Identification

La Table Ronde

Maison fondée en 1944 par Roland Laudenbach et ainsi nommée par Jean Cocteau.

 


À mon très cher ami. Petite anthologie des dédicaces de la littérature française, réunies et présentées par Jean-Christophe Napias

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 15 Janvier 2018. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Anthologie

À mon très cher ami. Petite anthologie des dédicaces de la littérature française, novembre 2017, 608 pages, 19,50 € Edition: La Table Ronde

 

Le fait de dédier un livre à quelqu’un est une pratique ancienne, remontant à l’Antiquité. Saint Luc, un écrivain hellénisé, a dédié son évangile et les Actes des Apôtres à un certain Théophile, dont on a discuté s’il avait véritablement existé (pourquoi ne serait-ce pas le cas ?) ou s’il s’agissait d’une sorte de pseudonyme collectif. Quoi qu’il en ait été, nombreux sont les dédicataires dont le souvenir ne se conserve que grâce aux livres qui leur furent offerts. Seuls les spécialistes d’histoire anglaise, et encore, connaîtraient le comte de Southampton, Henry Wriothesley (1573-1624), si Shakespeare ne lui avait pas dédié des poèmes. Qui aurait entendu parler d’Alfonso Diego López de Zuñiga y Sotomayor, duc de Béjar, s’il n’était le dédicataire de deux œuvres majeures de la littérature ibérique (la première partie du Don Quichotte et les Solitudes de Góngora) ? On ne rencontre que rarement le nom de Léon Werth en dehors du Petit Prince.

Le Bon Cœur, Michel Bernard

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 10 Janvier 2018. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Le Bon Cœur, janvier 2018, 240 pages, 20 € . Ecrivain(s): Michel Bernard Edition: La Table Ronde

« Les sons et les mouvements de la nuit ne les inquiétaient plus. Leurs sens s’étaient habitués. Le hululement d’un hibou sur son territoire de chasse, suave et prenant, la solitude d’un chêne, son orbe découplé sur la nuit, le vol errant d’une chauve-souris, étaient les signes d’amitié de la forêt. Ils avançaient comme des ombres dans un rêve, et c’était le rêve de la jeune fille ».

Le Bon Cœur est le roman d’une jeune paysanne dont le prénom deviendra un nom, et dont le nom inspira historiens, musiciens et cinéastes : Jeanne d’Arc. De Jules Michelet à Georges Duby, de Joseph Delteil à Anatole France, de Dreyer à Victor Fleming et Otto Preminger, de Robert Bresson à Jacques Rivette, sans oublier Gérard Manset, avec une passion commune, saisir le visible et l’invisible, faire voir ce qui a fait de l’histoire de Jeannette de Domremy une histoire française. Le Bon Cœur fait entendre l’histoire de la reconquête du Royaume de France, et une voix singulière et unique, qui résonne, comme celles qu’elle a entendues avant de se lancer dans cette aventure, les voix font parfois l’Histoire et souvent les grands livres. Cette voix singulière est aussi celle du roman de Michel Bernard, il conte avec finesse cette folle épopée française, qui la conduit à Orléans et à Reims, avant de tomber dans les mains des Bourguignons et des Anglais, cette traversée de l’Histoire, et des histoires, cette guerre de reconquête et de mots, où l’héroïne insaisissable et troublante écrit une Histoire nouvelle, les armes à la main.

Bon vivant !, Abbott Joseph Liebling

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 14 Décembre 2017. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Biographie, Récits

Bon vivant !, octobre 2017, trad. anglais (USA) Jean-Christophe Napias, 248 pages, 17,40 € . Ecrivain(s): Abbott Joseph Liebling Edition: La Table Ronde

 

Les photographies d’Abbott Joseph Liebling disponibles sur le réseau Internet montrent un homme à la silhouette agréablement sphérique, obtenue, travaillée – on le devine – à grands coups de fourchette (car une silhouette de gourmand se travaille, comme une silhouette de culturiste, seul le résultat est différent). Ce journaliste du New Yorker, mort en 1963 (à l’âge de cinquante-neuf ans) est inconnu en France, pays qu’il aimait d’un amour quasi-religieux, comme l’aiment en général les Américains gourmands et cultivés (pas les idiots qui en période de froid diplomatique versent à l’égout le vin français qu’ils ont au préalable acheté). Liebling y séjourna souvent, entre les années 20 et le début de la décennie 1960, désireux – on le comprend assez bien – d’échapper à tout ce que son grand pays possédait d’horripilant. En 1926-1927, il avait obtenu de son père les subsides nécessaires pour une année d’études à la Sorbonne. Liebling ne se distingua point par sa fréquentation assidue de l’alma mater et passa beaucoup de temps dans les restaurants (savait-il seulement faire la cuisine ?).

Monarques, Philippe Rahmy

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 07 Septembre 2017. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Monarques, août 2017, 208 pages, 17 € . Ecrivain(s): Philippe Rahmy Edition: La Table Ronde

 

Tissant plusieurs histoires réelles, celle de l’assassin d’un diplomate allemand en 1938, la sienne, celle de ses parents, Philippe Rahmy propose, après les excellents Mouvement par la fin (Cheyne, 2005) et Allegra (La Table Ronde, 2016), un livre inclassable, qui joue autant de la force de la réalité que de celle de l’écriture rassembleuse qui permet de confronter diverses époques (les années 10, les années 30, les années 80 et les années 2014-2016) pour en tirer une sorte de généalogie multiple des siens et des autres, et une lecture neuve des relations entre Juifs, Arabes, Allemands, Français. De qui procède-t-on ? Quel est l’impact du passé de nos proches et d’étrangers, parfois bien similaire ? Et pourquoi, surtout, l’écrire ?

Monarques, titre étrange, qui s’éclairera au chapitre 3, semble, au-delà de l’anecdote animale, plaider pour le thème du voyage qui innerve tout l’ouvrage. De fait, Monarques nous fait beaucoup voyager : de Berlin à l’Egypte, en passant par Paris, l’Amérique, Tel-Aviv, sans oublier la région natale de notre auteur, en Suisse.

Ni bruit ni fureur, Lucien Suel

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 03 Mai 2017. , dans La Table Ronde, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Ni bruit ni fureur, mars 2017, 176 pages, 16 € . Ecrivain(s): Lucien Suel Edition: La Table Ronde

 

Pas de bruit ni de fureur mais beaucoup d’empathie pour les mondes enfouis, l’enfance, la Mer du nord, les filles du Nord, les jardins. Les disparus, à la pelle, reçoivent force hommages et mercis.

La langue de Suel offre une diversité stylistique qui donne à ses poèmes marque et personnalité. Ce sont tantôt de très longs poèmes debout, serrés ; ce sont des proses en « semailles » et « narcisses », des « tombeaux » à l’adresse de plusieurs Christophe (Tarkos, Wattel) comme des inventaires prévertiens ; ce sont des inventives litanies poétiques où il se définit « dans la cathédrale de mes os ». Cette langue, prompte à convier des mots rares, des images elliptiques, des descriptions entomologiques et botaniques, renoue avec l’enfance des sensations : « la brouette du maçon », « l’évier blanc émaillé », « la fille du jardinier (qui) récolte les haricots de l’été », les mots picards (muchelot muché), les noms du nord (Wittebecque), les os de Rachel et de tant d’autres.