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De la simplicité !, Henry David Thoreau

Ecrit par Sylvie Ferrando 05.05.17 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Essais, USA

De la simplicité !, avril 2017, trad. américain Louis Fabulet, 112 pages, 3,50 €

Ecrivain(s): Henry David Thoreau Edition: Folio (Gallimard)

De la simplicité !, Henry David Thoreau

 

A l’occasion de la commémoration du bicentenaire de la naissance de Thoreau, né le 12 juillet 1817, Gallimard réédite dans la collection Folios Sagesse, sous le titre De la simplicité !, des morceaux choisis de Walden ou la vie dans les bois, tirés de l’ouvrage précédemment publié dans la collection L’Imaginaire.

Thoreau se livre ici à un vibrant plaidoyer en faveur d’une vie simple et rustique, dans laquelle l’homme dépense en argent et en énergie juste ce qu’il gagne ou ce dont il a besoin. Pourquoi accumuler les richesses, nous dit Thoreau, alors qu’il est si simple d’avoir juste de quoi vivre ?

« Qui donc les a faits serfs du sol ? Pourquoi leur faudrait-il manger leurs soixante acres, quand l’homme est condamné à ne manger que son picotin d’ordure ? »

En effet, nous nous créons des obligations de productivité qui nous rendent la vie dure et la folie des grandeurs nous rend déprimés.

« L’existence que mènent généralement les hommes en est une de tranquille désespoir. Ce que l’on appelle résignation n’est autre chose que du désespoir confirmé ».

« Encore vivons-nous mesquinement, comme des fourmis […] Notre vie se gaspille en détail. Un honnête homme n’a guère besoin de compter plus que ses dix doigts, ou dans les cas extrêmes peut-il y ajouter ses dix doigts de pied […] De la simplicité, de la simplicité, de la simplicité ! Oui, que vos affaires soient comme deux ou trois, et non cent ou mille ; au lieu d’un million comptez par demi-douzaine […] Au lieu de trois repas par jour, s’il est nécessaire n’en prenez qu’un ; au lieu de cent plats, cinq ; et réduisez le reste en proportion ».

Comme les animaux, l’homme n’a besoin que du « grossier nécessaire de la vie » : « Pour le bison de la prairie cela consiste en quelques pouces d’herbe tendre, avec de l’eau à boire […] Les nécessités de la vie pour l’homme en ce climat peuvent, assez exactement, se répartir sous les différentes rubriques de Vivre, Couvert, Vêtement et Combustible […] ».

S’étant opposé au trop-plein économique, l’auteur se livre alors à plusieurs éloges. Tout d’abord un éloge de la lecture, du savoir, de la connaissance. Ayant exercé pendant quelque temps le métier d’instituteur, il est très porté vers les livres, qu’il caractérise comme « la fortune thésaurisée du monde et le dû héritage des générations et nations », et vers la connaissance des grands hommes de l’Antiquité.

On trouve ensuite un éloge de la solitude, à l’instar d’un Pascal qui pense que le malheur de l’homme consiste à ne pas pouvoir rester longtemps seul dans une chambre. L’auteur a en effet vécu deux ans dans une cabane forestière près de l’étang de Walden et fait l’expérience de la solitude rustique :

« Je trouve salutaire d’être seul la plus grande partie du temps. Etre en compagnie, fût-ce avec la meilleure, est vite fastidieux et dissipant. […] Nous sommes en général plus isolés lorsque nous sortons pour nous mêler aux hommes que lorsque nous restons au fond de nos appartements ».

Thoreau termine enfin par un éloge de la vérité, qui est pour lui la seule vraie hospitalité, celle qui vient du cœur : « Mieux que l’amour, l’argent, la gloire, donnez-moi la vérité. Je me suis assis à une table où nourriture et vins riches étaient en abondance, et le service obséquieux, mais où n’étaient ni sincérité, ni vérité ; et c’est affamé que j’ai quitté l’inhospitalière maison. L’hospitalité était aussi froide que les glaces ».

Cette conduite de vie individuelle, hymne épicurien à la vie simple et rustique, qui peut servir d’exemple, pourrait se résumer à la formule suivante : le bonheur réside dans l’adéquation des besoins et des désirs, et nul n’a besoin de tant de biens.

 

Sylvie Ferrando

 


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A propos de l'écrivain

Henry David Thoreau

Henry David Thoreau, né David Henry Thoreau le 12 juillet 1817 à Concord (Massachusetts) où il est mort le 6 mai 1862, est un essayiste, enseignant, philosophe, naturaliste amateur et poète américain.
Son œuvre majeure, Walden ou la vie dans les bois, publiée en 1854, délivre ses réflexions sur une vie simple menée loin de la société, dans les bois et suite à sa « révolte solitaire ». Le livre La Désobéissance civile (1849), dans lequel il avance l'idée d'une résistance individuelle à un gouvernement jugé injuste, est considéré comme à l'origine du concept contemporain de « non-violence ».
Opposé à l'esclavagisme toute sa vie, faisant des conférences et militant contre les lois sur les esclaves évadés et capturés, louant le travail des abolitionnistes et surtout de John Brown, Thoreau propose une philosophie de résistance non violente qui influence des figures politiques, spirituelles ou littéraires telles que Léon Tolstoï, Gandhi et Martin Luther King.
Les livres, articles, essais, journaux et poésies de Thoreau remplissent vingt volumes. Surnommé le « poète-naturaliste » par son ami William Ellery Channing (1780 - 1842), Thoreau se veut un observateur attentif de la nature et ce surtout dans ses dernières années durant lesquelles il étudie des phénomènes aussi variés que les saisons, la dispersion des essences d'arbres ou encore la botanique. Les différents mouvements écologistes ou les tenants de la décroissance actuels le considèrent comme l'un des pionniers de l'écologie car il ne cesse de replacer l'homme dans son milieu naturel et appelle à un respect de l'environnement.

 

(source : Wikipédia)

A propos du rédacteur

Sylvie Ferrando

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Rédactrice

Domaines de prédilection : littérature française, littérature anglo-saxonne, littérature étrangère

Genres : romans, romans noirs, nouvelles, essais

Maisons d’édition les plus fréquentes : Gallimard, Grasset, Actes Sud, Rivages, Minuit, Albin Michel, Seuil

Après avoir travaillé une dizaine d'années dans l'édition de livres, Sylvie Ferrando a enseigné de la maternelle à l'université et a été responsable de formation pour les concours enseignants de lettres au CNED. Elle est aujourd'hui professeur de lettres au collège.

Passionnée de fiction, elle écrit des nouvelles et des romans, qu'elle publie depuis 2011.

Depuis 2015, elle est rédactrice à La Cause littéraire et, depuis 2016, membre du comité de lecture de la revue.

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