Pour les 200 ans de la mort de Carlo Porta (par Jean-Charles Vegliante)
Carlo Porta, milanés : avec le romain Giuseppe G. Belli, son cadet, sans doute le plus important poète dialectal d’Italie ; populaire, fort apprécié de Stendhal. Auteur de sonnets comme son confrère romain, mais aussi de poèmes longs (poemetti), dont l’extraordinaire La Ninetta del Verzee (1814), la confession bouleversante d’une prostituée. Romantique sans illusions, Porta est également l’auteur de poèmes politiques (sa ville bien-aimée fut soumise successivement aux Autrichiens et aux Français, avant la restauration autrichienne), et d’une traduction de la Commedia dantienne en milanais. Il est présent, avec un sonnet anti-français, dans notre Anthologie Amont dévers publiée en ligne par Recours au Poème. Sa poésie a été étudiée et valorisée par le philologue et critique littéraire Dante Isella. Il a été récemment traduit en italien par Patrizia Valduga.
Originaux facilement accessibles, par ex. sur :
https://www.liberliber.it/online/autori/autori-p/carlo-porta/
Scimes, pùres, bordocch, cent pee, tavan,
camol, mosch, pappatás, vesp, galavron,
formigh, zanzar, scigad, vermen, scorpion,
consolev che l’estaa l’è pocch lontan.
Pover bestiolitt ! pover badán !
Mordinn, sciscienn, secchenn, che sii patron,
caghenn in suj pitanz, in sul muson,
crìbbienn i pagn, i frutt, la carna, el gran.
Fee pur quell che ve pias, car bestiolitt,
ché el manch che possem fà pe’ i vost meret
l’è quell de lassav scoeud tùtt i petìtt.
Inscì magara ve vegniss a tàj
De andà a quarter d’inverna in del preteret
De chi loda l’estaa coj soeu regaj.
Carlo Porta (1775-1821), Poesie, ed. Mondadori, 1975
Puces, punaises, mille-pattes et taons,
mites et mouches, culex, guêpes, frelons,
fourmis, moustiques, cigales, vers, scorpions,
courage : l’été est là dans pas longtemps.
Pauvres animalcules, pauvres phalènes !
Mordez, sucez, démangez, c’est vous les maîtres,
déféquez dans nos assiettes, sur nos têtes,
perforez vêtements, fruits, viandes et graines.
Faites ce qu’il vous plaît, adorées bestioles,
car le moins qu’on vous doive pour vos largesses
c’est de laisser libre cours à vos babioles.
Si au moins ça vous suggérait ce tuyau :
de prendre vos quartiers d’hiver sous les fesses
de ceux qui chantent l’été et ses cadeaux !
(trad. J.-Ch. Vegliante)
Jean-Charles Vegliante
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