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Côté écrans

Plein écran (2) - La grande bouffe, Marco Ferreri

Ecrit par Sophie Galabru , le Mercredi, 03 Avril 2013. , dans Côté écrans, Les Dossiers, La Une CED

Inscrit au titre de grand classique du cinéma français, ce film de Marco Ferreri séduit d’autant plus qu’il réunit quatre des plus grands acteurs du XXe siècle ; Michel Piccoli – Les choses de la vie, Vincent François Paul et les autres, Milou en mai – Marcello Mastroianni – Huit et demi, La dolce vita, Divorce à l’italienne –, Ugo Tognazzi – La tragédie d’un homme ridicule, La cage aux folles, L’amour à la ville Philippe Noiret – Le vieux fusil, Le juge et l’assassin, La vie et rien d’autre.

Le film n’a pas la prétention des grandes histoires : pas d’action principale, ni d’intrigue, ni de suspens : ces quatre amis se réunissent le temps weekend, ou plus si la jouissance de la mort l’exige, afin de se délecter sans limite de tout ce que la vie peut réserver de meilleur : sexe, amitié, luxe, rencontres impromptues, et surtout grande bouffe. L’idée n’est pas de jouir mais de mourir : s’empiffrer plus que déguster, mourir plus que bien vivre, se séparer plus que se réunir. C’est toute la problématique d’un film qu’on pourrait dire vouloir simplement choquer. Comment la vie dans son excès conduit à la mort ? Comment le trop plein du jouir n’est que l’autre versant du mourir ? Pourquoi vie et mort n’ont pas de frontière ? En quoi la surconsommation contemporaine, capitaliste, occidentale semble accompagner voire porter ce plaisir nihiliste et mortifère ? Ce qui choque n’est-ce pas davantage que le plaisir puisse dissimuler l’envie de mourir ? Que le plaisir ne soit pas la fin mais le moyen d’une fin plus ultime : la mort ?

Plein écran (1) - Huit et demi, Federico Fellini

Ecrit par Sophie Galabru , le Mardi, 05 Mars 2013. , dans Côté écrans, Les Dossiers, La Une CED

Huit et demi est un film franco-italien réalisé par F. Fellini et sorti en 1963 avec M. Mastroianni, Anouk Aimée, Sandra Milo, Claudia Cardinale.

Un cinéaste dépressif fuit le monde du cinéma et se réfugie dans l’univers de ses souvenirs et de ses fantasmes.

 

Les réminiscences et le réel

Un voile psychanalytique filtre les aveux d’un cinéaste en mal de cohérence, et donc de création. Guido est un cinéaste qui tente d’achever un film. Il s’en va prendre du repos en cure thermale. Les autres qui l’entourent, ses amis, sa maîtresse, ses collaborateurs le dérangent sans cesse, et le renvoient ou l’acculent à des rêveries. La première scène débute sur un de ces songes : Guido étouffe dans sa voiture et réussit à s’évader par la fente de la vitre, il s’enfuit jusqu’au ciel, planant au dessus d’une plage, son imagination contre tout principe de gravitation l’emporte. La prise de vue nous situe à la fois dans le dos de Guido, mais aussi selon son point de vue propre comme dans sa peau de telle sorte que nous partageons son évasion, son envol, sa traversée vers le ciel dans une ascension éthérée et silencieuse.

A serious man, Coen Bros (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Vendredi, 04 Janvier 2013. , dans Côté écrans, Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Une fois n’est pas coutume : le format télévision, même « grand écran plat », convient très bien à « A serious man » de Joel et Etan Coen. Je ne sais pas, sûrement le côté « journal intime » du film qui sied bien à mon salon. En tout cas, ce fut un vrai bonheur de revoir le dernier « Cbrothers ».

 

Il paraît que quelques Juifs se sont agacés devant ce film. Je comprends que certains, habitués au « culturellement correct », puissent s’offusquer devant une telle « déconstruction ». Une telle rupture avec le pathos traditionnel des films du genre « humour juif » a de quoi surprendre, déconcerter, voire irriter. Pas une trace de folklore juif américain du début à la fin. On est formé à Woody Allen, avec ses figures archétypiques et sympas : l’intello new-yorkais, l’écrivain qui se cherche, l’artiste égocentrique, le psychanalyste rongé d’angoisse, l’hypochondriaque agité, la mère abusive, le père paumé. Bref, la galerie de figures-types, qui font rire, qui attachent. Avec ce film des frères Coen, rien de ce genre.

A commencer par le choix des acteurs. Pas un visage connu, pas un visage séduisant.

Bollywood : l'or indien

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 05 Décembre 2012. , dans Côté écrans, Les Chroniques, La Une CED

1) Bollywood : l’or indien

 

Devdas, le star-système indien

 

Devdas fait partie du cinéma dit populaire, à grand succès commercial, néanmoins de qualité, parvenu à la reconnaissance mondiale. C’est le film le plus coûteux de toute l’histoire du cinéma indien, avec la création originale de tous les décors. Devdas est à la fois le titre du film et le nom du héros.

Ce trompe-l’œil oriental doré, aux brillantes couleurs bollywoodiennes, est une œuvre qui a été sélectionnée à Cannes en 2002, et mise en scène par Sanjay Leela Bhansali, nommé meilleur réalisateur en 2003. Aïshwarya Rai Bachchan qui interprète Parvati, a été en 2003 la première actrice indienne membre du jury à Cannes. Shabukh Khan s’immisce intimement dans la peau de Devdas – Roméo indien –, éperdu d’amour pour Paro (Parvati) Radha – la pureté et Juliette… Le générique commence sur la maison de production Mega Bollywood, en lettrage doré, ce qui est explicite de la démesure de Devdas. Puis vient la dédicace « à mon père » sur fond rouge sang où les lettres et les noms s’inscrivent comme des tatouages, éclosent comme des signatures sur les images de la déesse Kali, entourée de femmes florales. Le premier mot prononcé est celui de « mère ».

Shining, le Labyrinthe du dedans

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Samedi, 15 Septembre 2012. , dans Côté écrans, Les Chroniques, La Une CED

 

Revoir, après des années d’abstinence, le « Shining » de Stanley Kubrick, a quelque chose du « déjà vu », bien sûr, mais surtout de la découverte absolue. Un peu comme si, de s’être détaché de la trame narrative depuis assez longtemps, de l’avoir intégrée dans sa mémoire inconsciente, nous libérait en quelque sorte de toute contrainte de lecture directe.

 

Fable onirique sur les entrelacs étranges de l’espace et du temps, conte pour enfants (dans son effroyable cruauté) tressé des fils de l’espoir et du malheur, « Shining » déploie les lignes parallèles d’une redoutable machine narrative et d’un conte symbolique à échos vertigineux. A la topographie centrale du Labyrinthe, métaphore hallucinée et hallucinante qui structure le film et son écriture, font pendants et miroirs les topologies croisées des relations entre personnages, du rapport d’un homme à son écriture (Jack Torrance se veut « écrivain ») et de la scansion alternée du temps et du désir humain.