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Les Livres

Découverte inopinée d’un vrai métier, suivi de La vieille dette (nouvelles), Stefan Zweig

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 12 Janvier 2016. , dans Les Livres, Critiques, Livres décortiqués, La Une Livres, Nouvelles, Folio (Gallimard)

Découverte inopinée d’un vrai métier, suivi de La vieille dette, décembre 2014, trad. allemand (Autriche) Isabelle Kalinowski et Nicole Taubes, 115 pages, 2 € . Ecrivain(s): Stefan Zweig Edition: Folio (Gallimard)

 

Les deux nouvelles de Stefan Zweig qui constituent cette édition de poche établie sous la direction de Jean-Pierre Lefebvre ont été extraites de Romans, nouvelles et récits, tome II de la Bibliothèque de la Pléiade (Gallimard).

Découverte inopinée d’un vrai métier

Le narrateur, de la terrasse d’un grand café de Paris, en avril 1931, observe les mouvements de foule des badauds quand son attention est attirée par le manège d’un homme évoluant furtivement ici et là parmi la masse. Il formule une première hypothèse sur le métier de l’individu jusqu’au moment où son observation attentive l’amène, par analyses, déductions, accumulations et confrontations d’indices, à la conviction que l’homme exerce une profession qui se situe à l’opposé du postulat initial. Lorsque le personnage quitte la place, le narrateur, saisi d’une irrésistible envie de le surprendre en pleine occupation, le suit jusqu’au célèbre Hôtel Drouot où se déroule une vente aux enchères. Leurs destins vont ici se croiser concrètement, physiquement, d’une manière singulière…

Le roman de Renart

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 11 Janvier 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Récits

Le roman de Renart, Bibliothèque nationale de France, décembre 2015, 160 pages, 24,90 €

 

La Bnf (Bibliothèque nationale de France) publie ce fameux Roman de Renart, le roman populaire du Moyen Age, une des pièces maîtresses de notre patrimoine culturel. Ce fut une source d’inspiration majeure pour les enlumineurs, et cette édition laisse une large place aux « illustrations » de l’époque, avec des reproductions qui ponctuent tout aussi efficacement qu’agréablement les différents textes dont il faut rappeler qu’ils datent pour les plus anciens du 12eme siècle et pour les plus récents du 14eme siècle. Ces textes furent aussi une source d’inspiration pour La Fontaine qui puisa dans Renart et Tiecelin sa fable le corbeau et le renard.

La préface, une bande dessinée d’Alain Ayrolles et Jean-Luc Masbou, est suivie d’une présentation de Delphine Mercuzot, conservateur au département des manuscrits de la Bnf qui explicite le choix des textes puisque la profusion des aventures interdisait une publication exhaustive. On y apprend que dès le Moyen Age le Roman de Renart est traduit en flamand, en allemand, en anglais et en Italien. C’est dire le succès de ces textes qui ne constituent pas un roman au sens actuel du terme, en raison de la multiplicité des auteurs qui, chacun, ajoutait une « branche », mais plutôt des récits dont chaque auteur s’appropriait le héros, ce goupil facétieux, qui n’a de cesse de dénoncer les vices des clercs et autres moines dans sa quête de nourriture.

Day for Night, Richard Learoyd

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Lundi, 11 Janvier 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts

Day for Night, Richard Learoyd, éd. Fraenkel Gallery, San Francisco, novembre 2015

 

Les photographies en couleurs de Richard Learoyd sont créées à partir d’un des plus vieux processus photographiques : celui de la camera oscura. Dans une pièce est installé son appareil, dans une autre séparée de la première par une lentille, le « sujet » de sa prise. L’image est des plus précises, simples et directes. Elle augmente ce que l’œil perçoit de manière commune. L’artiste photographie dans son studio à Londres et parfois dans la campagne anglaise chargée de toute l’histoire de l’art.

L’aventure photographique est spectaculaire mais dans le bon sens du terme. Elle agit et de manière uniquement poétique loin de toute version post pop d’un fétichisme du portrait. Learoyd réinvente toute une économie symbolique des signes iconiques. Il les métamorphose à l’état de rébus très éloignés de la simple compréhension formelle de reconnaissance. C’est pourquoi l’œuvre échappe à tout potentiel mimétique. L’éloquence visuelle, le velouté éventuel des surfaces, le mouvement et les directions des formes, le jeu des vides, la vulnérabilité paradoxale, la légèreté dominent des ensembles qui renvoient à une série d’interrogations.

Trouver un autre nom à l’amour, Nivaria Tejera

Ecrit par Marc Ossorguine , le Samedi, 09 Janvier 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Poésie, Roman, La Contre Allée

Trouver un autre nom à l’amour, octobre 2015, trad. espagnol (Cuba) par François Vallée (Buscar otro nombre al amor), 237 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Nivaria Tejera Edition: La Contre Allée

Lire n’est pas fuir

Nous connaissons assez peu Nivaria Tejera en France, et malgré un certain intérêt partagé pour la littérature des Caraïbes et plus particulièrement cubaine, son nom reste sans doute encore méconnu des amateurs. Aujourd’hui âgée de 85 ans (elle est née sur l’ile de Cuba en 1929-30 et vit à Paris depuis 1954), c’est en 1958 qu’une de ses œuvres est traduite pour la première fois en Français, par les soins de Maurice Nadeau : Le ravin (El Barranco, traduit par Claude Couffon (réédité depuis par Actes Sud puis par La Contre Allée). Une traduction qui précédera la publication en espagnol (comme pour les romans qui suivront) et qui attirera l’attention sur une œuvre et un travail littéraire d’une profonde originalité, singulier et atypique, réfractaire à toute tentative de classification. Une œuvre qui nous introduit à une lecture, à un rapport à l’œuvre écrite – voire au langage – inhabituels.

Il faut dire que cette écriture exigeante qui oscille entre le romanesque et la poésie, voire entre l’essai littéraire et la réflexion philosophique, émaillé de références à la littérature, à la peinture et à la musique, peut être considérée comme une littérature que l’on peut qualifier de « difficile », surtout si l’on cherche à l’analyser et la commenter, voire à l’expliquer, sans se laisser porter et emporter par ses voix (et voies) singulières.

Le Moine de Képhas, Angelo Boschetti, Stepano Brasi

Ecrit par Mélanie Talcott , le Samedi, 09 Janvier 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Italie, Toucan

Le Moine de Képhas, traduit de l’italien par Olivero Garlasseri 283 pages . Ecrivain(s): Angelo Boschetti, Stepano Brasi Edition: Toucan

 

Loin de Michel Houellebecq, Le moine de Képhas nous plonge dans une fiction vs prémonitoire. Assassinat d’un imam de la mosquée de Villeurbanne, rebellions musclées dans les banlieues, chars antiémeutes, arrestations, comparutions immédiates, explosions, attentats, victimes innombrables, gouvernement ahuri et débordé, président mutique au charisme mou, couvre-feu, plan Vigipirate écarlate. L’état de guerre est déclaré. Les politiques et hauts fonctionnaires de l’Etat – vieille école de l’ombre « le seul endroit où l’on peut encore penser avant d’agir contre la génération Sciences-Po, ENA, où l’on forme depuis quatre décennies des bans entiers de squales débridés, sans maître, sans foi, sans loi, qui iront diriger le pays comme on gère une banque, sous les feux de la rampe ; pas de réflexion, juste de l’instinct – pensent fissa et en coulisses d’abord à leur carrière qui file en quenouille, la menace terroriste créant l’opportunisme de leur montée ou de leur rétrocession en grade, avec pertes et profits de leurs passe-droits matériels et sexuels. Les décisions politiques se prennent en fonction de la courbe des sondages. L’équipe gouvernementale fictionnelle en caricature d’autres, récentes ou actuelles.