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Oswald de nuit, Samuel Gallet

Ecrit par Marie du Crest 11.12.13 dans La Une CED, Documents, Les Dossiers

Oswald de nuit, Samuel Gallet, 7 novembre 2013, dans la grande salle du théâtre de la Renaissance à Oullins (une heure vingt)

Oswald de nuit, Samuel Gallet

 

Oswald chante, Oswald danse


Concert de rock. La salle s’impatiente. Le public trépigne, siffle, se rapproche de la scène ; ils attendent le groupe qui aime à se faire désirer. Les roadies ont installé les drums, les claviers, les supports des guitares et des basses. On règle le micro central, fantôme du chanteur. Dans la grande salle du théâtre de la Renaissance, les deux musiciens : le guitariste Baptiste Tanné et la percussionniste Mélissa Acchiardi sont tapis dans l’ombre ainsi qu’au centre du plateau, tout au fond sur une chaise, Samuel Gallet qui lui aussi attend. Ils observent l’entrée du public comme dans une mise en scène de théâtre, contemporaine sous la lumière des petites lampes à abat-jour d’Adèle Grépinet, modestes étoiles pour la nuit d’Oswald. Théâtre ou concert ? Musique ou silence ? Chant ou dit ? Danse ou immobilité ? Ce qui importe, c’est justement de ne pas choisir mais de donner corps à la Voix d’Oswald de toutes les manières possibles. Poème rock en trois volets comme un souvenir d’opéra rock.

Cela commence par un solo de guitare dans la douceur de sa phrase introductive qui reviendra comme une phrase que l’on reconnaît. Le grand jeune homme du fond, l’auteur du texte, le comédien, le lecteur, le chanteur, Oswald se lève et s’avance vers le micro. Il dit :

Oswald sniffe de l’essence

Les percussions frappent le texte d’Oswald, le camé qui crie, qui gesticule, qui danse avec les musiciens, qui nargue le pharmacien à qui il réclame du Subutex. Et la musique devient de plus en plus forte :

Nous nous ennuierions moins

La vie d’Oswald nous est ainsi narrée, prise dans la simple parole ou bien enlacée par la partition musicale rageuse ou apaisée ou chantée dans l’énergie du jeune héros. Le vibraphone s’élance parfois seul comme un contre-chant. La musique est comme la sœur d’Oswald, comme lui, elle se moque de la mère, autoritaire, femme de la campagne. La musique s’incarne dans le texte, dans ce qui serait théâtre : Mélissa Acchiardi devient la jeune Lucie qui de sa voix presque murmurée, les yeux clos, énonce le bulletin météorologique et qu’Oswald voudrait aimer. La guitare d’ailleurs plonge dans la réverbération de ses sons comme pour tendre toujours vers l’intimité des mots.

Vient le théâtre. L’ennemi (II) Les deux musiciens s’effacent et Oswald, Samuel Gallet se retire et s’assied dans l’obscurité. Entre en scène avec sa chaise et son micro, le comédien Jean-Phillipe Albizzati alias Elias Ermanet qui, dans son long monologue, joue la folie qui guette son personnage, obsédé par le camé menaçant devant la pharmacie de garde où il travaille la nuit. Il reste seul dans la lumière, écrasé, toujours proche de la chute et prenant à partie le public qui ce soir-là lui répond. Tragique sur le fil du rasoir. La violence peut-elle aller encore plus loin, jusqu’à la mort de l’Ennemi ?

Il ne peut que s’en aller, quitter le plateau. La poésie de Rosa (III) sera à nouveau musique et mots à nu. Le vibraphone sera alors la chair de l’apaisement cosmique et le rock de l’insurrection, du refrain noir « I’m so tired of you old world » s’estompera. Souvenir de Dylan, joueur d’harmonica. Le texte devient pages blanches jetées au sol comme dans le scopitone de 1965 : Don’t’ look back.

350 kilomètres

300 kilomètres

Et justement, il ne faut pas regarder en arrière mais lutter, aller vers le monde, dernier mot du texte. Après la musique, la parole, reviennent le noir et le silence que les applaudissements enthousiastes des jeunes gens, une dernière fois, briseront. Oswald de la nuit peut-être retourne au livre fermé.

Le spectacle, création du Comité 8.1 a été monté pour la première fois au théâtre du Préau, CDR de Vire en mai 2011 et proposé dans diverses versions.

Le texte de Samuel Gallet a fait l’objet d’une recension en février 2013. L’auteur m’a accordé un entretien sur le spectacle et plus largement sur son travail. A retrouver avec La Cause Littéraire.

La programmation du théâtre de la Renaissance à Oullins est largement axée sur des spectacles musicaux ou mêlant la musique à d’autres formes artistiques.

 

Marie du Crest

 

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A propos du rédacteur

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Rédactrice

Théâtre

Marie Du Crest  Agrégée de lettres modernes et diplômée  en Philosophie. A publié dans les revues Infusion et Dissonances des textes de poésie en prose. Un de ses récits a été retenu chez un éditeur belge. Chroniqueuse littéraire ( romans) pour le magazine culturel  Zibeline dans lé région sud. Aime lire, voir le Théâtre contemporain et en parler pour La Cause Littéraire.