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Seuil

Les Éditions du Seuil sont une maison d'édition française créée en 1935.

Maison très respectée dans le milieu de l'édition, entretient de bons rapports avec ses auteurs. Elle a notamment publié les œuvres de Jacques LacanRoland BarthesPhilippe Sollers (première période) ou plus tard Edgar MorinMaurice Genevoix ou Pierre Bourdieu.

Jaune, Histoire d'une couleur, Michel Pastoureau (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Jeudi, 23 Janvier 2020. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts, Histoire

Jaune, Histoire d'une couleur, octobre 2019, 238 pages, 39 € . Ecrivain(s): Michel Pastoureau Edition: Seuil

Quel courage a eu Michel Pastoureau en s’attachant à réaliser un livre entier sur la couleur jaune, qui ne recueille l’ensemble des suffrages ni dans l’histoire ni autour du monde. Pourtant, la couleur jaune avait ses lettres de noblesse dans l’Antiquité : les Grecs, les Romains, les Celtes et les Germains lui accordaient une haute importance symbolique et religieuse, en l’associant à la lumière, à l’or et à l’immortalité. C’est le Moyen Âge qui témoigne de son déclin, ou plutôt de son ambivalence. Michel Pastoureau étudie la lente décroissance de la valeur accordée à la couleur jaune au fil du temps, mais aussi ses rapports avec les autres couleurs auxquelles elle est liée (l’ocre, le vert, l’orangé, le gris et le rose) et les objets qu’elle représente symboliquement.

Depuis les pigments ocres du Paléolithique supérieur et le métal jaune (l’or) du Néolithique et de la Rome antique (monnaie, objets précieux retrouvés dans les tombes…), la préhistoire, l’Antiquité et la mythologie accordent à la couleur jaune un effet bénéfique : la Toison d’or de Jason, les richesses du roi Midas, les pommes d’or du jardin des Hespérides lui sont associées. Les cultes solaires (Rê, Hélios, Artémis, Apollon) magnifient le jaune et lui rendent hommage, ainsi que, plus prosaïquement, le safran, épice rare employée en cuisine, mais aussi en médecine, en parfumerie et en teinture. L’étoffe jaune est la parure d’Artémis et des femmes.

Contes des sages persans, Leili Anvar (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 04 Décembre 2019. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Asie, Contes

Contes des sages persans, Leili Anvar, novembre 2019, 240 pages, 19 € Edition: Seuil

 

Du fabuleux, du révéré

Chacun des trente-deux contes de ce recueil, traduits par Leili Anvar, commence par le leitmotiv « Il était une fois, et il n’était pas, sous la voûte azurée, au pays d’autrefois », litote poétique à la manière de la trame narrative que tisse Shéhérazade au long des Mille et une nuits. Le premier conte persan parle de la beauté absolue d’une reine (brune) dont la vue tue, telle une déesse antique, Méduse qui ensorcelle, stupéfie et foudroie ceux qui la regardent, ou Narcisse au féminin qui ne se noie pas dans son reflet mais le re-duplique afin que rayonne sa splendeur aux yeux de tous, par l’intermédiaire d’un miroir. Plus loin dans l’ouvrage, c’est l’éléphant, révéré par les Bouddhistes, ou bien incarnation de Ganesh, qui est sujet à controverse et admiration : « Ainsi, nous verrons dans l’éléphant le pilier, l’éventail, la gouttière, les branches du trône et davantage… », qui rappelle, en cela, le mythe de la caverne et celui de la révélation :

Amazonia, Patrick Deville (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 29 Août 2019. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Amazonia, août 2019, 304 pages, 19 € . Ecrivain(s): Patrick Deville Edition: Seuil

 

Peut-on parler de « roman » à propos de ce livre ? Jacques Lacan se demandait un jour dans quelle encyclopédie on pouvait trouver l’encyclopédie qui contient toutes les encyclopédies. Peut-être est-ce là la tentative (pathétique) de Deville.

Commençons par dire que, de la plume de Deville, on ne doit pouvoir compter que 15 à 20% (au mieux) de ce livre. Le reste, tout le reste, est visiblement un assortiment de copiés/collés venus d’œuvre diverses, de livres d’histoire, de livres de voyages, de biographies etc. Une sorte de macédoine – hélas des plus indigestes – de bouts d’œuvres plus ou moins connues, essentiellement obscures, dont la longue liste mise en fin d’ouvrage ne dit à aucun moment quel morceau vient de quelle œuvre – ce qui constitue une bien étrange conception du référencement littéraire.

Régulièrement, on a même droit à des pages entières du genre Wikipédia et son éphéméride. Pardon d’avance pour la relative longueur de la citation mais elle s’impose, d’autant que Deville y avoue au début toute la méthode de son travail (« je reprenais ces histoires assemblées autour d’Iquitos »). Il s’agit donc ici de l’année 1860.

Des vies possibles, Charif Majdalani (par Théo Ananissoh)

Ecrit par Theo Ananissoh , le Mardi, 18 Juin 2019. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Des vies possibles, janvier 2019, 185 pages, 17 € . Ecrivain(s): Charif Majdalani Edition: Seuil

 

Rien n’est écrit d’avance, nous le savons ; mais le pensons-nous vraiment ? Le sens des vies ou des choses grandes ou petites, individuelles ou collectives est a posteriori ; et encore, c’est une interprétation – variable, changeante – de l’esprit humain. L’homme est désorienté ou même en proie à la peur s’il ne donne pas sens et cohérence à l’enchaînement aléatoire des « petits incidents, des hasards minuscules, des accidents insignifiants ». Ainsi médite Raphaël Arbensis vers la fin de sa vie alors qu’il met la dernière main à son introduction à l’Histoire universelle d’al-Hamadani.

« En regardant sa femme enceinte, Raphael sent l’immensité de son bonheur. Il remonte le fil de sa vie pour essayer de trouver le moment où la trajectoire vers ce bonheur a débuté, sans y parvenir : c’est sans doute sa maladie à son arrivée à Saïda qui lui a permis de se trouver un jour en présence de Mariam, mais il n’aurait pas été malade à Saïda s’il n’était pas venu en Arabie, et il ne serait pas venu en Arabie s’il n’avait pas connu Dupuy, avec qui il ne serait pas associé s’il n’avait été dans le désarroi après l’embuscade de Vicence, et peut-être alors que son bonheur n’aurait pas été concevable s’il n’avait perdu son bras… ».

Révoltée, Evguénia Iaroslavskaïa-Markon (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 20 Mai 2019. , dans Seuil, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Russie, Biographie, Récits

Révoltée, trad. russe Valérie Kislov, 176 pages, 16 € . Ecrivain(s): Evguénia Iaroslavskaïa-Markon Edition: Seuil

 

« Mon autobiographie » est le récit hallucinant d’une vraie « révoltée » contre les abus d’une société communiste et qui va le payer très cher. Le parcours de cette jeune Russe, née en 1902 et exécutée en 1931, appelle tous les qualificatifs : extraordinaire, terrifiant, naturaliste en diable, affolant de vérité.

Dès l’adolescence, Evguénia s’oppose, se rebelle, se voit exclue du secondaire ; elle est une âme qui bout sans cesse, exalte la franchise, décourage les tièdes. Entre Moscou et Leningrad, sa vie connaît une foultitude de soubresauts.

Epouse du poète Alexandre  Iaroslavski (1896-1930), elle explique dans son autobiographie comment elle en est arrivée à défier tous les pouvoirs. Dès les années 20, le couple connaît nombre d’intimidations, d’exils (voyage à Berlin, Paris), d’arrestations, d’assignations à résidence. Le poète terminera son parcours dans les camps des îles Solovki. Sa femme, condamnée, sera exécutée. Elle avait vingt-neuf ans.