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Biographie

Limonov, Emmanuel Carrère

Ecrit par Grégoire Meschia , le Mercredi, 25 Septembre 2013. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

. Ecrivain(s): Emmanuel Carrère Edition: Folio (Gallimard)

Prix Renaudot en 2011, le livre est sorti en poche en 2013. Jusqu’ici connu pour ses romans (où il se met souvent en scène) parmi lesquels Un roman russe et D’autres vies que la mienne, Emmanuel Carrère se fait le biographe d’un personnage extraordinaire : Edouard Limonov. Imbriquant la fiction dans la réalité (il a l’habitude de partir d’expériences vécues pour nourrir ses intrigues romanesques), il fait de Limonov un être de fiction, à la vie si romanesque qu’on imagine mal qu’il l’ait vraiment vécue, qu’il ait pu faire tant de choses, qu’il ait pu changer autant de fois de visages. Limonov a traversé des continents (chaque partie suit chronologiquement l’itinéraire du protagoniste) et a cumulé les métiers. Il a repoussé toujours plus loin ses limites, ne reculant devant rien.

On ne pouvait pas rêver d’un héros plus romanesque. Une destinée à l’échelle de son pays qu’il a aimé, quitté et défendu. Une destinée qui dépasse celui de ses compatriotes, celle d’un homme qui ne pouvait pas se réduire à rester dans le bled paumé d’Ukraine où il est né. Il y a quelque chose en lui d’insondable. Un certain mystère plane autour de sa personne : on ne connaît jamais les raisons de ses choix, on a du mal à le situer autant sur le plan moral que politique. Il est à la fois capable de gestes de bravoure et d’être un véritable salaud – son implication lors des guerres balkaniques assombrit nettement le tableau.

Journal. Vol. II 1964-1980, Susan Sontag

Ecrit par Frédéric Aribit , le Mardi, 27 Août 2013. , dans Biographie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, USA, Christian Bourgois

Journal. Volume II 1964-1980, préface de David Rieff, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Anne Rabinovitch, mai 2013, 574 pages, 24 € . Ecrivain(s): Susan Sontag Edition: Christian Bourgois

 

« Je veux que la rencontre avec une personne ou une œuvre d’art change tout », disait-elle.

Sous-titré Renaître, le volume I de l’immense Journal de Susan Sontag, publié en 2010 par Christian Bourgois, couvrait les années 1947-1963. Désormais disponible chez le même éditeur, le deuxième volet du triptyque attendu, La Conscience attelée à la chair (1964-1980), entre de plain-pied dans la période de maturité intellectuelle, qui voit écrire celle qui se définit elle-même comme une « cagienne-franco-juive » parmi ses essais majeurs (Sur la photographie, 1977).

On y suit donc, sur un mode intime, le filigrane d’une œuvre et d’une pensée inquiète et en questionnement permanent à la fois sur les déchirements du monde comme sur la difficulté d’être, d’aimer, d’écrire, de vivre, c’est-à-dire de penser. Les notes sont très hétérogènes, parfois d’une brièveté laconique, parfois se développant au contraire sur des pages et des pages, parfois quotidiennes, parfois espacées de plusieurs semaines, plusieurs mois. Mais c’est, à travers cet « esprit d’escalier chronique » qu’elle avoue au hasard d’une brève, toujours une même exigence d’honnêteté qui s’y lit, un même désir de lucidité auquel l’exercice du journal offre le recours d’une écriture confidente.

Fille de la campagne, Edna O'Brien

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 25 Juin 2013. , dans Biographie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Iles britanniques, Récits, Sabine Wespieser

Fille de la campagne - mémoires (Country Girl) Trad. Anglais (Irlande) Pierre-Emmanuel Dauzat mars 2013. 474 p. 25 € . Ecrivain(s): Edna O'Brien Edition: Sabine Wespieser

 

Le titre de ce livre révèle déjà l’une de ses dimensions fondatrices : l’ironie. C’est le sceau de ce merveilleux livre de mémoires. De fait le titre du livre (Fille de la campagne/Country Girl) est en lui-même doublement ironique : - d’une part parce qu’il reprend presque à la lettre le titre de la grande œuvre initiale d’Edna O’Brien (Les Filles de la Campagne/ Country Girls) alors que les deux livres sont aussi éloignés que possible et par leur forme et par leur style. - D’autre part parce que dans ce titre (déjà) Edna O’Brien s’amuse de nous ! Si on attend l’histoire d’une pastorale irlandaise, d’une femme un peu bouseuse, provinciale, rustique, pataude eh bien sachez que ce livre est en fait une véritable biographie d’une mondaine des lettres, avec une dimension « literary people » éberluante.

Rendez-vous compte : on va croiser, sur les pas de cette « Wild Goose »* qu’est Mrs O’Brien, rien moins que le gratin de la littérature et du cinéma du milieu du XXème siècle. Il serait très difficile de faire ici la liste des invités (invités dans tous les sens du terme, aussi bien de ce livre que dans la vie car tous dînaient chez Edna O’Brien dans son séjour de Putney ou l’invitaient à dîner avec eux).

Vice, Hervé Guibert

Ecrit par Arnaud Genon , le Vendredi, 10 Mai 2013. , dans Biographie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Récits, Gallimard

. Ecrivain(s): Hervé Guibert Edition: Gallimard

 

 

Vice occupe une place particulière dans l’économie générale de l’œuvre d’Hervé Guibert. Publié pour la première fois en 1991 aux Editions Jacques Bertoin, il a été écrit à la fin des années 1970, peu de temps après La Mort propagande, son premier livre. Il est aussi contemporain de Suzanne et Louise, le roman-photo que l’écrivain consacra à ses deux grand-tantes.

En ce sens, comme le remarque justement Thomas Simonet dans sa note préliminaire, il témoigne des « préoccupations d’écrivain et de photographe de l’auteur à cette période ».

L’ouvrage est constitué de trois parties.

Cortés et son double, Christian Duverger

Ecrit par Vincent Robin , le Vendredi, 26 Avril 2013. , dans Biographie, Les Livres, Livres décortiqués, Essais, La Une Livres, Seuil

Cortés et son double, janvier 2013, 320 pages, 21 € . Ecrivain(s): Christian Duverger Edition: Seuil

 

 

« Et moi, je m’inscris à la suite de ce petit nombre de soldats dont je fais ici mémoire » (1).

L’Espagnol s’exprimant ainsi se proclamait le rapporteur-témoin de trois années de conquête du Mexique poursuivies aux côtés de Cortés vers 1520. Rédigé environ quarante années après ces événements, sous le titre Histoire véridique de la conquête de la Nouvelle-Espagne, cet instructif et emblématique récit des épisodes coloniaux en Amérique centrale s’agrégea sans tarder au nom de celui qui l’avait paraphé : Bernal Diaz del Castillo. D’autres, qui étudièrent ultérieurement (au XIXe siècle) ces relations de guerre avaient confirmé ladite paternité d’écriture. Dans son Cortès et son double, l’historien, méso-américaniste de renom, Christian Duverger, se penche pourtant aujourd’hui avec une suspicion sévère et minutieuse sur la provenance réelle de ces écrits, assurément toujours considérés comme joyaux de la littérature espagnole, mais dont l’auteur n’aurait pas été, selon lui, celui que cette signature désigna trompeusement.