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Folio (Gallimard)

Collection de poche des éditions Gallimard

 


Nous sommes à la lisière, Caroline Lamarche (par Delphine Crahay)

Ecrit par Delphine Crahay , le Mardi, 09 Mars 2021. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Nous sommes à la lisière, Caroline Lamarche, janvier 2021, 176 pages, 6,90 € Edition: Folio (Gallimard)


Les frontières sont poreuses qui séparent les êtres humains des animaux, les vies dans le rang des vies hors champ, la joie de la peine, la réalité de l’imaginaire, l’amour de l’anamour. C’est à leurs lisères, dans les marges, qu’ont lieu les neuf nouvelles qui constituent ce recueil, dont la plupart sont racontées par leur protagoniste et ont pour titre le prénom de l’animal qui y apparaît.

Ces narrateurs et personnages sont au bord de quelque chose – un amour, un changement, une révélation, une chute … – et au milieu de leur détresse. Au fil des pages, leurs fragilités se dévoilent, leur vulnérabilité affleure, et nous nous reconnaissons dans leurs vacillements et dans leurs failles, dans leurs vies en sourdine, en pointillés. Ils les racontent sans fard et sans emphase, avec une sobriété, une simplicité et une justesse qui émeuvent et interrogent. Dans le premier de ces récits, une cane nommée Frou-Frou se prend d’affection, si on peut dire, pour le protagoniste – et ses ardeurs sont aussi surprenantes et inexpliquées que son départ soudain.

La vérité sort de la bouche du cheval, Meryem Alaoui (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 26 Février 2021. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Maghreb

La vérité sort de la bouche du cheval, Meryem Alaoui, 303 pages, 21 € Edition: Folio (Gallimard)

 

« Qu’est-ce qu’écrire ? », « Pourquoi écrire ? », « Pour qui écrit-on ? », demandait Sartre dans Qu’est-ce que la littérature ?

Si on applique ces trois questions à ce roman de Meryem Alaoui, on peut répondre :

Ecrire, pour Meryem Alaoui, c’est peindre au couteau, à grands traits, à mots tranchants, sans retenue, hors de toutes les lois du genre, sa vision d’un microcosme social à l’intérieur de quoi, justement, les lois du pays, et les règles morales qu’il affiche, sont totalement caduques.

Pourquoi écrire ? Ici, c’est pour dénoncer, pour dévoiler, pour témoigner, pour mettre en scène, voire en obscène, sous la lumière violente d’une

écriture crue, impitoyable, la cruauté quotidienne de l’existence couramment occulte de communautés marginalisées.

L’Intrus, William Faulkner (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 02 Février 2021. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

L’Intrus – Intruder in the Dust (1948), Folio, traduit de l'américain par R.N. Raimbault et Michel Gresset . Ecrivain(s): William Faulkner Edition: Folio (Gallimard)

 

L’IntrusIntruder in the Dust (1948) – est l’un des romans tardifs de Faulkner, bien après ses monuments, Le Bruit et la Fureur, Lumière d’août, Absalon, Absalon, Tandis que j'agonise.

Le maître du Sud est encore au milieu de son œuvre littéraire même si les chefs-d’œuvre majeurs sont passés. L’Intrus, néanmoins, garde toute la puissance narrative et l’incroyable art du portrait que l’on connaît inégalables. Et, par-dessus tout – au-delà des situations burlesques, parfois hilarantes, autour desquelles se construit ce roman, L’Intrus est une réponse cinglante et définitive aux lecteurs trop hâtifs qui n’ont pas su voir, dès Lumière d’août (Light in August, 1932), où se situe William Faulkner dans l’idéologie poisseuse du Sud – faite de haine, de racisme, de misogynie, d’abrutissement : L’Intrus est un plaidoyer vibrant et splendide contre la bêtise et la violence des « Rednecks », une profession de foi universelle, une déclaration d’amour aux « autres » Sudistes – les Nègres comme ils disent.

Le Comte de Monte-Cristo, Alexandre Dumas (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 13 Janvier 2021. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Le Comte de Monte-Cristo, novembre 2020, 1264 pages, 12,90 € . Ecrivain(s): Alexandre Dumas Edition: Folio (Gallimard)

 

Avant toute chose, célébrons la prouesse technique : Le Comte de Monte Cristo, pour des générations de lecteurs, ça a été deux forts volumes, parfois vieillis parce que lus et relus par une génération précédente, que ce soit au Livre de Poche, en Garnier Flammarion, chez Folio ou chez Marabout – et voici que Folio, à l’occasion du cent cinquantième anniversaire de la disparition d’Alexandre Dumas, le propose en un seul volume. On imagine le travail de mise en page, les difficultés à surmonter : que le texte soit lisible mais que les pages ne se décollent pas au fil de la lecture, bref que le plaisir de lire soit vraiment au rendez-vous. Il l’est, par le choix d’un format légèrement hors normes (plus grand que les Folio habituels, plus petit que les Quarto de chez Gallimard), tout en évitant le problème de lisibilité posé par les volumes de la Pléiade par exemple, et qui permet de savourer à nouveau ce grand roman – mais d’une seule traite.

Du côté de Canaan, Sebastian Barry (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 05 Janvier 2021. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Du côté de Canaan (On Canaan’s Side, 2011) traduit de l’anglais (Irlande) par Florence Lévy-Paoloni, 331 p. . Ecrivain(s): Sebastian Barry Edition: Folio (Gallimard)

Sebastian Barry est irlandais jusqu’au bout des doigts. Et de la plume. Ses héros de Des jours sans fin, empêtrés dans les guerres sanglantes de l’Amérique, gardaient tous deux la terre d’Irlande à la semelle de leurs bottes. Et dans le roman qui nous occupe, c’est encore ce pont historique entre l’Irlande et les États-Unis que la narration traverse, aux côtés de la vieille Lilly.

Lilly est la narratrice ou, plus exactement, la plume de Sebastian Barry car elle ne se contente pas, à 89 ans, de raconter son histoire mais elle l’écrit, sur un carnet de notes, assise à une table en formica rouge. C’est donc ce récit écrit que nous lisons, ce qui donne une puissance toute particulière à ce roman car l’écriture de « Lilly » donne « du temps au temps » et permet des exercices de style virtuoses, dont on sait que Barry est friand. Les souvenirs, irlandais, puis américains, de cette « oie sauvage »*, déferlent en un flot lent, méandreux, d’une précision mnésique parfaite. La force narrative de Barry tient essentiellement dans ce style, en phrases longues, souvent très longues, mais toujours animées d’un grand dynamisme intérieur et d’une parfaite clarté. Cette écriture ample serpente autour du récit de Lilly, lui fait un précieux écrin, rend les événements saillants quand ils viennent interrompre momentanément le fleuve narratif.