La France en automobile, Edith Wharton
La France en automobile, préface Julian Barnes, trad. américain Jean Pavans, 224 pages, 7,20 €
Ecrivain(s): Edith Wharton Edition: Folio (Gallimard)
On connaissait Edith Wharton romancière, auteure des intrigues des riches New-Yorkais du tournant du XXe siècle. On connaissait moins l’Edith Wharton touriste littéraire, amoureuse de la France et sillonnant les routes des provinces françaises avec son mari Teddy, parfois accompagnée du fidèle ami et écrivain Henry James. En effet, publié aux Etats-Unis en 1908 avec succès, La France en automobile n’avait jamais été traduit en français. C’est maintenant chose faite, et l’on se régale de ce voyage en terre de France, au volant d’une Panhard et Levassor 15hp achetée d’occasion à Londres et conduite allègrement par un chauffeur.
Wharton se promène d’abord de Boulogne à Amiens, Beauvais et Rouen, de Rouen à Fontainebleau, le long de la Loire et de l’Indre, de Nohant à Clermont, en Auvergne, de Royat jusqu’à Bourges, puis dans une deuxième partie, de Paris à Poitiers, de Poitiers aux Pyrénées, des Pyrénées vers la Provence, du Rhône à la Seine et enfin, dans une troisième partie, fait une excursion dans le Nord-Est de la France. Chacun, en fonction de ses attaches régionales, y trouvera son plaisir.
Amoureuse de la France, Edith Wharton certes l’est pour décrire avec tant de charme la diversité de la campagne française, ses clochers, ses ponts, ses rivières pittoresques. Ce sont, comme souvent, les écrivains étrangers qui offrent le meilleur tableau de la France, langue et culture – Wharton ne déroge pas à la règle. L’acuité de son regard d’Américaine ne lui fait négliger aucun détail et la rend réceptive à tous les éléments historiques et culturels dont se compose un voyage, comme dans un guide personnalisé.
L’auteur s’intéresse sur son chemin en particulier à l’art religieux, de la cathédrale d’Amiens à celle de Beauvais, en passant par la petite église de Neuvy-Saint-Sépulchre, au sud de Nohant, et tant d’autres. Wharton capte avec finesse les lignes de rupture du paysage : « Nous étions enfin dans le Midi, non pas le Midi méditerranéen chaud et délicatement crayonné, qui comporte toujours une nuance d’Orient, mais le Midi d’Aquitaine tempéré, rafraîchi par le golfe de Gascogne ».
L’arrivée sur Paris, qui clôt la deuxième partie, est décrite sous une forme épique : « mais nous nous approchions du fleuve, et nous avons vu devant nous les courbes des coupoles dressées, la puissance grise des ponts, et toute l’élégante et saisissante symétrie de ce qui dans d’autres villes a un aspect mesquin, compact et confus ; alors une autre beauté nous a enveloppés comme un charme, “les seuils sacrés, et la Seine qui coule” * ». Et c’est à nouveau la descente vers Paris qui termine le livre, avec une coloration plus douce : « et puis au-delà, en un point où la rivière forme un grand méandre vers l’ouest, on peut de nouveau se diriger vers l’est, pour traverser la forêt de Saint-Germain, et descendre vers Paris à l’ombre des longues allées du parc de Saint-Cloud ».
Un livre à lire en randonnée, avant, après ou pendant des vacances.
Sylvie Ferrando
* Victor Hugo, Lueur au couchant (1855)
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