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Et aussi les arbres, Isabelle Bonat-Luciani

Ecrit par Patrick Devaux , le Vendredi, 24 Août 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Roman, Carnets du dessert de lune

Et aussi les arbres, mai 2018, 76 pages, 13 € . Ecrivain(s): Isabelle Bonat-Luciani Edition: Carnets du dessert de lune

 

Tous les sens de l’auteur sont en éveil à écouter, entendre, distinguer, ressentir à fleur de souvenir jusqu’au trouble qui mêle le haut et le bas, la cime et la racine de l’être, la sève de vivre : « Le ciel a débarrassé le plancher. Il est dans ma tête. Au fin fond. Toujours ça revient ». Les mots sont « tagués » les uns aux autres « pour tenir loin des désordres. Pour tenir loin des solitudes ».

Souvenir d’un premier amour ? Certes. Mais sans « Il était une fois » parce que l’évènement tourne en boucle.

Avec un ton faussement anodin, des choses importantes sont dites, toujours avec cette façon un peu explicative, voire professorale : « Parfois elle lui disait que pour aimer il valait mieux ne jamais rien savoir ».

Avec retours sur l’adolescence, l’image des parents, de la mère plus particulièrement, du corps qui se modifie, la vie en évolution parle à travers le temps qui se souvient de façon obsessionnelle : « Les gens marchent mais c’est dans ton image qui fissure le sol » ou encore : « Lorsque j’approche de ton absence, il y a ce toi bien trop immobile pour regarder ».

Comment écrire un livre qui fait du bien ?, Denis Montebello

Ecrit par Sylvie Zobda , le Jeudi, 23 Août 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques

Comment écrire un livre qui fait du bien ?, Le temps qu’il fait, mars 2018, 117 pages, 15,00 € . Ecrivain(s): Denis Montebello

 

« C’est le deuxième copain qui se pend à un arbre que j’ai élagué » est une des phrases qu’aime collecter Denis Montebello. Troublante et mystérieuse, elle suscite l’envie d’écrire. « Ils sont comme ça, les écrivains. Il ne faut rien dire devant eux, rien laisser traîner : ils s’en emparent aussitôt ». Cette bribe de conversation, entendue sur un quai de gare est à l’opposé d’une vision positive et optimiste de la vie. Pas ce genre qui vous illumine la journée, vous sauve de la crise de nerfs, vous redonne le sourire. Pourtant Denis Montebello l’utilise. Son narrateur la met en titre de son livre qui sera son feel-good book. Son essence résidera dans une vision d’une vie en rose gommée de tous les aspects déplaisants. Le titre sera tout un roman.

C’est avec un humour décapant qu’il nous livre ses réflexions sur l’écriture et l’écrivain en évoquant l’histoire d’un auteur en quête de reconnaissance et de succès.

Capitaine, Adrien Bosc

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 22 Août 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Stock, La rentrée littéraire

Capitaine, août 2018, 400 pages, 22 € . Ecrivain(s): Adrien Bosc Edition: Stock

 

« Combien étaient-ils sur ce rafiot ? Trois cents, quatre cents peut-être, autant d’anonymes, une maille indémêlable de récits distincts, contradictoires, la concentration d’une société perdue, en réduction, mouvante… la catastrophe et l’inhérent combat des probabilités regroupés sur le pont d’un bateau ».

Alors que l’on se bat, que l’on fuit, que l’on souffre, que l’on se cache, alors que le temps paraît figé, que l’horreur se conjugue au présent, que l’on dénonce et que l’on résiste, des hommes, des femmes et quelques enfants attendent de pouvoir quitter Marseille pour embarquer sur le Capitaine-Paul-Lemerle. Au cœur de cette concentration d’une société perdue, des Espagnols qui ont perdu la guerre, des Juifs chassés d’Europe, des relégués, des réprouvés par les serviteurs zélés de Vichy, des artistes, des écrivains, et des révolutionnaires en exil permanent. Ils sont là sur le pont du Capitaine, certains s’y font prendre en photo, une première et peut-être une dernière fois : Victor Serge, Anna Seghers, Germaine Krull, André, Jacqueline et Aube Breton, Wifredo Lam, Alfred Kantorowicz, Claude Lévi-Strauss, Jacques Rémy.

Pense aux pierres sous tes pas, Antoine Wauters

Ecrit par Carole Darricarrère , le Mercredi, 22 Août 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, La rentrée littéraire, Verdier

Pense aux pierres sous tes pas, août 2018, 192 pages, 15 € . Ecrivain(s): Antoine Wauters Edition: Verdier

Honneur 2018 de la Cause Littéraire

Il était une fois dans un « pays de chiens » deux esprits jumeaux joyeux d’âme et de corps : noumène des simples, aumône du sang de la matrice, coup double dans un museau de terre, alliance d’un couteau exquis et de « hanches en montagne de massepain » : « ce suspens remplace l’éternité » dirait l’auteur en citant un autre.

Au pays où l’on n’arrive jamais l’espace fait loi. C’est dans une langue luminescente d’âpreté réconciliant l’horizon et la verticalité que récit et poésie vont y dérouler le fil incandescent d’un conte sans concession dans les anneaux duquel Saint-Ex aurait reconnu sa fleur et Faulkner son Absalon – « Parle-moi du Sud. Comment est-ce là-bas ? Qu’est-ce qu’on y fait ? Pourquoi y demeure-t-on ? Pourquoi y vit-on ? », W.F., Absalon ! Absalon !).

La Somme de nos folies, Shih-Li Kow

Ecrit par Fanny Guyomard , le Mercredi, 22 Août 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Asie, Roman, La rentrée littéraire, Zulma

La Somme de nos folies, août 2018, trad. anglais (Malaisie) Frédéric Grellier, 384 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Shih-Li Kow Edition: Zulma

 

« Il se passe des choses ici, il s’en passe ailleurs. C’est toujours pareil ». Mais il y a différentes manières de les raconter. Un art dans lequel Shih-Li Kow excelle.

L’auteur nous entraîne dans la Malaisie actuelle, entre la frémissante capitale Kuala Lumpur et un paisible village. Paisible ? Seulement en apparence. Car lorsqu’on y regarde de plus près, la vie campagnarde, loin d’être monotone, est rythmée par le caractère mordant des habitants. Aussi ravageurs que la pluie torrentielle qui ouvre le récit.

La grand-mère au fort caractère, la cinglée éleveuse de sangsues, la sentimentale et faussement dévote directrice d’un orphelinat, l’adorable transsexuel engagé… Cette panoplie de personnages fait monde commun, mais chacun défend sa cause, sa part d’irrationnel, sa petite folie personnelle.