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Histoire

Les Justes face au génocide arménien, Hilda Kalfayan-Panossian (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 17 Juin 2025. , dans Histoire, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

Les Justes face au génocide arménien, Hilda Kalfayan-Panossian, Editions Kirk Publishing 2024, 419 pages, 30 €

 

Cet ouvrage est un hommage à tous ceux qui ont secouru, aidé, sauvé de la mort des Arméniens que le gouvernement Jeune-Turc vouait à la mort en 1915. Elles et ils furent nombreux à vouer leur énergie dans le cadre de missions humanitaires, mettant parfois leur vie en danger. Ce furent, nous le verrons, des Européens, mais aussi des Américains et des Turcs.

Hilda Kazlakayan-Panossian consacre le premier chapitre de son livre à un bref historique de l’Arménie, qui resitue les conditions dans lesquelles le génocide de 1915 fut commis, rappelant les atrocités dont on peine à croire qu’elles aient pu être le fait d’êtres humains. Les témoignages de plusieurs des Justes décriront eux aussi les abominations subies par les hommes, mais aussi par les femmes (violées bien entendu, mais aussi brûlées vives) et par les enfants quand ils ne furent pas enlevés pour servir d’esclaves après avoir été « turquifiés », ou noyés deux par deux après avoir été ligotés, un 24 mai 1916 au bord de l’Euphrate ou encore brûlés vifs…

La Seconde guerre d’indépendance d’Israël, 7 octobre 2023, Effroi et résilience, Richard Darmon (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 13 Mai 2025. , dans Histoire, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

La Seconde guerre d’indépendance d’Israël, 7 octobre 2023, Richard Darmon, Les Provinciales, 2024, 190 p. 18 €

Dans la Bible hébraïque (l’ensemble que les Chrétiens appellent l’Ancien Testament), plusieurs épisodes nullement mineurs font l’objet d’une duplication : la création du monde eut lieu deux fois (d’abord en six jours, ensuite après le déluge) ; les Tables de la Loi furent remises à Moïse deux fois ; la royauté d’Israël fut établie à deux reprises (avec Saül, puis avec David). Conscients de ce phénomène, des Israéliens ont considéré que la guerre commencée après la tragédie du 7 octobre 2023 pouvait être assimilée à une nouvelle guerre d’indépendance, la seconde, après celle de 1948. Elle est en tout cas le plus long conflit que l’État d’Israël ait jamais soutenu.

Ce n’est évidemment pas la même chose que d’être « sur le terrain », au milieu des cris des jeunes filles violées, des odeurs de poudre, de sang, de chair brûlée et de la terreur pure. Mais ce fut une expérience inoubliable et amère : se trouver, au matin du samedi 7 octobre 2023, à son bureau, en train de dérouler des notifications d’un réseau social (Twitter) et de voir arriver subitement des images brutes, qu’aucune modération n’a encore filtrées ou censurées, filmées quelques instants auparavant, mises en ligne aussitôt et répercutées dans le monde entier.

Et nous danserons encore, Sébastien Spitzer (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 10 Février 2025. , dans Histoire, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits

Et nous danserons encore, Sébastien Spitzer, Albin-Michel, septembre 2024, 250 pages, 19,90 €

Il existe une « littérature des camps » suffisamment abondante et de qualité pour remplir un volume de la Pléiade, et on aurait pu en confectionner plusieurs. Il existe une littérature du 11-Septembre (rarement une date se sera gravée aussi vite dans la mémoire collective), avec des ouvrages tels que 11 Septembre, Une histoire orale (Garrett M. Graff), et Le Jour où les anges ont pleuré (Mitchell Zuckoff), malgré la difficulté à se représenter un événement pareil. Il y aura, on peut en être sûr, une littérature du 7 octobre 2023 (même si la télévision a pris une longueur d’avance), faite de témoignages et de fictions. Et nous danserons encore appartient à la première catégorie. Sébastien Spitzer s’est rendu en Israël pour rencontrer des survivants du massacre, des familles d’otages et, dans de trop rares cas, des otages ayant été libérés par le Hamas après son pogrom (« un mot que la langue russe a offert au reste du monde. Un don, si l’on veut, à l’encyclopédie universelle de l’infamie », ainsi que l’écrit si bien Camille de Toledano) perpétré avec la plus froide détermination. De retour en France, Spitzer assista aux lendemains du massacre, avec la récupération cynique de La France Insoumise, la vésanie des étudiants de Sciences-Po, l’émergence de Rima Hassan, tout un monde peu nombreux, mais très présent dans les médias et embarqué dans une sarabande écœurante.

Les Sacrifiés, Au cœur de la tragédie arménienne, Élise Boghossian (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 14 Janvier 2025. , dans Histoire, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Plon

Les Sacrifiés, Au cœur de la tragédie arménienne, Élise Boghossian, éditions Plon, octobre 2024, 202 pages, 21 € Edition: Plon

Élise Boghossian est la petite-fille d’un immigré arménien, Zadig, victime du génocide de 1915. Mais l’auteure est également à la tête d’une ONG, EliseCare, qui vient en aide aux victimes de guerres. Les attaques turco-azéries de 2020 dans le Haut-Karabagh l’ont bouleversée, et les questions sur le devenir de son pays d’origine l’ont immanquablement conduite à reprendre le fil de son histoire, de celle de son père et de son grand-père. Ce sont là les deux axes, les deux entrées de son texte : la guerre en Artsakh (Haut Karabagh) menée par l’Azerbaïdjan que la Turquie seconde, et la cristallisation de sa mémoire par l’écriture pour honorer la vie de ses ascendants.

Élise Boghossian a bien évidemment été alertée par les attaques menées sur le Haut-Karabagh par l’Azerbaïdjan, d’autant plus que « l’adversaire recrute à tour de bras des mercenaires en Libye, en Syrie, au Pakistan ou en Afghanistan. Et la Turquie s’affiche fièrement aux commandes de ce carnage ». Ne clame-t-on pas d’ailleurs, au plus haut niveau de l’État turc, qu’il faut achever « les restes de l’épée », expression privilégiée pour désigner aujourd’hui encore les rescapés du génocide et leurs descendants.

Le son de la révolte, Une histoire politique de la musique noire américaine, Christophe Ylla-Somers (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 09 Décembre 2024. , dans Histoire, Les Livres, Recensions, Essais, La Une Livres, Le Mot et le Reste

Le son de la révolte, Une histoire politique de la musique noire américaine, Christophe Ylla-Somers, Le Mot Et Le Reste, octobre 2024, 457 pages, 30 € Edition: Le Mot et le Reste

Nous avons là un ouvrage d’importance dont le but est d’expliciter le lien entre l’histoire de la musique noire américaine et la politique. Important parce que l’auteur a fait un vrai travail d’historien, n’avançant ses arguments que lorsqu’ils sont étayés, ne décrivant les faits que lorsqu’ils sont vérifiés, le tout abondamment illustré de citations dont on ne se lasse pas.

Et puisqu’il faut commencer par le début, on remonte à la période de l’esclavage, au 17ème siècle, quand les premiers esclaves noirs arrivent en Amérique. Ils sont déshumanisés, humiliés, travaillant jusqu’à l’épuisement et la mort, les familles sont séparées, les femmes très souvent abusées, n’ayant aucun recours pour rendre leur vie acceptable. Ces conditions d’exploitation inhumaines ont permis à l’économie américaine de prospérer, et la Révolution américaine ne changea rien : « En définissant les principes de la démocratie, on ne s’était pas contenté d’ignorer le problème de l’esclavage : on admettait qu’il fallait le développer pour renforcer les intérêts de la nation », condamnait Martin Luther King. L’expansion de la culture du coton au 19ème siècle n’aura fait que renforcer les conditions inhumaines de l’esclavage, surtout dans le sud.