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Collection de poche de la Martinière

Petit Maître, Natsumé Sôseki (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 25 Août 2022. , dans Points, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, En Vitrine, Japon

Petit Maître, Natsumé Sôseki, Points, février 2022, trad. japonais, René de Ceccatty, 288 pages, 8,60 € . Ecrivain(s): Natsume Sôseki Edition: Points

 

Ce roman a paru en 1906. Le romancier Sôseki avait alors 39 ans. « Botchan » est le titre original.

Un jeune professeur quitte Tokyo et sa vieille servante et amie Kiyo pour un collège de province, dans une ville reculée. Il y donnera des cours de maths, au milieu d’un corps professoral haut en couleurs, où les inimitiés et les jalousies font la part belle : on y trouve de vieux professeurs comme Koga, un censeur, Tricot rouge, des collègues plus sympathiques comme Porc-épic et des imbuvables comme Cabot ou le Blaireau, directeur de l’établissement.

La province, c’est aussi des logeurs et logeuses qui vivent en louant des gourbis à ceux qui viennent de la capitale.

La province est un monde, tout à fait étranger au nouvel arrivant qui y voit des usages inconnus de lui.

Les élèves sont difficiles, toujours prêts à faire des mauvais coups, toujours prêts à chahuter le nouveau professeur ou à faire le chambard le soir dans les dortoirs.

D’os et de lumière, Mike McCormack (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 21 Juin 2022. , dans Points, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

D’os et de lumière (Solar Bones, 2016), trad. anglais (Irlande) Nicolas Richard, 275 pages, 8,60 € . Ecrivain(s): Mike McCormack Edition: Points

 

Nul point, de bout en bout, une phrase unique qui serpente, s’enroule, revient sur elle-même, se déploie de nouveau, se rompt, reprend, va crescendo puis descend, métaphore d’une vie d’homme, volonté d’un auteur d’embrasser tout ce qui la compose, jusqu’au moindre détail, projet panoptique qui se refuse à laisser au hasard la moindre nuance. Tel est ce roman d’un homme – le narrateur – qui se souvient dans un flux de mémoire intense qui le ramène aux sensations même éprouvées alors. Capturer le temps passé dans les mailles de la phrase, lui donner son épaisseur réelle, le restaurer dans le présent, c’est la folle aventure de ce roman puissant et captivant.

La phrase de McCormack se déploie aussi comme une tentative de capter l’histoire particulière dans son articulation à l’univers. Marcus Conway, le narrateur, n’est pas seulement ingénieur du bâtiment par profession, il l’est aussi par invasion de son être : rien, ni objet, ni fait, ni affect, n’échappe à sa passion de la construction, à sa conception du monde qui veut que tout élément soit forcément un morceau d’un tout, jusqu’au grand tout.

L’Ange des ténèbres, Ernesto Sábato (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 05 Avril 2022. , dans Points, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Roman

L’Ange des ténèbres (Abbadón el Exterminador, 1974), trad. espagnol (Argentine) Maurice Manly, 443 pages, 8 € . Ecrivain(s): Ernesto Sábato Edition: Points

 

Elles ont sur elles pour roi l’ange de l’abîme ; son nom en hébreu est Abaddón, qui veut dire l’Exterminateur

Apocalypse selon Saint Jean

 

Cette épigraphe place le roman sous l’égide du Mal et développe le titre original de l’ouvrage : Abaddón El Exterminador.

Sabato (sans accent sur le A – il s’agit donc du personnage du roman) regrette parfois son destin de romancier. Il se coucha et s’abandonna une fois de plus à son rêve de toujours : laisser tomber la littérature et ouvrir un petit garage dans un quartier inconnu de Buenos Aires. Par bonheur, Sábato ne s’est pas laissé tenter par le rêve de Sabato, cela nous eût privé du roman puissant qu’est Abbadón el Exterminador qu’il écrivit en 1974.

La Peau et le toucher, Un premier langage, Ashley Montagu (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 28 Mars 2022. , dans Points, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

La Peau et le toucher, Un premier langage, Ashley Montagu, novembre 2021, trad. anglais (USA) Catherine Erhel, 288 pages, 9,90 € Edition: Points

 

Deux domaines relatifs à l’être humain et ses ressentis sont à la pointe de la recherche scientifique depuis quelques années : le premier est les neurosciences – normal, puisque le modèle économique d’Internet est basé sur l’addiction ou du moins le contrôle des réactions de l’internaute, et qu’il n’est nullement étonnant d’apprendre qu’une docteure en psychologie cognitive, Célia Hodent, a pris part à la conception du jeu Fortnite, parmi d’autres psychologues. L’autre domaine à connaître des avancées sidérantes ces dernières années, c’est la sensibilité tactile, l’étude des récepteurs dissimulés sous notre épiderme, et leur rapport au cerveau – quiconque s’intéresse au fonctionnement du Métavers ou tend à voir les pires cauchemars de science-fiction se concrétiser peu à peu au fil de l’actualité (une combinaison pour faire l’amour à distance ? des robots sexuels à la peau de plus en plus « réaliste » ? mon Dieu, quelles horreurs !), comprend de suite l’intérêt financier derrière ces recherches : parvenir à vendre à l’humain à monde mis à distance, avec de la technologie pour pallier les manques relatifs à la peau.

Honorer la fureur, Rodolphe Barry (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 15 Février 2022. , dans Points, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Honorer la fureur, 304 pages, 7,40 € . Ecrivain(s): Rodolphe Barry Edition: Points

 

Barry bâtit un roman à partir d’une recherche biographique rigoureuse sur une partie essentielle de la vie du grand – et pourtant bien négligé – James Agee. Et c’est bien d’un roman qu’il s’agit car les jours et les heures de ces années fiévreuses d’Agee sont tissés dans une trame narrative en grande partie fictionnelle mais néanmoins fondée sur les éléments de la réalité. Agee, personnage bouillant, souvent emporté par ses élans passionnés, apparaît ici, page après page, dans ses recoins, ses complexités, ses excès, ses folies.

Agee est journaliste, grand lecteur de Thomas Wolfe et William Faulkner dont il rêve d’atteindre l’art. Il va même jusqu’à se promener dans le quartier de NYC où on lui a dit qu’habite Wolfe dans l’espoir de le croiser.

« La ville est aussi insomniaque que lui. Il cherche le visage des promeneurs, l’un d’eux pourrait être celui de Thomas Wolfe dont il a découpé le portrait dans un journal. Il a appris que l’auteur de L’Ange exilé vivait dans un modeste meublé dans le quartier assyrien du sud de Brooklyn, dont il ne sort qu’à la nuit tombée, la main gauche tachée d’encre ».