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Biographie

Beigbeder l’incorrigible, Arnaud Le Guern

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 18 Janvier 2017. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Beigbeder l’incorrigible, éd. Prisma, novembre 2016, 297 pages, 19,95 € . Ecrivain(s): Arnaud Le Guern

 

« L’enfance : figure biographique ennuyeuse. Beigbeder heureusement facilite notre tâche. Il est dans chacun de ses textes. A peine masqué. Il suffit de lire. Reflet déformé, juste ce qu’il faut. Pour tout savoir sur l’enfance de Frédéric Beigbeder, ouvrir Un roman français. Prix Renaudot 2009. Son meilleur livre. Mise en bouche parfaite d’une vie de feu follet ».

Voici le livre plus inutile publié ces derniers temps, pourrions-nous écrire en souriant, un livre inutile sur un écrivain qui ne l’est pas moins, pensent les observateurs vigilants et autres critiques littéraires aguerris – les gardiens de la Librairie. Inutile écrivain mondain, corrupteur de jeunes lectrices et de vieux barbons de prix littéraires. Animateur bavard qui sévit sur des chaînes câblées, complice publicitaire de la disparition de la littérature française, amuseur public qui ne fait rire que ses admiratrices corrompues et ses éditeurs lorsqu’ils gagnent de l’argent. Arnaud Le Guern pourrait être son jeune frère caché, amateur de plages et d’espadrilles, admirateur de Brigitte Bardot, de Maurice Ronet et de Paul Gégauff, en un mot, un amuseur, qui prend plaisir à écrire des livres tout aussi éphémères qu’un dessin tracé à la main sur le sable d’une plage basque à marée basse, en attendant que les vagues ne le recouvrent.

Born To Run, Bruce Springsteen

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 09 Novembre 2016. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Albin Michel

Born To Run, septembre 2016, trad. (excellemment) de l’américain par Nicolas Richard, 640 pages, 24 € . Ecrivain(s): Bruce Springsteen Edition: Albin Michel

 

Avant d’évoquer les « mémoires », terme choisi en lieu et place de « autobiographie » par l’auteur lui-même, de Bruce Springsteen, un petit mot sur la compilation Chapter And Verse publiée de façon simultanée, présentée comme la bande-son du livre. Autant le dire franchement : elle est à éviter. Certes elle contient une douzaine de chansons indispensables du Boss, de Growin’ Up à The Rising en passant par Born To Run et The River, mais elle contient aussi cinq titres inédits, enregistrés avant le premier album avec The E Street Band, entre 1966 et 1972, et ceux-ci n’ajoutent absolument rien à la légende. Au contraire ils sont embarrassants tellement ils sont maladroits et montrent un Springsteen s’essayant à copier ses maîtres de pataude façon. Certes, la chanson Henry Boy annonce les grandes et épiques histoires à venir, mais qu’elle est plate, qu’elle montre un Springsteen cherchant ses marques… C’est le grand tort de l’industrie musicale, depuis l’avènement du cd au moins, que de vouloir à tout prix faire croire au pigeon d’amateur qu’il est bon de tout entendre, que le moindre rogaton de studio doit être publié et écouté avec dévotion.

Journal du ghetto de Lodz, 1939-1943, Dawid Sierakowiak

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 07 Novembre 2016. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Histoire, Les éditions du Rocher

Journal du ghetto de Lodz, 1939-1943, septembre 2016, trad. Mona de Pracontal, photographies exemplaires Mendel Grossman, Henryk Ross, 348 pages, 20,90 € . Ecrivain(s): Dawid Sierakowiak Edition: Les éditions du Rocher

 

Du livre écrit en polonais par un jeune Juif, de ses quinze à dix-neuf ans, nous pouvons lire une traduction de traduction. Du Journal initial subsistent cinq cahiers, aux titres révélateurs : Lodz est occupée, Une faim continuelle, Nous vivons dans une peur constante, La bête assoiffée de sang, Il n’y a pas d’issue.

Du 28 juin 1939 au 15 avril 1943, le jeune Dawid a tenu son journal, relatant de manière précise les événements du ghetto et ceux qui parvenaient de l’extérieur.

Dans une langue claire, minutieuse, très descriptive, Dawid nous conte la vie passée au ghetto entre quête continuelle de nourriture et de travail, sa famille logée au troisième étage dans des conditions de promiscuité et de saleté extrêmes : le père, voleur invétéré même de la chiche nourriture de ses proches, la mère combative et adorée, la sœur Nadzia.

L’Impossible Exil. Stefan Zweig et la Fin du Monde, George Prochnik

Ecrit par Didier Smal , le Vendredi, 28 Octobre 2016. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Grasset

L’Impossible Exil. Stefan Zweig et la Fin du Monde, septembre 2016, trad. anglais (USA) Cécile Dutheil de la Rochère, 448 pages, 23 € . Ecrivain(s): George Prochnik Edition: Grasset

Sous-titré Stefan Zweig et la Fin du Monde, L’Impossible Exil tient à la fois de l’essai, d’une mise en scène de l’auteur et de la biographie : George Prochnik, professeur de littérature anglaise et américaine à la Hebrew University of Jerusalem, entremêle au fil des pages des considérations sur l’exil, son expérience propre (ainsi que celle de sa famille, son père ayant fui le régime nazi à son arrivée en Autriche) et narration de la vie de Stefan Zweig (1881-1942). En quelque quatre cents pages, Prochnik tente de pénétrer l’esprit de l’auteur du Monde d’Hier, cette élégie à un monde culturellement riche et cosmopolite que Zweig vit disparaître à l’avènement du régime nazi, durant ses années d’exil, à partir de 1934. Prochnik suit les traces de l’exilé, entre Vienne, les Etats-Unis, le Brésil et le Comté de Westchester, visitant des maisons, rencontrant des témoins ; il le suit aussi au travers de sa correspondance avec ses amis européens et américains ; il le suit de même en citant ou en paraphrasant abondamment Le Monde d’Hier, l’œuvre testamentaire de Zweig, définitivement un des plus beaux livres du vingtième siècle ; il le suit enfin tel un détective privé, allant jusqu’à tâcher de retirer du sens de son suicide, de la mise en scène de celui-ci, photos à l’appui.

Jean-Jacques Schuhl, Du dandysme en littérature, Guillaume Basquin (2nde critique)

Ecrit par Philippe Chauché , le Samedi, 22 Octobre 2016. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, La rentrée littéraire, Editions Honoré Champion

Jean-Jacques Schuhl, Du dandysme en littérature, septembre 2016, préface Philippe Forest, 200 pages, 30 € . Ecrivain(s): Guillaume Basquin Edition: Editions Honoré Champion

« C’est un styliste. Haute couture ! Vous qui aimez le prêt-à-porter, laissez tomber. Schuhl accélère jouant sans cesse avec les réminiscences du lecteur. A quelle vitesse lisez-vous ? A quelle vitesse écrivez-vous en lisant ? A quelle vitesse comprenez-vous ce que vous venez de lire ? »

Partons d’un principe, on écrit une biographie pour poursuivre son propre travail d’écrivain, son aventure romanesque, pour écrire un nouveau roman sous l’éclairage d’un écrivain complice, ou pour le moins rêvé ainsi. Les exemples ne manquent pas : La vie de Racine de François Mauriac, Francis Ponge de Philippe Sollers, Lautréamont de Marcelin Pleynet, Cours, Hölderlin ! de Jacques Teboul, Dante écrivain de Jacqueline Risset et quelques autres. Reste que pour savoir écrire une biographie, il convient de savoir lire et de savoir écrire (1), de se glisser avec légèreté dans une œuvre – sans oublier de s’y confronter, parfois même de croiser de fer –, savoir lire, pour bien savoir écrire, l’inverse est aussi nécessaire. Guillaume Basquin qui est un styliste s’est déjà attaché à l’œuvre de Jacques Henric, un autre styliste, il y a des parentés qui naissent dans les livres, qui naissent des livres, des communautés de goûts et de manières, des amitiés sélectives.