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Gallimard

Les éditions Gallimard, appelées jusqu’en 1919 les éditions de la Nouvelle Revue française et jusqu’en 1961 la librairie Gallimard, sont ungroupe d'édition français. La maison d'édition a été fondée par Gaston Gallimard en 1911. Le groupe Gallimard est actuellement dirigé par Antoine Gallimard. Considérée comme l'une des plus importantes et influentes maisons d'édition en France, notamment pour la littérature du xxe siècle et contemporaine, Gallimard possède en 2011 un catalogue constitué de 35 prix Goncourt, 36 écrivains ayant reçu le prix Nobel de littérature, et 10 écrivains récompensés du prix Pulitzer.


Les orages, Sylvain Prudhomme (par Delphine Crahay)

Ecrit par Delphine Crahay , le Lundi, 01 Février 2021. , dans Gallimard, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles

Les orages, janvier 2021, 192 pages, 18 € . Ecrivain(s): Sylvain Prudhomme Edition: Gallimard

Les orages est un recueil de nouvelles racontant chacune un moment plus ou moins extraordinaire d’une vie ordinaire, un moment où quelque chose se fissure ou se fêle, grince ou glisse, s’ouvre ou se ferme, pour le pire ou le meilleur – ou pour on ne sait quoi. Si l’on en croit le titre, un orage… qui menace plutôt qu’il n’éclate : ce mot laisse attendre une violence qu’on ne trouve guère dans ces nouvelles, comme si l’auteur n’allait pas au bout de son projet, restait en-deçà, au seuil de l’orage, ouvrant une faille sans y faire tomber personne. Ce qu’on trouve, en revanche, c’est le retour au calme après l’esquisse ou l’idée d’une tempête – on se demande alors ce qui résultera et restera de ces instants d’intensité variable à occurrence unique – et ce qui éclate, ce serait plutôt la vulnérabilité des personnages mis à nu, leur carapace.

Parmi ces récits, assez disparates, certains émeuvent, à des degrés divers, parce que nous connaissons tous, ou connaîtrons un jour, ces instants où a lieu, inopiné, un événement, aussi infime soit-il, qui infléchit ou bouleverse notre existence, qui nous dépouille, un bref ou long moment : ainsi celui où un vieil homme armé d’un taille-haie est pris d’une crise de démence sénile, aussi grotesque que poignante ; ou celui où Awa, une jeune Sénégalaise, se résout à dépenser toutes ses économies pour payer une vaine chimiothérapie à son frère presque mort, et renonce à ses projets, comme si un fatum le lui commandait. D’autres laissent assez indifférent, semblent anodins : ainsi celui où un homme fait l’état des lieux de l’appartement qu’il vient de vendre, songe aux années qu’il y a passées et contemple les traces que lui et sa compagne y ont laissées, ou celui où un homme découvre sa propre tombe au cimetière Lachaise et apprend qu’il ne lui reste que quarante années à vivre.

Cette lumière est mon désir, Rûmî (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 20 Janvier 2021. , dans Gallimard, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Asie, Poésie

Cette lumière est mon désir, Rûmî, novembre 2020, trad. persan, Mahin Tajadod, Nahal Tajadod, Jean-Claude Carrière, 336 pages, 9,50 € Edition: Gallimard

 

Sous-titré Le Livre de Shams de Tabrîz, le présent recueil de poèmes dits par Jaâl al-din Mohammad Balkhi, dit Rûmî (1207-1273) est en fait une sélection de cent poèmes extraits de ce Livre. Poèmes dits plutôt qu’écrits, puisque recueillis de la bouche du maître par ses disciples, ces textes montrent l’évolution du savant vers le mysticisme, c’est-à-dire une union entre l’homme et un principe divin, de la parole au silence.

C’est peut-être cela qui frappe le plus, dans l’agencement voulu par Jean-Claude Carrière, avec l’assentiment de feue Mahin Tajadod et sa fille Nahal, deux connaisseuses fines de l’œuvre de Rûmî : le sentiment d’un voyage, initié par la rencontre avec le derviche errant Shams de Tabrîz, voyage à la rencontre d’une spiritualité détachée de tout savoir (et pourtant savante, mais peut-être bien avant tout savante de ses limites terrestres), voyage dont le terme ne peut être que le silence, évoqué dans l’ultime poème du présent recueil, dont voici les six derniers vers :

Désir, Philippe Sollers (par Claude-Raphaël Samama)

, le Lundi, 11 Janvier 2021. , dans Gallimard, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Désir, mars 2020, 130 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Philippe Sollers Edition: Gallimard

 

Voilà le nouvel opus d’un homme d’âge, toujours éblouissant par sa verve et sa belle insolence, ici un peu cachée ou plutôt masquée. Choisissant de désigner à nouveau son livre comme un roman, par ruse, mépris ou provocation, notre grand auteur s’y avance cette fois bien grimé sous les traits du mystique Louis-Claude de Saint-Martin, illuministe de la fin du 18ème siècle.

On lira alors, comme en une figure de Moebius, le passage de l’un à l’autre, le remplacement subreptice de leurs deux figures sans respect des chronologies, une subtile et permanente identification de l’auteur à son modèle. Il serait question de destin, du marquant des vies à partager, d’une appropriation par affinités transhistoriques, d’un hommage d’admirateur ou de disciple.

Le regard inconnu, Silvia Baron Supervielle (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 05 Janvier 2021. , dans Gallimard, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie

Le regard inconnu, octobre 2020, 110 pages, 12 € . Ecrivain(s): Silvia Baron Supervielle Edition: Gallimard

 

Une femme à sa fenêtre

Ecrire n’est venu à l’esprit de celle qui était encore adolescente que progressivement : « J’écrivais des poèmes et des contes en espagnol, mais je ne pensais pas sérieusement à écrire ». C’est même après son arrivée en France que tout commence réellement et ce, au moment où elle passe de sa langue maternelle au français : « J’ai pas mal tardé à changer de langue. Pour faire plaisir à mes amis, qui voulaient lire quelque chose de moi, je me suis mise à écrire en français. Ça m’a beaucoup plu, je voyais les choses d’une autre façon ».

Le passage d’une langue à l’autre en effet n’est jamais de l’ordre du simple transfert mais de l’infusion. Et l’auteure dans sa nouvelle langue donne à sa langue de jeu un caractère moins baroque. Cela resserre sa pensée là où comme chez Beckett s’instruit un travail d’économie lexicale et aussi de solitude essentielle que fomente l’exil. Toutefois il n’exclut pas l’autre mais l’appelle.

Le Bois, Jeroen Brouwers (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 04 Janvier 2021. , dans Gallimard, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays nordiques, Roman

Le Bois, Jeroen Brouwers, octobre 2020, trad. néerlandais Bertrand Abraham, 352 pages, 22 € Edition: Gallimard

 

Du ressentiment au couvent

Il faut imaginer un lieu au nord de l’Europe, une région au parler rugueux, à l’atmosphère brumeuse ou neigeuse. Il faut imaginer encore un lieu quelque peu perdu, une petite ville minière, tout près de la frontière allemande dans le Limbourg, province catholique dans la Hollande protestante. Il faut imaginer également une époque, celle des années 50, au sortir de la guerre, engoncée dans ses conventions, son conformisme et ses préjugés. Et dans ce cadre spatio-temporel, il faut enfin imaginer un pensionnat de garçons, tenu par des franciscains, un ordre monacal qu’on appelle des « frères mineurs » ou encore un « ordre mendiant ».

A tous ceux qui ont connu l’expérience du réfectoire, des salles d’études ou du dortoir en internat ou la promiscuité d’une chambrée, ce livre de Jeroen Brouwers rappellera quelques souvenirs, bons ou mauvais, traumatiques peut-être. Des récits de collège abondent dans la littérature (Musil, Vallès, Montherlant, pour les classiques), à croire que ces lieux de confinement accentuent les tensions humaines et exacerbent désirs et passions, mais ce récit du romancier hollandais dénote particulièrement par la noirceur du ton.