair des terres italiennes (elle a eu, avant de se poser pour les dernières années sur la côte ligure, à Rapallo, des résidences un peu partout), Ortese scrute la réalité sous toutes ses facettes. Ici, connaissant le matériau napolitain – l’extrême pauvreté de certains quartiers, les tentatives par la culture et l’écriture de sauver la ville de ses chaos, la connaissance journalistique et littéraire des jeunes écrivains, nés dans les années 20, illustrant, selon elle, la mutation d’une ville.

Total chef-d’œuvre (j’ai horreur d’utiliser ce vocable à tout propos) : La mer ne baigne pas Naples, d’Anna Maria Ortese, dont j’avais lu quelques livres, est un hallucinant portrait d’une Naples déchue (période néo-réaliste), 1953.

L’Etreinte de glace, anthologie de Jacques Finné (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mercredi, 24 Juin 2020. , dans Nouvelles, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions José Corti

L’Etreinte de glace, anthologie de Jacques Finné, février 2019, trad. Jacques Finné, Jessica Stabile, 296 pages, 23 € Edition: Editions José Corti

 

 

Le titre L’Etreinte de glace donne une idée du charme de ces nouvelles surnaturelles, issues de l’ère victorienne, un charme qui vous happe à la gorge et ne vous lâche pas. Froid comme la mort, fascinant comme l’inexplicable : voilà en partie des ingrédients qui unissent les huit nouvelles sélectionnées et traduites ici par Jacques Finné (accompagné de Jessica Stabile). Mais il est une caractéristique plus notable encore dans cette anthologie : toutes ces nouvelles ont été écrites par des femmes. Gageons qu’à l’issue de la lecture, nous ne pouvons qu’être d’accord avec Jacques Finné lui-même : ces huit femmes n’ont rien à envier à leurs compères masculins dans le genre de la ‘ghost story’. Elles sont même si douées qu’on est en droit de se demander pourquoi la postérité ne leur a pas fait un meilleur cadeau (jusqu’à maintenant).

De la mort au matin, Thomas Wolfe (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 27 Mai 2020. , dans Nouvelles, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Stock

De la mort au matin (From Death to Morning, 1935) traduit de l’américain par R. N. Raimbault et Ch. P. Vorce. 280 p. . Ecrivain(s): Thomas Wolfe Edition: Stock

 

Ce recueil de textes est présenté – et c’est bien normal – comme un recueil de nouvelles. Or rien n’est plus étranger à Thomas Wolfe que ce genre littéraire spécifique. Si l’on s’en tient à la forme, oui, il s’agit de courts récits sur divers moments ou thèmes, des « nouvelles » donc. Mais très vite – pour qui connaît un peu l’œuvre du géant du Sud (par la taille et le génie) – on se rend compte qu’il s’agit de bribes de la montagne de feuilles manuscrites que Wolfe apporta un jour à son éditeur, le bon Maxwell Perkins de Scribner effaré, et dans laquelle il dut piocher, rapiécer, restructurer, pour en faire naître enfin quatre romans fabuleux et des « nouvelles » étincelantes. L’œuvre de Wolfe, en d’autres termes, est UNE, un bloc indissociable même s’il fut dissocié pour des raisons éditoriales. Wolfe se raconte comme une fiction, ou plutôt il raconte, dans un flot inextinguible, ce que sa mémoire ahurissante lui dicte. La phrase obsessionnelle en est l’outil, qui détaille tout, les recoins des lieux, des personnages, des faits. Le style de Wolfe est obsessionnel, fait de phrases récurrentes, d’imprécations exaltées, de champs lexicaux surchargés.