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Serge Safran éditeur

Diffusé par Le Seuil et distribué par Volumen, Serge Safran éditeur, créé et animé par Serge Safran, écrivain et cofondateur des éditions Zulma, propose a priori quatre à cinq titres par an de littérature contemporaine, française ou étrangère. À savoir un choix personnel guidé par l'originalité du sujet, la force d'émotivité et le dérangement des codes établis, qu’ils soient moraux, littéraires ou esthétiques. L'idée est avant tout d'offrir de réelles découvertes. Donc de privilégier, sans que cela soit une contrainte, ni une limite, de nouveaux ou jeunes auteurs, en tout cas des écrivains méritant d’être soutenus et encouragés avec passion. Il ne s’agit pas de revendiquer une rupture littéraire formelle à tout prix, mais que ces œuvres puissent exprimer une forte personnalité à travers un sujet à caractère universel comme, par exemple, la relation entre des visions opposées du monde, sur toile de fond historique, géographique ou sociale spécifique.


Uniques, Dominique Paravel

Ecrit par Anne Morin , le Mardi, 03 Septembre 2013. , dans Serge Safran éditeur, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Uniques, 22 aout 2013, 165 pages, 15 € . Ecrivain(s): Dominique Paravel Edition: Serge Safran éditeur

 

Visions des choses, interpénétration des temps et des vies, fulgurance des couleurs, dans un même lieu : une rue grise et triste, attendant la neige, un soir d’Epiphanie : « C’est toujours le passé qu’on voit. Que se passe-t-il, quels abîmes, dans ce retard, entre nos regards ? » (p.124). Le temps ne recommence à goutter que lorsque la narratrice reprend la main sur son œuvre. Dans la salle d’exposition d’une entreprise, elle a saisi sur un écran une portion vide de la rue Pareille où vivent tous les personnages, et où se trouve également l’entreprise Rodalpa. Rue vide, mais non pas inanimée – chacun peut y voir ce qu’il veut, s’y voir, en mouvement, en arrêt sur image, ou projetant ses fantasmes – : « En s’approchant il a compris qu’il s’agissait d’un écran plat sur lequel une image fixe était projetée. Une rue. Plus précisément la rue de l’usine, dont les bâtiments s’entrevoyaient sur la gauche. Aucun passant, une lumière indéfinissable, glauque, l’artiste avait sans doute filmé au petit matin. Tout était inerte. Il ne comprenait pas pourquoi les gens semblaient tous captivés » (p.69).

Adieu le cirque !, Cheon Un-Yeong

Ecrit par Victoire NGuyen , le Samedi, 13 Juillet 2013. , dans Serge Safran éditeur, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Asie, Roman

Adieu le cirque !, traduit du coréen par Seon Yeong-a et Carine Devillon, avril 2013, 267 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Cheon Un-Yeong Edition: Serge Safran éditeur

 

Ballade des âmes errantes

 

Le roman s’ouvre sur un spectacle de cirque en Chine. Deux frères assistent aux acrobaties qui se déroulent sur scène. Le lecteur ne connaît que la pensée de l’un des frères, Yunho, qui contemple le spectacle.

« Je regardais la scène, les bras croisés, bien résolu à rester de glace, quelque dangereux que fût le numéro réalisé devant mes yeux. La virtuosité de cette troupe d’acrobates chinois, qui arrachait des exclamations au public par une contorsion ou un pliement grotesque du corps, ne m’inspirait que pitié. Le cirque implique une prise de risque. Le cirque, c’est l’affranchissement des limites physiques par un entraînement infernal. C’est donc de la pitié, et non de l’émotion, que l’on éprouve au cirque ».

La fresque, Eliane Serdan

Ecrit par Stéphane Bret , le Mardi, 19 Mars 2013. , dans Serge Safran éditeur, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

La Fresque, mars 2013, 160 pages, 12,50 € . Ecrivain(s): Eliane Serdan Edition: Serge Safran éditeur

 

Qu’est-ce qui nous aide à vivre le mieux ? Cette question, que nous nous posons tous à un moment ou à un autre de nos vies, est le thème du roman d’Eliane Serdan, La Fresque. Le récit se déroule à Sienne, dans la dernière décennie du XVe siècle. Pandolfo Petrucci a pris le pouvoir dans cette ville, il y règne en tyran implacable. Il se heurte à l’opposition des grandes familles et mène une diplomatie délicate avec les villes-états de Florence et de Milan. Tous ces bouleversements politiques contraignent Gian Di Bruno à fuir la ville de Sienne et à se réfugier sur le Casentino dans la maison inhabitée de son ami Paolo. Les complots vont bon train, les Vénitiens soutiennent Pise et veulent étendre leur influence à Sienne…

Très vite, l’exil conduit Gian Di Bruno à des interrogations multiples : elles portent sur son enfance, sur l’impact de l’exil : « L’exil est avant tout la fin d’une harmonie. Quand je vivais à Sienne, je ne prenais jamais le temps de contempler les cyprès ou l’ocre d’un chemin mais je sais, maintenant que s’instaure entre le paysage et moi un désaccord de tous les instants, quelle était la force du lien qui nous unissait ».

Bérénice 34-44, Isabelle Stibbe

Ecrit par Stéphane Bret , le Mardi, 22 Janvier 2013. , dans Serge Safran éditeur, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Bérénice 34-44, 316 p., 18 € . Ecrivain(s): Isabelle Stibbe Edition: Serge Safran éditeur


La force d’une vocation artistique peut-elle tout occulter ? Peut-elle faire oublier le monde extérieur, surtout lorsque ce monde s’assombrit dangereusement ? C’est la question qu’aborde Isabelle Stibbe dans son premier roman, Bérénice 33-44.

C’est le récit d’une jeune fille, adolescente dans le Paris des années de l’entre-deux guerres, qui étouffe un peu dans sa famille, d’origine juive russe par son père, Maurice Capel né Moïshé Kapelouchnik, et par sa mère, née Valabrègue, appartenant à une vieille famille juive du Comtat Venaissin. Prénommée Bérénice en raison de la fréquentation par son père, au cours de la première guerre mondiale, d’un instituteur, Louis, très Troisième république, amoureux du théâtre classique et de Racine. Bérénice pressent, très tôt, que son existence va être remplie d’ennuis, de renoncements, si elle ne se consacre pas de toutes ses forces à la réalisation d’un rêve qui revêt les caractères d’un impératif pour elle : monter sur les planches. Elle s’en aperçoit en assistant à une représentation de la Comédie-Française, Lorenzaccio. Elle y éprouve l’appel de la vocation, la sensation du sacré dans le statut de comédien :

Nouvelles vénitiennes, Dominique Paravel

Ecrit par Anne Morin , le Samedi, 02 Juillet 2011. , dans Serge Safran éditeur, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Nouvelles

Nouvelles vénitiennes, 185 pages, 2011 . Ecrivain(s): Dominique Paravel Edition: Serge Safran éditeur


Qu’est-ce qui se trame ici ? Ce petit livre précieux est écrit comme on tisse, l’enchevêtrement des histoires correspond au dédale des rues de Venise, ville morte, ville vive, ville labyrinthe. A travers les âges et les saisons, la narratrice nous fait suivre un fil conducteur, le double fil de l’art et de l’amour. Du tailleur de pierre qui remporte le pari d’ériger les piliers de granit, obtenant la jouissance de l’espace entre eux, au peintre dont le portrait de jeune homme passe d’une histoire à l’autre, échouant là où on ne l’attend pas, à Viola, sculptant un ange pour un monument funéraire, et guidant son interlocuteur par mobile interposé, dans les rues-dédale de Venise.

Un livre qui donne envie de s’élargir à l’espace et au souffle de cette ville, de la (re)visiter, de la (re)découvrir, aussi de l’intérieur, d’écouter quelles musiques elle donne à entendre, quels tableaux elle donne à voir… comme le photographe (é)perdu de la dernière nouvelle avec lequel son rédacteur en chef fait un marché : des photos de Venise contre un reportage rêvé au Mexique, et qui ne trouve rien à photographier tant Venise se montre belle de partout, mais aussi attendue de partout.

Une femme passe, profil perdu, la femme, thème majeur de ce recueil, la femme initiatrice, la femme qui s’entremet, la femme aussi dédoublée, qui (se) masque et (se) dévoile.