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Le Livre de Poche

Le Livre de poche (parfois abrégé LDP) est, à l'origine, le nom d'une collection littéraire apparue le 9 février 1953 sous l'impulsion d'Henri Filipacchiet éditée par la Librairie générale française, filiale d'Hachette depuis 1954.


Récits d’un jeune médecin, Mikhaïl Boulgakov (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 07 Juillet 2020. , dans Le Livre de Poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Russie, Récits

Récits d’un jeune médecin, Mikhaïl Boulgakov, 1925, trad. russe, Paul Lequesne, 158 pages Edition: Le Livre de Poche

 

Ces récits – à peine mâtinés de fiction – datent de 1925 mais racontent une période située en 1917. Quelle date ! Le jeune médecin / Boulgakov, tout juste diplômé, va occuper son premier poste dans une unité de soin perdue au cœur de nulle part. C’est la campagne russe, ses paysans primaires, la boue, la glace, le froid, la neige, la solitude. Le jeune moscovite subit de plein fouet le choc culturel et géographique, loin des lumières de la capitale, des cafés aux discussions passionnées, des théâtres et du bouillonnement intellectuel qui accompagne l’imminence de la Révolution d’Octobre. Il subit aussi et surtout l’affrontement à ses premiers pas de clinicien, terrifié par son inexpérience, la peur de ne pas savoir faire, l’ahurissement devant les personnages improbables qui se présentent à son auscultation, parés de maladies ou de blessures inconnues ou presque du débutant.

Boulgakov adopte le plus souvent le ton de l’autodérision pour nous conter ses chaotiques premiers pas. A quelques années de distance, il revoit avec tendresse et un brin de nostalgie ce qui, en son temps, ressembla à un chemin de croix. Dès l’arrivée à ce qui sera sa demeure pendant trois années, dès le voyage qui y mène, le pauvre médecin sait qu’il entre dans un autre monde, un monde inconnu dont il n’avait pas la moindre prescience.

Adolphe, Benjamin Constant (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 30 Juin 2020. , dans Le Livre de Poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Adolphe, 219 pages, 3,70 € . Ecrivain(s): Benjamin Constant Edition: Le Livre de Poche

 

Benjamin Constant, plus encore que romancier romantique, est, avec Goethe, l’un des grands auteurs du Sturm Und Drang par son opposition radicale à la tradition du roman d’amour sage et policé du XVIIIème siècle. Marcel Arland le rappelle dans sa préface, Adolphe est contemporain de René (Chateaubriand), Delphine (Madame de Staël) ou Claire d’Albe (Sophie Cottin). A ce titre Adolphe tranche dans la littérature du temps, par sa rudesse, sa cruauté, et le refus absolu de gommer les aspérités mortelles de l’âme humaine.

Si l’on devait résumer ce roman, on s’apercevrait vite que c’est déjà fait, dès les premières pages, dès les premières lignes. Dès les premiers instants de la liaison amoureuse des deux personnages centraux, tout autre élément narratif est évacué par Benjamin Constant. La passion amoureuse fait le vide, enferme dans un confinement affectif deux êtres dont la vie ne sera désormais qu’eux-mêmes. Les vagues qui vont et viennent de l’amour à la douleur, de l’amour à la haine, puis de la haine à l’amour, scandent toute l’œuvre. Répétitions ? Oui. Et non. Derrière l’apparente itération des sentiments, l’histoire avance, l’intérêt dramatique s’affine et se précipite, le désastre s’installe.

Le Maître du Haut Château, Philip K. Dick (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 20 Mai 2020. , dans Le Livre de Poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Le Maître du Haut Château (The Man in The High Castle, 1962), trad. américain, Michelle Charrier, 380 pages, 7,90 € . Ecrivain(s): Philip K. Dick Edition: Le Livre de Poche

 

La pire erreur que l’on pourrait commettre à propos de Philip K. Dick serait de le confiner dans l’espace exclusif de la Science-Fiction – avec la condescendance qui accompagne trop souvent ce confinement. Dick est un grand écrivain et son champ est la SF ou la dystopie ou l’uchronie. Il est, avec JG. Ballard, Clifford Simak, Ray Bradbury et Isaac Asimov, l’un de ceux qui ont érigé un genre considéré auparavant comme mineur en partie intégrante de la grande littérature. Le souffle narratif, l’universalité de la vision, la puissance de l’imagination mettent Philip K. Dick dans la troupe (nombreuse) des plus grands écrivains américains du XXème siècle. Et Le Maître du Haut Château, l’un de ses chefs-d’œuvre majeurs.

Le Maître du Haut Château, écrit en 1962, est une uchronie post deuxième guerre mondiale, qui court de 1948 à vingt plus tard. Les Alliés ont perdu la Guerre, Le Reich allemand et le Japon impérial ont triomphé et se sont partagé le monde. Une ligne de démarcation sépare les ex-USA en trois blocs, l’un dominé par les japonais à l’Ouest, l’autre par les nazis à l’Est et, entre les deux, une zone « neutre ».

Les Vagues, Virginia Woolf (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mardi, 28 Avril 2020. , dans Le Livre de Poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Roman

Les Vagues, trad. Marguerite Yourcenar, 320 pages, 7,30 € . Ecrivain(s): Virginia Woolf Edition: Le Livre de Poche

 

Dans son journal, Virginia Woolf a noté : « Il y a peu de livres que j’aie écrits avec autant d’intérêt que Les Vagues. (…) Je trouve que cela valait la peine de lutter ». Est-ce à en déduire que la rédaction de ce roman fut une véritable épreuve pour l’écrivaine ? Et d’ailleurs, est-ce un roman, comme on peut se poser la question pour d’autres œuvres de Virginia Woolf ?

Dans tous les cas, il est intéressant de relever une contradiction : se donnant pour but de représenter « la vie elle-même qui s’écoule », la romancière a vraisemblablement eu à se battre pour exprimer les mouvements d’une fluidité propre à l’eau. Cependant, à la façon d’un musicien qui doit lutter longtemps avant de donner naissance à une virtuosité sans effort, Virginia Woolf honore ses intentions de départ : nous voguons, en effet, et le courant n’est pas particulièrement violent. On pourrait même déplorer une forme de lenteur, notamment dans la description des paysages qui ouvre chaque partie du livre (descriptions au reste composées comme de véritables tableaux).

Diadorim, João Guimãraes Rosa (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 10 Mars 2020. , dans Le Livre de Poche, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Roman

Diadorim (Grande Sertão : Veredas, 1956), João Guimãraes Rosa, trad. portugais (Brésil) Maryvonne Lapouge-Pettorelli, 924 pages, 9,90 € Edition: Le Livre de Poche

 

Le Sertão, ravagé par la guerre des jagunços, est la niche même du Diable – celui-qui-n’existe-pas – qui s’y adonne à cœur-joie à la sauvagerie la plus terrifiante, aux limites de ce que les humains sont capables de produire dans l’horreur – tout en sachant que ces limites peuvent toujours être repoussées et elles l’ont été à maintes reprises depuis la Guerre de Canudos qui finissait le siècle XIX et annonçait l’immonde siècle XX. Ce roman entier se construit sur l’attente de la Fin du Monde. Le monologue de Riobaldo, sur plus de 900 pages, entre d’emblée dans les plus grands moments de la littérature, aux côtés de Absalom ! Absalom ! de Look Homeward, Angel, ou de Nostromo. C’est un déluge de mots, racontés à un auditeur qui restera mystérieux jusqu’au bout. Plonger dans le flot du monologue de Riobaldo, long de plus de 900 pages, est un voyage au bout de l’Enfer que les hommes, ses meilleurs artisans, sont capables de construire.