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Joelle Losfeld

Tout ce qui brûle, Lisa Harding (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 13 Mai 2022. , dans Joelle Losfeld, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Tout ce qui brûle, mars 2022, trad. Irlandais, Christel Gaillard-Paris, 331 pages, 22 € . Ecrivain(s): Lisa Harding Edition: Joelle Losfeld

Tout ce qui brûle est le roman d’un personnage féminin en combustion dans le contexte volontairement flou d’une Irlande moralisatrice, socialement conservatrice et structurellement patriarcale.

Sonya, après des débuts prometteurs sous les feux des projecteurs dans une carrière de comédienne interrompue dans des circonstances qui ne sont pas communiquées de façon précise, vit seule avec ses deux « garçons » : son fils, Tommy, à qui elle voue un amour fusionnel, âgé d’un peu plus de quatre ans quand commence le récit, et le chien Herbie, qui est, de jour comme de nuit, compagnon de toutes les activités (jeux, promenades, sieste, repas, télévision). Mais Sonya est alcoolique. Son comportement de plus en plus anticonformiste, antisocial, épié par une voisine « qui lui veut du bien », ouvertement réprouvé par les bien-pensants du village, finit, estiment les quelques témoins de ses transes éthyliques, par mettre en danger tant sa propre vie que celles de son fils et de leur compagnon canin. Sur intervention de son père, avec qui elle a peu de contact mais qui semble la faire perpétuellement surveiller, Sonya est placée dans une institution religieuse spécialisée dans la désintoxication, et Tommy et Herbie sont envoyés séparément dans des lieux d’accueil dont on refuse de dévoiler la localisation à l’actrice privée momentanément, à son profond désespoir, de ses droits parentaux et de sa liberté de mouvements.

Une arche de lumière, Dermot Bolger (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 13 Avril 2022. , dans Joelle Losfeld, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Une arche de lumière, Dermot Bolger, janvier 2022, trad. anglais (Irlande) Marie-Hélène Dumas, 460 pages, 23 € Edition: Joelle Losfeld

 

Eva Goold Verschoyle est née dans le comté de Donegal, l’un des trois comtés d’Ulster qui ont été intégrés dans la République d’Irlande lors de la proclamation d’indépendance. Elle épouse en 1927 Freddie Fitzgerald, héritier d’une dynastie de hobereaux locaux dont la perte de puissance et de richesse matérielle est symbolisée par la décrépitude de ce qui subsiste du domaine et de la grande demeure ancestrale, et par la claudication de son propriétaire.

Ayant dû renoncer à sa vocation de devenir une artiste peintre, elle s’oblige à mener pendant vingt-deux ans une existence de femme au foyer que seul l’amour qui la lie à ses deux enfants, Francis et Hazel, l’aide à supporter. Dès qu’ils partent de la maison pour aller vivre leur vie, elle quitte son mari pour ouvrir en ville une modeste école d’art pour enfants. C’est cette scène de rupture, sans cris, sans larmes, sans violence, qui constitue le premier chapitre proprement intitulé Le départ.

Des milliers de lunes, Sebastian Barry (par Marie Duclos)

, le Mercredi, 08 Septembre 2021. , dans Joelle Losfeld, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Des milliers de lunes, août 2021, trad. irlandais, Laetitia Devaux, 240 pages, 21 € . Ecrivain(s): Sebastian Barry Edition: Joelle Losfeld

 

Lorsque l’on referme ce livre, on s’attend à tourner la tête et croiser le regard curieux et mélancolique de Winona Cole, orpheline indienne lakota, sur son mulet à la lisière d’une forêt. Son personnage est riche de ses origines mélangées à sa drôle d’éducation par deux hommes qui après avoir été soldats travaillent dans une ferme qui ne leur appartient pas. Nous sommes dans le Tennessee au cours des années qui suivent la guerre de sécession.

Très vite le lecteur vit les relations de ces personnes pauvres qui font au mieux pour élever Winona en compagnie de Lige, le propriétaire de la ferme, et Rosalee, ancienne esclave, et son fils, et qui travaillent dur. Les sentiments et émotions de chacun sont analysés avec le regard à la fois acéré́ et tendre de la jeune indienne. Le texte allie ainsi légèreté́, profondeur et poésie. La société́ américaine après la guerre est nourrie de violence à l’égard des indiens et des anciens esclaves. Les réflexes identitaires sont très présents.

Miniature ou Les Mémoires de Miss M., Walter de la Mare (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Lundi, 17 Mai 2021. , dans Joelle Losfeld, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Miniature ou Les Mémoires de Miss M., Walter de la Mare, trad. anglais, Christiane Guillois, Florence Lévy-Paoloni, 578 pages, 20,30 € Edition: Joelle Losfeld

 

De prime abord, on sera surpris de savoir que ce roman a pour héroïne une naine. Le talent de Walter de la Mare sait pourtant nous la rendre proche, déployant à l’intérieur du personnage une richesse d’esprit et d’émotions qui, même au-delà de sa taille « hors normes », en fait un caractère proprement exceptionnel.

Le roman nous livre les mémoires fictifs de Miss M., légués à Walter Dadus Pollacke (l’un des rares amis qu’a connus notre héroïne) après que celle-ci a été, selon ses propres termes, « appelée ». Ces mémoires s’arrêtent tout spécifiquement sur la période la plus déterminante de son existence, alors qu’elle a vingt ans, « ces douze mois de ma vie les plus mouvementés, les plus heureux, les plus cruels, les plus chers et les plus noirs ». Très tôt, Miss M. connaît l’épreuve de la douleur en perdant, à peu de temps d’intervalle, sa mère et son père. Contre une somme mensuelle perçue sur l’héritage dont elle dispose, elle est logée et nourrie chez Mrs Bowater.

Elmet, Fiona Mozley (par Catherine Blanche)

Ecrit par Catherine Blanche , le Mardi, 05 Mai 2020. , dans Joelle Losfeld, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Elmet, Fiona Mozley, janvier 2020, trad. anglais, Laetitia Devaux, 237 pages, 19 € Edition: Joelle Losfeld

 

Ce récit, qu’on prendrait de prime abord pour un conte aux accents bucoliques s’avère être un brûlot social, une tragédie des temps modernes.

Le Comté du Yorkshire est le lieu d’enfance de Fiona Mozley. C’est aussi celui où se déroule cette histoire.

Pas un hasard assurément.

Il suffit de fouiner un peu dans les cinquante dernières années de ce coin d’Angleterre pour mesurer l'ampleur de sa paupérisation : fermetures de sites industriels, âpres luttes de classe, révoltes ouvrières musclées, chômage de père en fils ; alcool et misère ravageant le pays. Il s'y ajoute des « faits divers » donnant froid dans le dos : violeurs et éventreur ont abreuvé ces terres avec des larmes et du sang. Des faits qui ne peuvent que hanter longtemps les esprits et générer des peurs…