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La Une CED

Les rêves naissent des ailes des pigeons rôtis, par Nadia Agsous

Ecrit par Nadia Agsous , le Mercredi, 08 Novembre 2017. , dans La Une CED, Ecriture, Nouvelles

 

C’est grâce à Oustaz (1) M’Hammed El Festi (2) Effendi (3), un charlatan qui appâtait les femmes en leur promettant des remèdes miraculeux ; en leur vendant amour, réussite, succès, guérison et bien-être, que nous nous retrouvâmes, ma mère et moi, en plein été, en Egypte, dans la ville du Caire. Cette année-là, le mois d’août était particulièrement torride. La température atteignait, parfois, jusqu’à cinquante degrés. Malgré la canicule et la chaleur suffocante, tous les jours, à l’aube, la foule pullulante se jetait aveuglément dans la gueule de la vie vociférante. Lorsque le soleil parvenait à son point culminant, la belle et envoûtante Oum El Dounia (4) devenait alors un enfer sur terre.

Tumulte ! Tempêtes de sable brûlant ! Clameur ! Rumeurs ! Klaxons ! Harara (5) ! Zahma (6) ! Fawda (7) !

Nous étions au cœur de la fournaise humaine. La révolution était loin derrière nous. La misère poussait partout ; le désespoir proliférait ; la désillusion était sur toutes les langues. La ville et ses bas-fonds pouilleux, crasseux, miteux, miséreux, diffusaient une odeur âcre. C’était le temps de la remise de soi à une fatalité qui collait aux basques de ce peuple comme une sangsue. L’espoir d’une vie meilleure avait été définitivement enterré.

Du métier mystérieux d’être chroniqueur, par Kamel Daoud

Ecrit par Kamel Daoud , le Mardi, 07 Novembre 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières

 

« J’ai bien regardé partout, j’ai lu tous les journaux, j’ai écouté et j’ai songé, mais il n’y a rien », me dit-il, consterné. « Je n’arrive pas à écrire. C’est flou. Généralement, j’ai toujours quelqu’un dans la tête qui raconte son histoire. C’est un monologue qui dure depuis mon enfance, sans livres. Je l’écoute et je lui vole quelques morceaux et je les publie. Mais là, je te jure, rien. J’ai une tête qui raconte toujours quelque chose. Comme un livre sans fin. Il me suffit de regarder une chaise pour imaginer l’histoire de l’éternité. Ou fixer une tasse de café vide pour reconstruire une vie ou deux d’inconnus. C’est simple. On me demande toujours d’où viennent les images et je réponds toujours que je ne sais pas. J’écoute, c’est tout. C’est précédé toujours par une mélodie. Toutes mes histoires viennent de derrière une porte à laquelle je colle l’oreille et qui sépare mon monde du monde des ancêtres ou des morts ou des poissons ou des tasses de café vides. Imagine n’importe quoi et cela finira par prendre voix et chair et te demander un prénom. C’est ma règle.

Frédéric Chopin, par Hans Limon

Ecrit par Hans Limon , le Mardi, 07 Novembre 2017. , dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

 

tu tends l’oreille aux soubresauts de l’infini

puis répands sur l’ivoire un souffle d’harmonie

gonflant d’azur zébré l’aube des barcarolles

ballottant les amours, épaule contre épaule

 

de George sanctifiée aux deux lacs de Constance

tu puises chez la Femme un peu de cette chance

aux génies favorable, et tes gracieux nocturnes

achèvent d’arrondir les anneaux de Saturne

A propos de "Je m’appelle Europe", Gazmend Kapllani, par Franck Verdun

Ecrit par Franck Verdun , le Lundi, 06 Novembre 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques

Je m’appelle Europe, Gazmend Kapllani, Editions Intervalles, 2013, 153 pages, 19 €

A la recherche du grand roman européen

Nous autres, européens, nous croyons aux mythes. Nous succombons volontiers à ceux des autres. Prenons l’exemple du Grand roman américain, ce livre qui exprimerait tout entier l’essence de l’Amérique, de son histoire et qui, à travers des récits de base-ball et de pêche à la truite toucherait l’universel. De temps à autre, on nous annonce sa naissance. Le grand roman américain obéit à des canons précis : son auteur est inconnu, il a mis 7 à 10 ans pour écrire l’œuvre, son éditeur l’a payé très cher. Les cases étant cochées, il ne nous reste plus qu’à lire City on fire ou Les fantômes du vieux pays.

L’attente, l’espoir du grand roman américain porte en lui la condamnation de notre littérature : fatiguée de ses frontières étroites, de son nombrilisme, de son autofiction, de ses historiettes sexualisées. Notre littérature a l’odeur des placards et du ressassement. Pourtant nous sommes européens. Il suffit peut-être seulement de changer de point de vue, de prendre la hauteur du continent pour retrouver le souffle. Oui mais le grand roman européen existe-t-il ? A-t-on seulement envie de l’imaginer ?

Société à responsabilité limitée, par Sandrine Ferron-Veillard

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Lundi, 06 Novembre 2017. , dans La Une CED, Ecriture, Nouvelles

« D’un côté, la réalité objective des rivières, des arbres et des lions ; de l’autre, la réalité imaginaire des dieux, des nations et des sociétés. Au fil du temps, la réalité imaginaire est devenue plus puissante, au point que de nos jours la survie même des rivières, des arbres et des lions dépend de la grâce des entités imaginaires comme le Dieu Tout-Puissant, les États-Unis et Google ».

Sapiens, Yuval Noah Harari, Albin Michel, 2015

 

Au plus célèbre des cyniques, le journaliste aurait recommandé ce cher Monsieur Piéchut-Dion.

Bon petit homme, rondelet et dégarni, petit, rond, dégarni et assurément très vilain. C’est à la question du journaliste « connaissez-vous un illustre cynique en politique ? » qu’Eugène Piéchut-Dion répondit le 3 mai 2014 : moi !

Du non-sens ! affirmer être un cynique revient déjà à ne plus l’être et ne pas y croire, encore davantage.