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Gallmeister

Fondées en 2005, les éditions indépendantes Gallmeister sont spécialisées dans la publication de livres relevant du genre Nature writing.

Oliver Gallmeister, ancien directeur financier chez Hachette, est passionné par la littérature américaine, les grands espaces et les polars. Après avoir eu entre les mains leTraité du zen et l'art de la pêche à la mouche de John Glerach qui raconte sa vie bucolique dans le Colorado, il décide de faire connaître le « nature writing » en éditant et traduisant tous ces auteurs américains méconnus en France et fonde sa propre maison en 2005. SARL au capital de 30 000 euros ; la maison d’édition est modeste, il n’y a ni bureaux, ni personnels. Oliver Gallmeister travaille avec Laurent Beccaria (directeur des éditions Les Arènes depuis 1997) et fait très attention à rester une microstructure, en effet pour lui le principal écueil d’une jeune maison d’édition serait d’ « essayer d’être Gallimard tout de suite » . La première année il a publié six livres, aujourd’hui il en est à neuf parutions par an et 5 000 exemplaires vendus en moyenne par titre. Son plus gros succès, « Sukkwan Island » d'Island de David Van publié en 2010 et prix médicis 2010 du roman étranger, compte plus de 58 000 exemplaires vendus alors que ses meilleures ventes montaient jusqu’alors à 15 000, Le gang de la clef à molette d’Edward Abbeypublié en 1975. Soutenu par le CDE(son diffuseur), la presse et les libraires, le chiffre d’affaires de l’entreprise s’élevait à 539 999 euros en 2009.


Le Lac de nulle part, Pete Fromm (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 14 Février 2022. , dans Gallmeister, Les Livres, Recensions, La Une Livres, USA, Roman

Le Lac de nulle part, janvier 2022, trad. américain, Juliane Nivelt, 448 pages, 24,60 € . Ecrivain(s): Pete Fromm Edition: Gallmeister

 

C’est un retour vers le passé que Bill, vieillissant, propose à ses enfants, désormais adultes. Un dernier voyage aux pays des lacs canadiens en Ontario, le Parc Provincial Quetico, ses 400.000 km2 et ses deux milles lacs. Alors qu’ils étaient encore enfants et que Bill n’était pas divorcé, les jumeaux Al et Trig (Algèbre et Trigonométrie), de la famille Mathématiques, avaient l’habitude de ces longues randonnées en canoë et des campements sauvages. Désormais Al vit à Denver et Trig en Californie (précisément dans sa voiture depuis qu’il s’est fait renvoyer de son emploi). Bill est divorcé de son épouse Dory. Alors pourquoi renoncer à revoir ce père, à revivre les souvenirs d’antan ? Nous sommes fin octobre, la saison se termine, rendez-vous est donc donné à Minneapolis dans le Minnesota avant de rejoindre International Falls, la ville frontière, en avion.

Notre petit monde se retrouve à l’aéroport de Minneapolis mais Bill qui était là le premier semble ailleurs, il avoue même avoir égaré les bagages. Alors on bouleverse les plans, on rachète des équipements, nourriture déshydratée comprise, on loue une Jeep Cherokee rouge, le voyage jusqu’à la base de départ se fera en voiture. On arrime deux canoës sur la Cherokee et c’est parti pour la grande aventure, la dernière en « famille » !

Le pouvoir du chien (The Power of the Dog, 1967) Thomas Savage, Gallmeister (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 07 Décembre 2021. , dans Gallmeister, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Le pouvoir du chien (The Power of the Dog, 1967) Traduit de l’américain par Laura Derajinski. 284 p. 9,90 € . Ecrivain(s): Thomas Savage Edition: Gallmeister

Roman dérangeant, au sens le plus radical qui soit : qui brise le rang, surtout celui des romans trop souvent convenus des années 60 qui égrènent révoltes, Vietnam, musique et folklore (le roman de Savage date de 1967). La noirceur du propos, la noirceur des âmes, nous rapprocheraient plutôt des grands sudistes, Faulkner en tête, dont nous retrouvons en ombre les grandes familles terriennes décadentes, les personnages cyniques et désespérés. On pense aussi irrésistiblement à Cormac McCarthy et la noirceur, la cruauté de ses personnages. Et pourtant Savage est plus proche par son enfance du Montana, où se tient ce terrible roman. Un personnage en particulier semble droit sorti des figures de l’enfer et qui pourrait être l’un des Snopes de Faulkner, Phil Burbank, cow-boy quadragénaire qui gère, d’une main de fer, avec son frère George, le grand ranch hérité des parents.

Univers d’hommes, d’éleveurs de bétail, rudes, taiseux, le ranch semble fonctionner comme un grand mécanisme dont les rapports interpersonnels sont absents, comme une addition hiérarchisée des solitudes des gens qui viennent travailler un temps, puis s’en vont, remplacés par d’autres, anonymes.

L’Insigne rouge du courage, Stephen Crane (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 16 Novembre 2021. , dans Gallmeister, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

L’Insigne rouge du courage (The Red Badge of Courage, 1895), Stephen Crane, trad. américain, Pierre Bondil, Johanne Le Ray, 211 pages, 8,50 € Edition: Gallmeister

 

Roman culte, source de toute littérature sur la guerre de Sécession, ce livre est d’abord – dans son ouverture – une série de tableaux vivants de scènes de la terrible guerre civile qui ensanglanta l’Amérique de 1861 à 1865. Tableaux au sens le plus pictural du terme, tant ombres et lumières, éblouissements et ténèbres, couleurs et reflets s’entrecroisent et se disposent à la manière de l’art d’un peintre. Le champ lexical visuel envahit le récit, envoyant comme une obsession des images qui marquent l’imagination et la mémoire. Aux scènes toujours en mouvement de Shelby Foote (Shiloh) et de Lance Weller (Wilderness, Le cercueil de Job), Stephen Crane fait écho au contraire par l’immobilité des moments de la narration. Si Foote et Weller ont proposé des séquences filmiques, Crane propose une projection de diapositives, de photos fixes. A l’opéra, Crane préfère des tableaux enchaînés à la manière d’Henry Purcell dans son King Arthur, arias sombres et graves succédant à arias guerriers et éclatants.

Le Cercueil de Job, Lance Weller (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 01 Septembre 2021. , dans Gallmeister, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Le Cercueil de Job (Job’s Coffin, 2021), septembre 2021, trad américain, François Happe, 465 pages, 25 € . Ecrivain(s): Lance Weller Edition: Gallmeister

 

Lance Weller place son roman sous les ombres tutélaires de Cormac McCarthy et de Shelby Foote. Sa maîtrise stylistique, son sens prodigieux de la structure romanesque, lui permettent cette audace qu’il assume et transcende. Le Cercueil de Job est une traversée sous le ciel du Sud alors que grondent les canons meurtriers de la Guerre Civile, sous les étoiles d’un ciel sans Dieu ou d’un Dieu indifférent au malheur des hommes, jetés dans l’enfer de la folie guerrière ou de la folie raciale et dont la solitude ne se brise que quand une balle vient leur traverser le corps, pour les enlever à ce monde de terreur, ou les en extraire, brisés, abîmés pour toujours. On entend dans l’écriture de Lance Weller le chant désolé de La Route, de Méridien de sang, de Shiloh ; mais on entend surtout la scansion particulière de l’écriture de Lance, qui tourne autour d’une scène, en extrait tout le champ de vision, capte la douleur des personnages et nous l’envoie comme autant de blessures dans nos consciences d’hommes – étrange espèce de ceux qui sont capables de ça. De haïr, de pendre, de brûler vifs, de castrer, de violer, d’exclure des hommes et des femmes de la condition d’humains.

Les Marches de l’Amérique, Lance Weller (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 08 Septembre 2020. , dans Gallmeister, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman

Les Marches de l’Amérique (American Marchlands), trad. américain, François Happe, 354 pages, 10,20 € . Ecrivain(s): Lance Weller Edition: Gallmeister

 

A la construction erratique et violente des frontières Sud-Ouest des États-Unis d’Amérique, les Marches (Marchlands) progressives de la conquête, fait écho dans ce livre magistral la marche (walk), tout aussi erratique et violente, de trois personnages qui tracent, à leur manière, les nouvelles frontières. Le roman de Lance Weller s’étend de 1815 à 1846, à peu près dans l’âge de vie de Tom Hawkins, Pigsmeat et Flora. Leur destin commun s’inscrit dans la toile de fond historique américaine. C’est, chez Weller, un mode de narration déjà utilisé dans Wilderness : tresser l’histoire individuelle et l’Histoire (dans Wilderness l’action se situait plus tard, après la Guerre de Sécession). A la manière des historiens de l’école des Annales, ce qui intéresse l’auteur – qui n’est pas historien mais romancier – ce sont les gens plus que les faits. On est loin du point de vue d’un Shelby Foote qui, dans Shiloh, se rapproche plus du travail historique pur. La marche des trois héros traverse et retraverse l’Histoire : les guerres indiennes, l’établissement des frontières avec le Mexique, le destin du Texas longtemps disputé. Mais c’est bien l’histoire, magnifique et terrible, de ces deux hommes maudits par le destin et de cette femme, superbe et forte, qui constitue la matière du roman.