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Biographie

Marcel Proust Une biographie, Michel Erman

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 16 Novembre 2018. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La Table Ronde - La Petite Vermillon

Marcel Proust Une biographie, mars 2018, 384 pages, 8,90 € . Ecrivain(s): Michel Erman Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

Honneur 2018 de la Cause Littéraire

Après Bottins proustiensLes 100 mots de Proust, voici de nouveau attelé à la tâche proustienne le spécialiste Michel Erman, auteur, depuis 1988, de pas moins de dix ouvrages tout entiers consacrés au grand Marcel. Professeur à l’université de Bourgogne, Erman donne ici, après d’autres, un modèle de biographie. Claire, précise, abondante en anecdotes qui donnent sens, riche en informations sur la genèse, la jeunesse d’un génie et sur les avatars d’une carrière ainsi que sur les métamorphoses d’un mondain en critique d’art et romancier unique.

Le sérieux philologique (suffit-il de se reporter aux notes et références bibliographiques fécondes de la fin du volume : pp.319-374), l’écriture fluide (l’essai se lit comme un roman, bien structuré en seize parties dessinant l’évolution du petit Marcel d’Auteuil au grabataire loué enfin), font oublier qu’il y eut avant un Ghislain de Diesbach (pour un ouvrage parsemé d’erreurs orthographiques !), un Proust par lui-même de Claude Mauriac, un Proust et les signes de Deleuze… c’est dire que cette nouvelle biographie fera date.

Chateaubriand, Ghislain de Diesbach (par Vincent Robin)

Ecrit par Vincent Robin , le Mercredi, 31 Octobre 2018. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Perrin

Chateaubriand, juin 2018, 670 pages, 27 € . Ecrivain(s): Ghislain de Diesbach Edition: Perrin

 

« Il lui faut de l’inquiétude, et non du bonheur domestique, de la gloire et de la réputation, quitte à gémir sous le fardeau de cette gloire et à s’affliger que cette réputation soit contestée par les envieux. Il lui faut de l’aventure, afin d’échapper à l’ennui, et du bonheur, pour le plaisir de se croire en butte aux caprices d’un singulier destin » (p.123). Dévoilant ces sortes de tortures doucereuses, récoltées d’une plus haute estime de soi appelant quelque très chrétien besoin mortificatoire, Ghislain de Diesbach nous livre ici probablement la plus parlante et éclairante synthèse du caractère original de François-Auguste de Chateaubriand. Affublé d’une particule largement aussi développée que la partie « tête », le bouillant et dogmatique aristo-natif de Saint-Malo transparaît en effet d’entrée en ce livre consacré à lui sous le trait d’un poète-écrivain-idéologue tourmenté… telles les eaux tumultueuses de cet océan tout près venu chahuter son avènement…

Encore cent ans pour Melville, Claude Minière (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 12 Octobre 2018. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Gallimard

Encore cent ans pour Melville, juin 2018, 112 pages, 11,50 € . Ecrivain(s): Claude Minière Edition: Gallimard

 

« Il faudra encore cent ans pour qu’Herman Melville soit lu, soit vu avec ses multiples visages, son côté noir et son côté lumineux… Trois cents ans de parenthèse. Trois siècles de tortue » (Encore cent ans pour Melville).

« Il faisait un temps merveilleux le jour où vint pour la première fois mon tour de poste à la haute vigie (Moby Dick).

« Par une illusion d’optique, flottent haut dans une brume d’azur, des terres ensoleillées comme des cygnes ou des paons aux brillantes couleurs. Le ciel et la terre se confondent, les nuages ensoleillés traînent sur la plaine » (Mardi).

Encore cent ans pour Melville est une biographie légère comme une chaloupe qui glisse sur la houle vers le Cachalot Blanc, un exercice d’équilibre littéraire pour éviter qu’Herman ne nous échappe, pour éclairer en quelques chapitres de haute tenue la vie du marin écrivain, de l’écrivain silencieux, qui n’a point cherché à écrire des livres plaisants et faciles. Melville est un aventurier, en mer et devant sa feuille, ses feuilles blanches qu’il anime, qu’il fait vivre de romans et de poèmes.

Marguerite Duras, Romane Fostier (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mercredi, 19 Septembre 2018. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Marguerite Duras, septembre 2018, 304 pages, 9,40 € . Ecrivain(s): Romane Fostier Edition: Folio (Gallimard)

 

Les Incursions secrètes de Duras

Dans l’œuvre de Duras chaque mot est une incantation – celui qui appelle l’esprit le fait apparaître – et l’auteure fit jaillir des lieux secrets contre lesquels on se penche, au bord de rien. Il y a là des nids d’errance, des espaces de repli qui sont comme des angles morts du monde à l’intérieur de soi.

Et Romane Fostier en remonte l’histoire à travers celle de Duras – de l’enfance rebelle en Indochine jusqu’à sa retraite à Neauphle-le-Château. Pas de scoop dans cette biographie mais cette façon de montrer comment les bourgeons portent des écailles pour renvoyer la lumière en éclats. Le chemin de Duras est un espace aux lisières presque closes, une sorte d’utopie dont l’accès est blotti derrière des paupières où se cachent bien des douleurs.

La biographe les pénètre pour montrer comment la romancière et cinéaste sut lâcher les freins, fendre l’œuf du monde, s’inclure dans l’élan jusqu’à pulvériser les restrictions du regard, accueillir l’éperdu dans la chambre flottante de l’esprit rebelle et acéré.

Pays sans chapeau, Dany Laferrière

Ecrit par Carole Darricarrère , le Mercredi, 29 Août 2018. , dans Biographie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, La rentrée littéraire, Zulma

Pays sans chapeau, août 2018, 257 pages, 9,95 € . Ecrivain(s): Dany Laferrière Edition: Zulma

 

Un instant en chassant un autre, drôle d’ouvrage que ce mea culpa haïtien 100% made in Haïti à mi-chemin de l’enquête mystico-socio-culturelle et du journal de l’enfant prodigue rentrant au pays après un détour de vingt années passées en Amérique du Nord, projet qui, de digression en digression, semble dériver au fil des pages au profit de séries intempestives de conversations ménagères comme autant de scénettes naïves légendées à la mode haïtienne formant patchwork jour/nuit, « pays rêvé »/« pays réel » : « La valise », « Le taxi », « La nouvelle maison », « Les objets », « Le vrai repas », « La toilette », « Du sucre », « Carottes », « L’eau chaude »… Comble de l’affaire, Dany Laferrière, son auteur, « écrivain primitif » (sic) consacré « nouvel immortel de l’Académie française » en 2013, l’homme du « pays sans chapeau », s’avère être, renseignements pris, un homme à multiples casquettes.