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Jusqu’à Faulkner, Pierre Bergounioux (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 07 Novembre 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Récits, Gallimard, En Vitrine, Cette semaine

Jusqu’à Faulkner, Pierre Bergounioux, Gallimard l'un et l'autre, 160 p. 15 € . Ecrivain(s): Pierre Bergounioux Edition: Gallimard

 

Un essai sur la littérature ? Peut-être. Sûrement. Mais aussi et surtout le journal personnel d’un homme d’écriture. Son cheminement à travers les œuvres et les auteurs de sa vie. La réflexion de Pierre Bergounioux est éminemment intime, mais elle touche aussi à l’universel, par la rigueur de la pensée, l’objectivation des arguments, les références incontestables. Cet ouvrage est une démonstration, s’il en fallait, que la littérature n’est pas seulement une affaire de goût, mais surtout de qualité objective, d’inspiration, de talent, d’écriture, en un mot, de style. Jacques Lacan disait « tout ce qui n’est pas matérialité est escroquerie » ; Bergounioux le dit à sa manière pour la littérature.

Depuis les débuts de l’écriture les hommes veulent raconter leur existence, en rapportant des faits puisés dans la réalité ou dans leur imagination. Mais en racontant, ils créent, à leur insu, une autre réalité, détachée de la première. La médiation écrite crée un univers en soi dont l’étendue échappe à la chose racontée. Un peu comme un signifiant détaché du signifié. Bergounioux rappelle ainsi avec force que – longtemps dans la littérature occidentale – seule l’écriture a compté vraiment.

Mademoiselle, Les Rêves interdits ou L’Autre versant du rêve, Jean Genet (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mercredi, 06 Novembre 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard

Mademoiselle, Les Rêves interdits ou L’Autre versant du rêve, Jean Genet, Gallimard Coll. L’Imaginaire, avril 2024, 161 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Jean Genet Edition: Gallimard

 

 

Les titres successifs envisagés par Genet pour le scénario ayant abouti au film de Tony Richardson, diffusé en 1966 et assez mal accueilli, nous mettent sur la voie : le projet de  l’auteur n’est pas de nous raconter une histoire ancrée dans le réel et y renvoyant (encore qu’elle soit prenante et par sa langue épurée et par son cadre et par son déroulement implacable), mais de concrétiser grâce aux mots puis plus tard grâce à l’image, dans une forme admirablement maîtrisée, les pulsions d’un monde intérieur, ce qui nous révèle ce qu’aurait pu être sa relation avortée au cinéma (un « cinéma de la cruauté » pour détourner la formule d’Artaud ?), guère différente de sa relation au roman et au théâtre.

Mélancolie américaine, Joyce Carol Oates (par Nicolas Grenier)

Ecrit par Nicolas Grenier , le Mercredi, 06 Novembre 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Poésie, Philippe Rey

Mélancolie américaine, Joyce Carol Oates, Éditions Philippe Rey, 2023, poèmes trad. anglais (États-Unis), Claude Seban, 129 pages, 17 € . Ecrivain(s): Joyce Carol Oates Edition: Philippe Rey

 

 

Amérique psychiatrique

Depuis la côte Est, à Princeton, dans le New Jersey, Joyce Carol Oates est un témoin de toutes les Amériques qui se placent sous le signe de Saturne. Dans son recueil de poésie de circonstance, Mélancolie américaine, qui alterne des poèmes, longs et courts, la petite histoire s’entremêle avec l’histoire des États-Unis. Tout l’Occident, des « sanitaires bouchés » de l’Hôtel Königshof, à Cologne, jusqu’à l’empire du Milieu, ressemble à une impasse métaphysique, tel que l’annoncent les premiers mots du poème Le tunnel, qui flottent au-dessus de la baie de San Francisco :

Malart, Aro Sáinz de la Maza (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 05 Novembre 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Polars, Actes Noirs (Actes Sud)

Malart, Aro Sáinz de la Maza, Éditions Actes noirs, avril 2024, trad. espagnol, Serge Mestre, 432 pages, 23,50 € Edition: Actes Noirs (Actes Sud)

 

Au large de Barcelone quelque chose dérive avec accrochée à sa structure un corps. La personne est vivante, le narrateur nous fait percevoir ses sensations. Goût d’eau salée, délires. Des images défilent : un tablier rouge et bleu, une patineuse… L’homme puisqu’il s’agit d’un homme, très affaibli, attaché et agrippé à une petite embarcation a le corps qui baigne dans l’eau de mer. Il boit la tasse à chaque paquet d’eau salée qui vient le recouvrir et semble drogué. Il se souvient néanmoins qu’il fait partie des forces de police. Il ne voit pas la côte, il est désespéré et toujours reviennent ces couleurs bleu et rouge et cette patineuse. C’est l’inspecteur Malart de la police de Barcelone !

Milo Malart, on en parle beaucoup au centre de police. La sous-inspectrice Mercader et ses collègues le recherchent désespérément. Ils ont 60 heures pour le retrouver. C’est un géant de deux mètres au caractère bien trempé qui n’en fait souvent qu’à sa tête. Il était parti à la poursuite de ceux qu’il pensait être les auteurs de nombreux assassinats dans la région de Barcelone, c’est sa version en tout cas.

La Lucarne, Jean Meckert (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Lundi, 04 Novembre 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Joelle Losfeld

La Lucarne, Jean Meckert, éditions Joëlle Losfeld, avril 2024, 246 pages, 16,70 € Edition: Joelle Losfeld

 

L’homme défait de Jean Meckert

Jean Meckert est cet auteur aux multiples vies dont cette dernière que les éditions Joëlle Losfeld ressuscitent livre après livre. Le neuvième à paraître sur une série de dix !

Connu sous le pseudo de Jean Amila, Meckert est mort en 1995. La Lucarne est un livre sombre, moins que Les Coups qui nous avaient tous saisis à leur re-sortie en 1993 grâce à Jean-Jacques Pauvert.

La Lucarne est écrite juste après-guerre et narre le juste avant. C’est, si l’on peut le dire ainsi, un livre plus idéalogique qu’idéologique. Nonobstant le climax de guerres sourdes qui sourdent, de nations qui se toisent, de ligues d’extrêmes droites triomphantes et de nazisme endémique, Édouard Gallois, le personnage central, enchante la paix, l’universel, bref le grandiose, l’iconoclaste. Le dérogeant dérange.