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Un jour nous serons humains, David Léon

Ecrit par Marie du Crest 01.07.14 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Théâtre, Espaces 34

Un jour nous serons humains, 22 pages, 2014

Ecrivain(s): David Léon Edition: Espaces 34

Un jour nous serons humains, David Léon

 

 

« Le parti pris des animaux, le parti pris des hommes ».

 

L’œuvre de David Léon se tisse avec les voix. Un jour nous serons humains (opus 4) fait entendre sous la forme d’un poème dramatique un dire et un cri en humanité ou plutôt une parole du vivant : celle de « nos Bêtes » et la nôtre. Comme la citation-épigraphe de Deleuze ou les textes de Bailly l’affirment, nous sommes fraternellement liés aux animaux. L’ouverture du texte d’ailleurs est un envol annoncé par des points de suspension, qui en quelque sorte font passage entre le silence qui les précède et les premiers mots que les italiques enluminent.

Les oiseaux traversent le texte typographiquement comme ils traverseraient le ciel (pages 9, 12, 14, 15, 16, 18). Cortège des grives, corneilles, choucas, étourneaux, courlis et craves, jusqu’au bout du texte, p.22. Le langage articulé des hommes, en quelques pages, se creuse afin d’atteindre la délivrance de notre inhumanité. Il y a dans ce texte quelque chose de l’écriture de Saint Jean, de l’Apocalypse, des destructions mais aussi de la Renaissance, que le futur du titre reprend. Au-delà des italiques initiaux du texte, en effet, un point-virgule sert d’incipit : ponctuation de l’entre-deux et de la rupture nécessaire et c’est ce même point-virgule qui constitue le dernier signe graphique du texte, comme une attente prophétique, un recommencement.

Le texte a une origine que l’auteur rapporte : une femme dans un établissement psychiatrique, tendant ses mains devant elle, prononce cette phrase : « un jour je serai humaine » ; geste que le « je » de la voix refait, comme une invocation, à la dernière page du texte. L’humanité se gagne à travers le cheminement du verbe heurté, qui s’arrête et reprend sans cesse :

J’ai dit arrêté là/ stoppé net là/

Les mots disent l’obstacle ainsi que la ponctuation et la répétition. Comment exprimer « l’Outrage », l’horreur que vivent les hommes, que les hommes entre eux répandent comme celle récente des enfants syriens dans leurs linceuls blancs, victimes d’armes chimiques, dont les images terribles sont venues jusqu’à nous ? :

Rien de moins que des corps d’enfants enrubannés dans des linceuls blancs rien de moins que des cadavres d’enfants gazés desséchés puis exposés sur nos trottoirs dans nos rues (p.11).

Le présent inhumain est Violence, Brutalité et Obscénité. Le texte semble comme perdre haleine (seul le passage des oiseaux lui accorde une respiration typographique) dans la peinture des désastres, des déluges, des mises à mort des hommes comme des oiseaux. Il aspire à la prière, à une incantation (p.20), à la naissance du monde retrouvé et enfin humain et animal.

Le texte de David Léon sera créé lors des Sujets à Vif 2014, proposés par la SACD/Festival d’Avignon au Jardin de la Vierge du 7 au 13 juillet, dans une mise en scène d’Hélène Soulié, directrice artistique d’Exit, dont l’auteur est associé. Interprétation : Emmanuel Eggermont/L’anthracite (chorégraphie, danse), Marik Renner (texte).

 

Marie Du Crest

 


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A propos de l'écrivain

David Léon

 

Né en 1976, David Léon suit d’abord une formation de comédien aux conservatoires de Montpellier et Paris. Il joue notamment dans des mises en scène de J.L Martinelli, Lukas Hemleb, Alain Françon. Il passe à l’écriture dramatique, accompagné de Joël Jouanneau avec un premier texte, Comme des frères. En 2007, il bénéficie d’une bourse d’encouragement du C.N.T pour l’écriture de La robe bleue. Il travaille également dans le cadre d’ateliers d’improvisations avec des enfants. C’est en 2011 qu’il publie sa première pièce, Un Batman dans sa tête, pièce qui sera remarquée par le comité de lecture du Panda théâtre, sélectionnée par le bureau des lecteurs de la Comédie-Française en 2012, ainsi que par le comité de lecture du théâtre de l’Ephémère. En septembre 2012 paraît Père et fils, et en 2014, Sauver la peau sera publié. David Léon est auteur associé du collectif EXIT.

 

A propos du rédacteur

Marie du Crest

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Rédactrice

Théâtre

Marie Du Crest  Agrégée de lettres modernes et diplômée  en Philosophie. A publié dans les revues Infusion et Dissonances des textes de poésie en prose. Un de ses récits a été retenu chez un éditeur belge. Chroniqueuse littéraire ( romans) pour le magazine culturel  Zibeline dans lé région sud. Aime lire, voir le Théâtre contemporain et en parler pour La Cause Littéraire.