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Folio (Gallimard)

Collection de poche des éditions Gallimard

 


Rue des Syriens, Raphaël Confiant

Ecrit par Patryck Froissart , le Samedi, 19 Avril 2014. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Rue des Syriens, Octobre 2013 (pour lm'édition Folio) 384 pages . Ecrivain(s): Raphaël Confiant Edition: Folio (Gallimard)

 

Chaque roman de Raphaël Confiant constitue un menu des plus goûteux.

Truculence et succulence sont deux termes qui s’imposent, une fois de plus, au lecteur amené à savourer celui-ci.

Car c’est bien de langue qu’il s’agit d’abord. De cette langue pimentée que Confiant manie d’une façon inimitable, de cette langue qui est celle de son peuple, de son île, de son pays, de cette langue qu’il partage et dont il revendique fièrement l’héritage, de cette langue qu’il s’approprie, qu’il pétrit, qu’il métisse, qu’il assaisonne de condiments culturels d’origines diverses, qu’il fait sienne, et qui se révèle sous sa plume une langue au goût exquis, une langue qui fait saliver de plaisir, une langue de grande et belle littérature.

Et puis il y a l’histoire.

Clair de femme, Romain Gary

Ecrit par Sophie Galabru , le Vendredi, 11 Avril 2014. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Clair de femme, 180 p. 7,90 € . Ecrivain(s): Romain Gary Edition: Folio (Gallimard)

 

Le désespoir c’est n’avoir plus foi en rien, même en ses « incroyances ». C’est ainsi que nous pourrions donner la note de Clair de femme, à partir de laquelle se décline un véritable hymne à la vie envers et contre tout. Le livre porte très haut ce ton si particulier à Gary, du désespoir heureux, loin du cynisme et de l’ironie de ceux encore trop attachés à leurs illusions. Le désespoir sans gravité ni aigreur, celui qui n’est que la vie qu’on porte malgré soi.

Et parce qu’il y a d’innombrables vies, il y a autant de façons de vivre son désespoir. Il y a la possibilité du pathétique, à l’image de Señor Galba que rencontre le narrateur, Michel, dès le début du livre, pauvre clown dresseur, si fier de son caniche teint en rose à qui il apprend à danser un sublime paso-doble avec un chimpanzé « un numéro mondialement connu. Des années d’efforts… L’œuvre d’une vie ». L’humour immanquable de Gary, au creux des délires, des croyances, et des petits combats toujours un peu minables face à l’imperturbabilité de la vie, de ses forces obscures, anonymes, sans égard pour chacun.

Amok, Stefan Zweig

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 29 Janvier 2014. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Nouvelles

Amok, septembre 2013, traduit de l’allemand Bernard Lortholary, présentation et notes de Jean-Pierre Lefebvre, 140 p. 3,50 € . Ecrivain(s): Stefan Zweig Edition: Folio (Gallimard)

 

Confession d’un désespéré, cette nouvelle de Zweig parue en 1922 plonge le lecteur dans les sombres abysses du remords et de la folie.

Le temps de l’écriture s’inscrit dans le contexte trouble et perturbé des grands bouleversements sociaux et moraux de l’immédiate après-guerre, du rayonnement des thèses de Freud, dont Zweig est un admirateur inconditionnel et avec qui il échangera pendant plus de trente ans une copieuse correspondance, et des questions posées par le surréalisme sur la relation entre le rêve et la réalité, entre le conscient et l’inconscient dans la création littéraire.

Le temps du récit est antérieur, son dénouement étant précisément daté de mars 1912.

L’espace du récit cadre est clos. Nous sommes sur un paquebot, l’Oceania, où le narrateur premier, homodiégétique selon la classification de Genette, reçoit la confession, découpée comme un feuilleton, racontée en plusieurs nuits dans l’obscurité déserte et fantomatique du pont d’avant, du narrateur second, un médecin colonial en fuite tentant de regagner clandestinement son Europe natale.

De Lénine à Gagarine, Alexandre Sumpf

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mercredi, 23 Octobre 2013. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Histoire

De Lénine à Gagarine, Folio/Histoire, avril 2013, 944 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Alexandre Sumpf Edition: Folio (Gallimard)

 

Une histoire sociale de l’URSS

Il est sans conteste que cette gigantesque étude permet au lecteur de mieux appréhender les vicissitudes de l’histoire de la Russie, de la Révolution Russe de 1917 à la « révolte » de Novotcherkassk en 1962. Dès l’« Avant-propos », l’auteur donne le ton à son étude :

« Début juin 1962, la ville soviétique de Novotcherkassk s’embrase comme jamais dans son histoire. Pendant trois jours, ses habitants vivent dans une atmosphère confuse où se mêlent intense désespoir et espoir démesuré. Des personnes qui ne se connaissaient pas occupent les rues, la foule s’empare des principaux lieux du pouvoir, réclame à voix haute le droit à vivre mieux, dignement, justement ».

S’emparant de cet événement, Alexandre Sumpf remonte dans le temps et étudie ces soubresauts sociaux qui ont été des ondes de choc en Russie depuis la Révolution de 1917. Il s’attarde sur les motivations et les répercussions sociopolitiques sur ce ballet agressif entre les gouvernants et les gouvernés afin de faire émerger les zones de compromis qui ont dû être mises en place pour maintenir en équilibre un pouvoir souvent contesté et très attaqué par la masse des anonymes.

Suicide, Edouard Levé

Ecrit par Marie du Crest , le Mardi, 08 Octobre 2013. , dans Folio (Gallimard), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Récits

Suicide, 112 pages, 4 € . Ecrivain(s): Edouard Levé Edition: Folio (Gallimard)

Le 15 octobre 2007

Suicide est un tout petit livre de poche. Suicide est un très grand livre dont on ne se remet pas, dont on ne revient pas. Et sa légende éditoriale : la remise du manuscrit à l’éditeur P.O.L. quelques jours avant la mort par suicide de l’auteur, n’est qu’une ouverture cérémonielle.

Suicide n’est pas un tombeau, un tombeau littéraire qui proclame un nom, un vivant. De qui parle-t-on ? d’un sobre « tu » que nous voudrions à tout prix appeler Edouard Levé ? Mais nous croisons aussi un « je », celui qui dit, celui qui parle. Le suicide ici n’a pas de mode d’emploi (ouvrage cité par Levé à la première ligne d’Autoportait). Tout sera dans le flottement trouble comme dans la série de photos où l’homonymie du personnage célèbre et du quidam rend le contemplateur incertain. Le « je » et le « tu » sont comme des jumeaux (Levé a intitulé une de ses photos « autojumeaux », photo en double autoportait). En effet, ils ont étudié tous deux les sciences économiques en passant par les classes préparatoires ; ils pratiquent les mêmes sports ; ils roulent en voiture et en moto ;  ils aiment le rock ; ils ont un frère et une sœur ; politiquement, ils sont écologistes ; ils sont mariés sans enfant… Mais à quoi bon savoir si c’est bien lui Levé ? Il ne reconstitue pas. Il ne fait pas acte de biographie ou d’autobiographie, de récit de vie. Il « gèle » des moments de la vie de l’ami suicidé :