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Maghreb

Touaregs L’exil pour patrie, Intagrist el Ansari (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 08 Octobre 2019. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Poésie, Histoire

Touaregs L’exil pour patrie, Editions Alfabarre, 2018, 200 pages, 25 € . Ecrivain(s): Intagrist el Ansari

 

Auteur de l’itinéraire poétique Echo saharien L’inconsolable nostalgie, Intagrist el Ansari est aussi journaliste et historien. C’est à ce titre qu’il a compilé sous le titre Touaregs L’exil pour patrie une sélection d’articles de presse et d’analyses géopolitiques et sociologiques qu’il a publiés dans divers magazines sur la situation de belligérance perpétuelle dans laquelle vivent les diverses populations du Sahel, et particulièrement les Touaregs du nord du Mali, depuis 2012. Cette somme est à la fois un ouvrage pédagogique et l’expression d’une révolte. Ouvrage pédagogique efficace par la redondance et la précision des éléments factuels de texte en texte et par la possibilité offerte au lecteur de suivre quasiment de mois en mois l’évolution des événements contemporains dans cette partie agitée du monde sahélien.

Ouvrage pédagogique nécessaire à qui veut tenter de démêler l’écheveau a priori inextricable des groupes armés et des forces politiques locales et externes impliqués dans l’histoire récente de ce vaste espace quasi-désertique englobant la moitié nord du Mali et les régions périphériques.

Echo Saharien, L’inconsolable nostalgie, Intagrist el Ansari (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 01 Octobre 2019. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Echo Saharien, L’inconsolable nostalgie, Editions Alfabarre, 2018, 160 pages, 19 € . Ecrivain(s): Intagrist el Ansari

 

De Paris à Tombouctou, en passant par l’Andalousie, Tanger, Tan Tan, Kidal, Timiawen, Gao, Tamanrasset, Nouakchott, Ménaka, Bamako, la lente trajectoire d’un fils du désert quittant la terre d’exil après dix-huit ans de déracinement en deçà des Pyrénées pour marcher sur les traces de ses ancêtres, de sa tribu, de sa famille, de son passé.

Intagrist el Ansari, de la tribu touarègue des Kel Ansar comme son nom l’indique, met en mots ce long périple suivi d’une halte régénératrice d’une année à Tombouctou, le point central du rayonnement pérégrinatoire des Kel Ansar à travers les siècles sur une grande partie de l’ouest saharien.

Qu’on ne s’y trompe pas ! Il ne s’agit pas d’un récit de voyage. Bien qu’il se réfère à maintes reprises à ces illustres prédécesseurs, Intagrist n’est ni l’explorateur René Caillé, ni l’historien géographe Ibn Battûta, ni le conteur voyageur sociologue Ibn Khaldoun.

Zabor, ou Les psaumes, Kamel Daoud (par Marie-Pierre Fiorentino)

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Jeudi, 11 Juillet 2019. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Babel (Actes Sud)

Zabor, ou Les psaumes, 330 pages, 21 € . Ecrivain(s): Kamel Daoud Edition: Babel (Actes Sud)

 

« Le vieillard était devenu une poignée de chair dans la main froissée du drap »

Zabor ou Les psaumes est d’abord un splendide livre d’images écrit dans les parages de la mort. L’histoire de Zabor, pauvre de tout sauf de ses mots, est celle d’une défaite triomphalement équivoque. Même le nom du village où Zabor vit, Aboukir, est beau de l’éclat de ses trois syllabes en branches, soleil dessiné par l’enfance dans des odeurs et des bruissements dont l’angoisse et les rêves se nourrissent.

Mais l’histoire de Zabor est aussi celle de l’émancipation par une langue que l’on décide de faire sienne. Car « Tout baiser se fait dans le silence de la langue ».

 

« L’orgasme n’est pas un complot occidental »

Le jour fait l’adieu, Zohra Mrimi (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Vendredi, 03 Mai 2019. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Z4 éditions

Le jour fait l’adieu, mars 2019, 114 pages, 12 € . Ecrivain(s): Zohra Mrimi Edition: Z4 éditions

 

Chez Zohra Mrimi, la solitude se conçoit de façon artistique : « Je blanchis ma solitude comme un tableau de maître » dit-elle. Fondante sur les lèvres, suggérée aux anges, cette solitude parfaitement apprivoisée, évoquée dans des jeux d’ombre en noir et blanc, inversant d’ailleurs les couleurs dans leurs rôles « normaux », se fait davantage sentir « quand un poète s’absente ».

La poète avance avec sa déclaration d’Amour à la boutonnière, multipliant la progression émotive de ce qu’elle dit : « Je t’aime/Je double mes pas/double mes jours ».

Comme dédoublée d’une absence, l’auteur a ce recul nécessaire pour prendre conscience, se servant sans doute d’un paysage familier, que « l’Amour ne passe pas vers telle sécheresse ».

Vulnérable, la protagoniste énoncée à la troisième personne, semble être une projection de celle qui écrit, une sorte de miroir : « Elle est libre/Elle est nue/Elle est invisible aux couteaux qui la tuent/Le rythme de l’agonie est visible ».

1994, Adlène Meddi (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 21 Janvier 2019. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Rivages

1994, septembre 2018, 332 pages, 20 € . Ecrivain(s): Adlène Meddi Edition: Rivages

 

Donner un millésime comme titre à un roman peut être une manière délibérée de rendre hommage à George Orwell et de se ranger sous son patronage ; en particulier quand le titre en question contient certains chiffres talismaniques. Ce fut ainsi le cas pour la dystopie de Boualem Sansal, 2084. Son compatriote Adlène Meddi a choisi, de son côté, une autre date : 1994. Pourtant, le modèle orwellien paraît loin, ne serait-ce que dans la mesure où l’auteur ne scrute pas l’avenir, mais le passé d’un pays – le sien, l’Algérie ; celui d’une génération (qui connut la guerre d’indépendance) et de ses fils. Il en va, semble-t-il, de la violence comme de l’énergie : une fois produite, si elle ne se transforme pas, elle ne disparaît jamais et, quand elle donne l’impression d’avoir disparu, c’est qu’elle est partie au mauvais endroit. On dit que le charnier dans lequel les victimes du massacre d’Oran (5 juillet 1962) furent ensevelies par les bulldozers de l’armée française empuantit la ville pendant des années. De la décennie 1950 à la décennie 1990, une violence déchaînée traversa l’Algérie et, comme elle n’avait plus d’appelés français à décapiter, elle se retourna contre les Algériens eux-mêmes. On a beaucoup écrit sur les méthodes employées par l’armée française pendant les « événements », mais le FLN et les autres mouvements indépendantistes (c’est ici un Algérien qui le rappelle) n’étaient pas composés d’anges et de saints.