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La Brune (Le Rouergue)

Editions rattachées aux éditions Le Rouergue

Les Singuliers, Anne Percin

Ecrit par Martine L. Petauton , le Samedi, 27 Septembre 2014. , dans La Brune (Le Rouergue), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Les Singuliers, août 2014, 392 pages, 22 € . Ecrivain(s): Anne Percin Edition: La Brune (Le Rouergue)

Singulier et singulièrement prenant, ce livre, hors des modes, ailleurs. Un voyage.

Échange de lettres, un peu à la manière du XVIIIème siècle finissant, entre quelques personnages, fictifs, probablement, quoique !! vivant fin XIXè dans le milieu de l’art entre Paris et Bruxelles. Des peintres ; les plus grands, mais période « galère et traîne-la-faim ». Simple et remarquablement opérationnelle, l’architecture d’Anne Percin qui confesse en aparté un amour immense pour ces Van Gogh et ces Gauguin…

Sujet qui n’habite certes pas tous les ouvrages de cette rentrée littéraire, et, qui, rien que par lui même, vaudrait la lecture. Mais, il y a tellement plus : vous entrez dans les œuvres, leur genèse, non par la banalité de salles de musée, mais par les jours « vache enragée » et doutes à toutes les sauces, de ces génies ; vous palpez leur quotidien, leur hargne ou leur lâcheté ; on pourrait dire, leur banalité ; on les entendrait presque respirer, tousser, là, devant leurs toiles roulées. Du temps que personne ne les regardait ou, plutôt, les regardait de travers. Tout Gauguin, tout Van Gogh ; tout ce qu’on voit et connaît d’eux ; leurs couleurs, leurs factures, presque l’odeur de la peinture. Vous êtes pour autant, ailleurs que devant la toile ; derrière, peut-être, dans la tête du bonhomme, dans son intime vécu psychique dirait notre psy. Une espèce de quatrième dimension impressionnante. Un musée unique que celui de Percin…

Buvard, Julia Kerninon

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 30 Janvier 2014. , dans La Brune (Le Rouergue), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Buvard, janvier 2014, 200 pages, 18,80 € . Ecrivain(s): Julia Kerninon Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

Un buvard, souvent rose ; un touché, un duveteux unique qui va avec les souvenirs – autant de traces d’encre. Quand on regarde de près, on trouve – à l’envers – les mots de la page originale, tremblés comme autant de caractères orientaux. Il s’agit d’écriture – mais, curieuse, et – avant les ordi, c’était un peu une autre main de l’écrivain…

Le Buvard de Kerninon est tout ça, moins le rose, et il râpe vraiment la peau…

Quelque part au fond d’une campagne anglaise, une écrivaine, plus que célèbre, se cache (« un trou d’herbe où elle vivait ») :

Catherine N Spacek, « sa prose splendide, sa voix de fumeuse ». Un étudiant, très fan, gagne le droit d’interroger la bête étrange, dont la curieuse beauté – solaire, ou minérale, selon l’heure – nous fait pencher parfois pour une Amélie Nothomb (« impitoyable, petit oiseau de proie portant rouge à lèvres », petit génie surdoué et prolifique, et son club d’inconditionnels). Mais on peut hésiter et préférer Garbo : « il était fait mention de lectures publiques tumultueuses, d’une réputation sulfureuse, des sommes colossales d’argent touché, du succès international, et de son silence surtout ».

Baignade surveillée, Guillaume Guéraud

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 23 Janvier 2014. , dans La Brune (Le Rouergue), Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Baignade surveillée, janvier 2014, 125 pages, 13,80 € . Ecrivain(s): Guillaume Guéraud Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

 

« La Brune du Rouergue » est – pour ainsi dire – toujours une assurance de grande qualité, dans le registre littérature française / côté vraie vie, même moche, et tous ses accessoires. Ce petit opus-là honore fièrement la collection.

Serré comme un excellent café – noir dense, pour réchauffer l’hiver. Une tranche de la vie qui ne va pas – banal, pour tant et tant. Encore faut-il savoir le décliner en pure littérature, comme ici !

Très petit livre, qu’il vous faut lire d’une traite – le réchauffé est à proscrire ; goût amer et tendre, ça et là ; parfums d’iode et de bois brûlé, saupoudré de tous les vents de l’Atlantique. Ce livre est probablement un nectar, un grand cru 2014…

Le bonheur pauvre rengaine, Sylvain Pattieu

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 22 Août 2013. , dans La Brune (Le Rouergue), Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire

Le bonheur pauvre rengaine, 21 août 2013, 290 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Sylvain Pattieu Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

Un historien c’est déjà un sacré client pour nous raconter quelque chose. Un écrivain (sachant écrire, évidemment) c’est une autre entrée dans une histoire ; alors, si l’écrivain – qui sait écrire, c’est sûr – utilise aussi sa casquette d’historien de belle valeur, ça donne ce livre-là : on s’y croirait, on s’y plaît, et – comme on dit d’un beau produit – c’est du solide, monsieur ! du vrai bois dont on sent le fil de page en page – pas de la camelote de bazar…

On plonge avec notre imaginaire mais aussi notre appétit d’une « vraie histoire » dans un Marseille plus réaliste que la meilleure collection de cartes postales anciennes, juste sépia – ce qu’il faut ; on s’embarque et cela, jusqu’à la dernière page à regret avalée…

Rien que le titre chante comme une de ces chansons réalistes de l’entre-deux guerres : une « Goualante du pauvre Jean » – ici, de toutes ces Yvonne, Yves, l’égaré de Bretagne et ce Cyprien, « nègre du Dahomey » passé souteneur de petites femmes, comme d’autres deviennent maçons… « Le bonheur, pauvre rengaine » dans une France sortie tout fraîchement de la boue des tranchées, cul par-dessus tête – on dirait de nos jours, avec une mimique de psy, « pantelante du trauma de la Grande Guerre ».

Les noces clandestines, Claire-Lise Marguier

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 26 Mars 2013. , dans La Brune (Le Rouergue), Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Les noces clandestines, mars 2013, 121 p. 13,80 € . Ecrivain(s): Claire Lise Marguier Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

C’est tout simple, l’histoire de ce livre. On dirait un bout de fait divers, au coin usé d’une feuille de chou de province. Un type en enlève un autre, et le séquestre ; un chapelet de comment… donc… s’ensuit. Le pourquoi tient sa place en fond, flouté.

Mais il s’agit d’un livre – et quel livre ! Il est question de littérature – haute et aboutie ; et d’un jeune auteur, qui signe là – à peine croyable, un premier roman.

« C’était juste avant l’automne, cette saison bancale, entre deux, dont la seule évocation nous jette dans le spleen des poètes. Bonne maman achevait sa vie à l’étage de la maison, allongée dans ses draps souillés qui empestaient l’urine et les chairs en décomposition… ».

On hésite déjà, dès l’entrée du roman, entre la confiture et l’horreur, la vie banale, et ses dessous terribles. On regarde d’emblée, de travers ce gars – prof d’histoire en collège – comme on se pencherait sur la margelle du puits, effrayé, attiré, aussi, par ce qu’il y a au fond.