En trente-sept ans, Jean Echenoz (1947) a publié seize romans et un recueil de nouvelles, autant de plus ou moins brèves fêtes lexicales et stylistiques, où la légèreté apparente le dispute à l’appropriation des genres, en particulier le policier et sa variante plus politisée, le thriller. Le dix-septième de ces romans vient de paraître, et si Envoyée Spéciale n’a pas l’envergure de L’Equipée Malaise ou des Grandes Blondes, par lesquels on conviera tout néophyte à découvrir Echenoz, ce n’en est pas moins un excellent cru – pour qui est inconditionnel du style de l’auteur, du moins.
Comme nombre de récits signés Echenoz, Envoyée Spéciale raconte une histoire hautement improbable mais présentée sous les dehors de la banalité même : Solange, une bourgeoise parisienne bien sous tous rapports, est enlevée par trois hommes qui la séquestrent dans une ferme isolée de la Creuse. Rançon est demandée à son mari, Louis-Charles Coste, mieux connu sous le nom d’artiste Lou Tausk, qui, sur conseil de son demi-frère Hubert, avocat de son état, ne réagira pas à cette demande, même après l’arrivée par la poste d’un bout d’auriculaire…