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L'Olivier (Seuil)

Les Editions de l'Olivier, que caractérise leur sobre et élégante couverture noire et blanche marquée d'une silhouette d'olivier, sont fondées en 1991 par Olivier Cohen comme filiale des éditions du Seuil.

Dès le départ, le parti pris est de mettre l'accent sur la littérature anglo-saxonne, avec des auteurs tels que Raymond CarverJay Mc InerneyCormac McCarthy, Henry Roth, Hubert Selby Junior, Michael Ondaatje ou, parmi une plus jeune génération, Rick Moodyou Jonathan Franzen.

 


Derniers Feux sur Sunset, Stewart O’Nan

Ecrit par Didier Smal , le Samedi, 20 Août 2016. , dans L'Olivier (Seuil), Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, La rentrée littéraire

Derniers Feux sur Sunset, août 2016, trad. anglais (USA) Marc Amfreville, 396 pages, 23 € . Ecrivain(s): Stewart O’Nan Edition: L'Olivier (Seuil)

L’annonce d’un nouveau roman de Stewart O’Nan (1961) est une bonne nouvelle, si l’on veut bien laisser de côté le plutôt mitigé Joueurs (2013) : que ce soit par son hommage à Stephen King (avec qui il a coécrit une nouvelle, Un Visage dans la Foule, 2014), le puissant Speed Queen (1998), par son grand roman sur les séquelles de la guerre du Vietnam (conflit au sujet duquel il a publié une anthologie définitive en 1998, The Vietnam Reader : The Definitive Collection of Fiction and Nonfiction on the War, qui n’a malheureusement pas encore trouvé traducteur), Le Nom des Morts (1999), par son beau diptyque sur la vieillesse, Nos Plus Beaux Souvenirs (2005), et Emily (2012), ou encore par son intense roman sur l’Amérique d’après la Guerre de Sécession, le percutant Un Mal qui Répand la Terreur (2001), cet auteur a régulièrement démontré un grand talent de raconteur capable d’aller au fond des choses, d’extraire de sa matière narrative un sens auquel se confronte le lecteur.

Lorsqu’on apprend de surcroît que le nouveau roman de Stewart O’Nan s’intitule Derniers Feux sur Sunset, et raconte l’expérience hollywoodienne de Francis Scott Fitzgerald (1896-1940), on se réjouit de cette rencontre entre deux grands auteurs : certains romans sur la littérature sont de franches réussites, on pense en particulier à L’Auteur ! L’Auteur, de David Lodge, sur l’expérience dramaturgique de Henry James, et au Voyage de Shakespeare, de Léon Daudet, sur l’éveil artistique du Barde, et on n’en attend pas moins de celui-ci.

Purity, Jonathan Franzen

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Jeudi, 07 Juillet 2016. , dans L'Olivier (Seuil), Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Purity, mai 2016, trad. l’anglais (USA) Olivier Deparis, 750 page, 24,50 € . Ecrivain(s): Jonathan Franzen Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Les romanciers anglo-saxons ont, par tradition, le sens du récit et de la narration, voilà une assertion que le nouveau roman de Jonathan Franzen ne dément certes pas. Dans cet ouvrage, chacun des personnages se fraye une voie difficile vers le succès, l’amour, la justice, le bonheur et toute forme d’épanouissement qui lui semble accessible et acceptable. Ce cheminement est aussi géographique : nous sommes transportés de la Silicon Valley à Manhattan, en passant par le Berlin-est de la Stasi, un journal d’investigation de la ville de Denver et une ONG, le Sunlight Project, fondée en Bolivie par le célèbre hacker et lanceur d’alerte Wolf.

Les trajectoires des trois personnages principaux, Purity ou Pip Tyler, Andreas Wolf et Tom Aberant, connaissent des similitudes troublantes : dans leur jeunesse, Andreas et Tom tissent une passion amoureuse avec deux femmes aux prénoms parallèles, Annagret et Anabel, dont les déséquilibres s’accordent un temps à ceux de leurs amants ; les mères de Pip et d’Andreas sont un fardeau pour l’un comme pour l’autre, bien que ces relations névrotiques et conflictuelles ne soient pas de même nature. Ainsi, les rapports de Pip avec sa mère sont « totalement pervertis par l’aléa moral, une expression utile apprise en cours d’économie à l’université. Elle était comme une banque trop essentielle à l’économie de sa mère pour faire faillite, une employée qui peut tout se permettre parce qu’elle se sait indispensable ».

Le Grand Marin, Catherine Poulain

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Vendredi, 06 Mai 2016. , dans L'Olivier (Seuil), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Voyages

Le Grand Marin, février 2016, 372 pages, 19 € . Ecrivain(s): Catherine Poulain Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Serrer le corps du grand marin, c’est entrer de plein fouet dans les entrailles du livre, adapter son langage et ses odeurs, sombrer avec lui, le soir, la nuit, glisser sur le port et repeindre la ville en rouge. Ivre et hagard au matin, l’alcool dans le sang, à terre, les grands marins tanguent. Ils n’ont pas le pied, ils n’ont plus le sens. Ils flottent et se décharnent. Lili, elle, elle veut être avec eux, s’écorcher la face, elle veut du ressac, elle veut du vent, le sel pour ronger son visage, la mer pour réparer son corps. Elle veut un bateau. Etre adoptée. Pénétrer la chair d’un bateau pour l’habiter tout entier, au bout du monde, voire y disparaître.

Lire ce livre, c’est se tenir avec son propre corps au bastingage comme aux comptoirs des bars, vivre les gueulantes des hommes et des vagues, là sur le pont à ne pas savoir comment s’y prendre. Etre un Homme et s’y tenir. Porter, tendre, attendre son tour par terre et ne plus savoir dormir que par chapitres.

Tous les Vivants, Le crime de Quiet Dell, Jayne Anne Phillips

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 17 Mars 2016. , dans L'Olivier (Seuil), Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Tous les Vivants, Le crime de Quiet Dell (Quiet Dell), janvier 2016, trad. américain Marc Amfreville, 533 pages, 23,50 € . Ecrivain(s): Jayne Anne Phillips Edition: L'Olivier (Seuil)

 

 

Reconstitution minutieuse et complète d’un fait-divers aussi célèbre que terrifiant, néanmoins roman, voire romance, ce livre captive de bout en bout tant son auteur tricote habilement le réel recomposé et l’imaginaire. On ne s’attend pas à cela pendant les 65 premières pages, consacrées à la malheureuse « héroïne » de l’histoire, la très fleur-bleue et assez sotte mère de famille. Cette assertion vise à avertir le futur lecteur qu’il ne doit en aucun cas se décourager de continuer la lecture, car quand le mal survient, c’est une violente irruption d’une figure somme toute satanique, dans l’univers feutré d’une petite bourgeoisie provinciale très « bovaryenne ». Le fait-divers en soi est assez sordide, pour que Jayne Anne Phillips n’ait eu besoin d’en remettre sur la noirceur. Et le résultat est étonnant et séduisant : le mariage de la bluette et de l’horreur.

Le Livre d’Aron, Jim Shepard

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 11 Février 2016. , dans L'Olivier (Seuil), Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Le Livre d’Aron (The Book of Aron), février 2016, trad. américain Madeleine Nasalik, 231 pages, 21 € . Ecrivain(s): Jim Shepard Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Comment peut-on raconter une sorte de « Guerre des Boutons » dans le cadre effroyable du Ghetto de Varsovie en 1943 ? Il faut soit écrire un chef-d’œuvre, soit rien. Jim Shepard a choisi le chef-d’œuvre. En sertissant l’histoire d’Aron et de ses copains et copines dans les rues dévastées et sinistres d’un parc à bétail pour Juifs, l’auteur taille un joyau au cœur de l’horreur.

La bande d’enfants ne « joue » pas vraiment. Leurs aventures quotidiennes visent à trouver la pitance, les couvertures, les casseroles qui manquent de plus en plus à la maison. Mais comme ce sont des enfants, ils en font un terrain de jeux. Ils creusent des trous, font des passages dans les palissades, évitent – autant que possible – les soldats nazis et les collabos polonais. Ils passent de « l’autre côté », celui des non-juifs, plus libres et mieux nantis, pour y gratter ce qu’ils peuvent et le rapporter. A ceux qui souffrent, à ceux qui se meurent, du typhus, de la tuberculose, de la faim, des assassinats réguliers des nazis et des miliciens.