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Folio (Gallimard)

Collection de poche des éditions Gallimard

 


Le Royaume de Pierre d’Angle, Tome 1, l’Art du Naufrage, Pascale Quiviger (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 12 Juillet 2023. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Fantastique

Le Royaume de Pierre d’Angle, Tome 1, l’Art du Naufrage, Pascale Quiviger, Folio, mars 2023, 496 pages, 9,70 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Ouvrons sur une taquinerie de lecteur attentif : dans un univers de type médiéval, Quiviger fait dire à un personnage le mot « résilience » (page 463) ; c’est une maladresse lexicale, et l’on en sourit – parce que c’est bien le seul défaut à la cuirasse narrative de ce premier tome du Royaume de Pierre d’Angle que l’on ait trouvé. Enfin, on en connaît un autre, qui est en fait une grande qualité : sa dernière page, qui donne envie de se jeter sur ses trois successeurs afin de connaître la suite et la fin des aventures du prince Thibaut et sa fascinante femme, Ema Beatriz Ejea Casarei. Bien sûr, puisqu’on est au fait des codes de la fantasy, on se doute schématiquement de cette suite et de cette fin, et cette connaissance des codes en question nous a d’ailleurs déjà fait lâcher maints volumes récemment publiés. Mais impossible de laisser choir L’Art du Naufrage, qui a envoûté dès la première page et qu’on a lu goulûment, chaque pause, au travail, à la maison, même brève, étant l’occasion de quelques pages au moins.

Les enfants de Cadillac, François Noudelmann (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 11 Juillet 2023. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Recensions, La Une Livres, Biographie

Les enfants de Cadillac, François Noudelmann, Gallimard, Folio, mai 2023, 234 pages, 8,70 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Quel sens peut avoir pour un individu la recherche de ses origines ? A quelle sorte de besoin cette quête, parfois vécue comme une nécessité, répond-elle foncièrement ? Ne peut-on vivre sans arbre généalogique, sans se raccrocher sentimentalement, intellectuellement, virtuellement, à ses ascendants et à la communauté, sociale, géographique, ethnique, religieuse, nationale, culturelle au sein de laquelle ils sont nés et/ou ont vécu ? Quel héritage, autre que matériel s’il en est, nos père et mère et leurs aïeux nous ont-ils véritablement « transmis » ? En quoi ce dont ils ont eux-mêmes hérité est-il purement et réellement identique à ce qui a pu être « l’identité » de chacun des individus figurant sur les branches, principales et adventices, et sur chacun des niveaux généalogiques de ceux et celles des générations qui les ont précédés et finalement engendrés ?

Telles sont, entre autres, les questions que (se) pose François Noudelmann dans cette relation autobiographique d’une vie qui semble avoir été épisodiquement marquée à la fois, de façon paradoxale,

Minuit moins une, Sébastien Le Jean (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 27 Juin 2023. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Recensions, Polars, La Une Livres

Minuit moins une, Sébastien Le Jean, Folio Policier, avril 2023, 461 pages, 9,70 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Tandis que Ronan Sénéchal, commandant à la Crim s’adonne aux joies nouvelles de la paternité, en accueillant avec sa toute jeune femme, Nathalie, la venue au monde de son fils Gaspard. Tandis que cet homme cassé par sa vie de flic célibataire décide de changer sa manière d’être en acceptant d’obéir à ses sentiments. De partager, ce qui lui était inconnu jusqu’alors, un amour sans limite avec son épouse et de s’autoriser à s’abandonner à la tendresse qu’il ressent pour son bébé nouveau-né, de pouponner, le Bastion (ex 36 quai des orfèvres) le ramène au principe de réalité en lui rappelant qu’il fait toujours partie de la maison. La tête encore dans les nuages, il apprend la découverte du cadavre d’un PDG, géant de l’industrie automobile faisant partie du CAC 40, Dampierre, assassiné dans une résidence située en région parisienne, dans un bunker hautement sécurisé, conçu pour survivre à l’éventuelle fin du monde. La mort d’un riche industriel ne laissant pas le procureur de la république indifférent, surtout lorsque la victime porte gravé dans la chair de son dos : « Les rats quittent le navire/Les coupables paieront/La terre sera purifiée/Le déluge arrive », ce dernier charge le commandant de police de résoudre cette affaire au plus vite.

Manhattan Transfer, John Dos Passos (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 19 Juin 2023. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, En Vitrine, Cette semaine

Manhattan Transfer, John Dos Passos, Folio, février 2023, trad. anglais (USA) Philippe Jaworski, 544 pages, 9,70 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Grâces soient rendues à Philippe Jaworski, dont on peut de bon droit estimer qu’il a souffert, enfant, adolescent et adulte, de traductions pénibles d’ouvrages anglo-saxons, puisqu’il soigne depuis des années cette souffrance en rendant justice à ces ouvrages ! Et pour le coup, on soupire d’aise : il était grand temps que Manhattan Transfer, le cinquième roman de John Dos Passos et, au passage, l’un des plus importants romans de la modernité soit proposé en français autrement que dans la langue guindée et purificatrice de Maurice-Edgar Coindreau. Certes, ce dernier a œuvré pour la reconnaissance de la littérature anglo-saxonne en France, d’Ernest Hemingway à William Faulkner ou de John Steinbeck à Erskine Caldwell, mais qu’est-ce qu’il pouvait élaguer ! On rêve ainsi à lire Le Petit arpent du bon Dieu en français dans toute sa virulence…

Pour Manhattan Transfer (1925), c’est donc désormais chose faite, que ce passage de l’anglais d’un New York populaire à un français assoupli de ses convenances, et on peut pleinement goûter le propos de John Dos Passos. Jugeons sur pièce avec un paragraphe saisissant, celui de l’accident du livreur de lait Gus, conclusion du second chapitre :

Silas Marner, Le tisserand de Raveloe, George Eliot (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 08 Juin 2023. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Silas Marner, Le tisserand de Raveloe, George Eliot, Folio, janvier 2023, trad. anglais, Pierre Leyris, Alain Jumeau, 368 pages, 9,20 € Edition: Folio (Gallimard)

Au dix-neuvième siècle, deux George se partagent la renommée littéraire : Sand, la Française, et Eliot, l’Anglaise, et la seconde admirait l’œuvre de la première. D’ailleurs, à certains égards, cette admiration transparaît dans Silas Marner (1861) : il y a de La Mare au diable et de La Petite Fadette, ces beaux récits ruraux publiés quatorze et douze ans auparavant, dans cette évocation d’une rude campagne anglaise où la solitude et l’habitude semblent la règle, et que survienne une belle exception à cette règle !

Reprenons. Silas Marner est le troisième roman de George Eliot, qui vient de rencontrer le succès critique et public avec Le Moulin sur la Floss juste un an auparavant : à cette vaste fresque d’un amour tragique succède un récit plus bref, resserré, dont les quelque deux cents premières pages manuscrites effrayeront l’éditeur lorsque l’autrice les lui enverra – trop sombres, trop tragiques. Ses craintes s’avéreront vaines : le troisième tiers de Silas Marner est lumineuse, comme cela advient régulièrement dans le roman anglais du dix-neuvième siècle ; aux Français les fins désespérantes, aux Anglais la rédemption finale.