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Les Livres

Le jaune et le noir, Tidiane N'Diaye

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 06 Juin 2013. , dans Les Livres, Recensions, Essais, La Une Livres, Afrique, Gallimard, Histoire

Le jaune et le noir, Gallimard Continents noirs avril 2013, 153 p. 18,50 € . Ecrivain(s): Tidiane N'Diaye Edition: Gallimard

 

 

Quand, il y a peu, depuis la longue pinasse remontant le Niger, les guides maliens apercevaient sur la berge, une bicyclette «  à moteur », pétaradant comme nos antiques  Solex, leurs  rires n'en finissaient pas : «  une chinoise ! Dès qu'elle sera en panne, elle ne sera pas réparable ! Pas chère, mais pas solide ! »... Là - bas, aussi, la Chine était partout ; objets, , marques et réclames... et, déjà pas mal d' hommes.

Après la France Afrique, la Chine Afrique ? Ce qu'on entend par là, vaut pour les deux concepts : prendre, et encore se resservir, sous couvert de protections et de liens « amicaux », si ce n'est « familiaux, sauce maffieuse ». Tractation évidemment, hautement inégalitaire. Voilà l'unique sujet autopsié par le livre de «  Continents noirs » ; comment le jaune mange et mangera le noir, et jamais l'inverse.

Les aventures extravagantes de Jean Jambecreuse, Harry Bellet

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Mercredi, 05 Juin 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Actes Sud, Histoire

Les aventures extravagantes de Jean Jambecreuse, artiste et bourgeois de Bâle, Assez gros fabliau, mars 2013, 368 p. 22,80 € . Ecrivain(s): Harry Bellet Edition: Actes Sud

 

« On sait depuis des siècles combien cette fable du Christ a été profitable à nous et aux nôtres ». Les connaissances actuelles attestent que cette « célèbre » phrase du pape Léon X est une citation apocryphe, une invention de l’écrivain protestant anglais, John Bale (1495-1563). Pourtant Hariolus Bellatolus, alias Harry Bellet, pour les besoins de son fabliau, non seulement la lui prête, mais la lui fait écrire sur un parchemin apposé du sceau papal qu’un méchant courant d’air emporte hors des galeries du Vatican pour tomber dans « les cheveux merveilleusement bouclés d’un ange », un certain Salai, l’assistant favori de Léonard de Vinci. L’écrit sulfureux va susciter bien des convoitises et changer souvent de main.

Nous voici donc au début du XVIe siècle, dans une Europe qui bataille, commerce, diffuse des idées nouvelles grâce à l’imprimerie, se divise sur le plan religieux et explose dans tous les domaines artistiques. C’est dans ce contexte que le jeune Jean Jambecreuse (traduction littérale de Hans Holbein), « ymagier » de son état, quitte sa bonne ville d’Augsbourg pour rejoindre son frère Ambroise à Bâle, afin de parfaire son apprentissage.

Feux, Marguerite Yourcenar

Ecrit par Sophie Galabru , le Mardi, 04 Juin 2013. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Récits, Gallimard

Feux, 1993, 147 pages . Ecrivain(s): Marguerite Yourcenar Edition: Gallimard

Recueil de narrations lyriques ou de poèmes en prose, comme on le voudra, Feux est un des plus beaux écrits de la littérature française contemporaine. Il y a mille particularités qui convergent vers un universalisme littéraire, poétique et humain. Comme le dit l’auteur elle-même « produit d’une crise passionnelle » le recueil aurait pu s’appeler l’Amour Fou, mais c’est un titre plus à l’image du style baroque, métaphorique, classique et racinien auquel Marguerite Yourcenar a recours qui nommera ces écrits. Feux telle est la métaphore vive qui baptise ces plaidoyers passionnés.

L’ensemble proposé ici est celui de neuf récits tous empruntés à la Grèce Antique sauf Marie-Madeleine ou le salut de Dieu ; entrecoupés de réflexions brèves et foudroyantes, extraits sans doute d’écrits intimes et personnels. Yourcenar emprunte tous les sentiers détournés, narration à « il » ou « elle », nouvelle identité mythique de « je » pour nous parler de ce qui n’en finit pas de se vivre, l’amour passion. Ces détournements sont moins une mise à distance qu’une pudeur, mais peut-être aussi parce que dans l’incapacité à souffrir la souffrance ce ne peut être un « je » souffrant qui parle mais une souffrance s’écri(v)ant à travers des prête-noms. Ces personnages, ce style emphatique mais sublime, ces métaphores et ces images au service d’histoires simples soutiennent ensemble l’idée majeure selon laquelle l’amour est un support de passions abstraites et transcendantes.

La traversée, Murray Bail

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 04 Juin 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Actes Sud, Océanie

La traversée, trad. De l’anglais (Australie) par Patrice Repusseau avril 2013, 196 p. 20 € . Ecrivain(s): Murray Bail Edition: Actes Sud

Ce livre porte en lui, par son rythme et sa prosopopée, son titre, la Traversée. Murray Bail, on le sait depuis au moins son somptueux « Eucalyptus » (Robert Laffont 1999), est d’abord un grand styliste. Ce livre en est une éclatante confirmation. Pas de chapitres, pas de paragraphes (ou presque pas) : une longue, sinueuse, fluide avancée narrative qui, peu à peu, nous imprègne, nous berce de son rythme, nous enivre et nous emporte enfin. On ne peut pas ne pas penser au flot proustien, à cette manière particulière de pétrir l’écriture avec le temps, dans un jeu permanent de va et vient entre les moments du présent, du passé, du futur. Le temps est la seule scansion véritable de ce roman. Car c’est un roman et comment ! Tout ici baigne dans un univers romanesque à la fois lyrique et moderne. Le chant proustien ? Qu’on l’écoute ici :

« L’économie de la comptable enceinte avait contraint Delage à repousser son départ, ce qui permit à Elisabeth de rejoindre le Romance au Pirée, bien qu’elle eût pu rattraper le navire plus loin, à Port-Saïd ou à Singapour, par exemple, Delage descendait la passerelle en tôle ondulée, pensant se promener dans Athènes, une ville qu’il avait si souvent vue en photo, ou au moins ses nobles ruines tenant bon contre le ciel bleu, un ciel toujours immaculé, le long des rues il observerait les nombreuses coutumes locales, il prendrait son temps – du haut de la passerelle il aperçut Elisabeth, la tête relevée, attendant que quelqu’un prenne ses trois valises. »

Absences, Alice LaPlante

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Samedi, 01 Juin 2013. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, USA, Roman, Robert Laffont

Absences, traduit de l’anglais (USA) par Daphné Bernard, mars 2013, 414 pages, 21 € . Ecrivain(s): Alice LaPlante Edition: Robert Laffont

 

Sheffield Avenue, dans Chicago, est une rue bordée d’arbres, où de coquettes maisons de briques rouges, agrémentées d’oriels, invitent à une vie paisible et confortable, loin des gratte-ciels et de l’agitation du centre-ville. Un quartier plein de charme qui semble à l’abri de toute forme de criminalité. Pourtant, le 22 février 2009, le corps d’une femme de soixante-quinze ans est retrouvé par une voisine, dans l’une de ces charmantes demeures. Il s’agit d’Amanda O’Toole, ex-professeur et femme autoritaire qui a succombé à un traumatisme crânien et dont quatre doigts de la main droite ont été sectionnés avec une précision toute chirurgicale.

La dernière personne à l’avoir vue vivante, quelques jours auparavant, est sa meilleure amie, Jennifer White, veuve d’un brillant avocat, elle-même chirurgien orthopédiste réputé et à la retraite, spécialiste de la chirurgie de la main. Une altercation avait opposé les deux femmes une semaine avant la découverte du cadavre. Les soupçons de la police se portent naturellement sur Jennifer White, mais l’enquête s’annonce difficile, car cette femme, au tempérament bien trempé, souffre de la maladie d’Alzheimer.