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Quand la langue française s'algérianise ! par Amin Zaoui

Ecrit par Amin Zaoui , le Mardi, 12 Mai 2015. , dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques

La littérature algérienne de langue française se porte bien. Elle est en bonne santé. La preuve est là : félicitations à l’écrivain et journaliste Kamel Daoud pour le prix Goncourt du premier roman qu’il vient de décrocher cette semaine. Cette distinction est une fierté pour l’Algérie littéraire et culturelle. Même si, en Algérie, les clowns insultent les meilleurs de nos enfants, ces derniers trouveront toujours le chemin de la gloire.

Si, avec grande tristesse, nous avions perdu ces derniers mois deux grands écrivains : Assia Djebar et Malek Alloula, la scène littéraire internationale nous confirme que la relève est assurée. Et la distinction de Kamel Daoud en est la preuve. Une nouvelle génération littéraire, doucement et avec aisance, s’installe dans l’imaginaire international. Dans la lecture universelle. Dans l’attente du lectorat. Si la première génération d’écrivains algériens de langue française, celle des années 1950, a été élevée dans la souffrance coloniale, dans l’humiliation, dans la pauvreté, dans la guerre de Libération, de son côté, la nouvelle génération, celle des années 1980, est née et forgée dans l’amertume nationale. Dans la déception. Dans la guerre des frères. Dans le sang. Dans la résistance au fanatisme islamique. Cette génération, il faut le signaler, n’a fait que le chemin de l’école algérienne. Elle est la victime des retombées d’une arabisation enrhumée et islamisée. Elle a grandi, elle s’est formée sous le règne d’un régime de plomb cimenté d’une culture Jdanovienne.

Je vous construis le paradis ! par Amin Zaoui

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 15 Avril 2015. , dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques

 

Aujourd’hui, j’ai décidé de construire le paradis. Et pour construire le paradis, un vrai paradis, il faut avoir les ingrédients adéquats et nécessaires : humains, angéliques, diaboliques, matériels et textuels. Parce que je l’ai toujours imaginé en forme d’une vaste et riche bibliothèque, donc pour ériger le paradis, le vrai paradis, il me faut des livres, beaucoup de livres humains et divins. Les meilleurs livres de tous les siècles et de tous les Cieux. Des livres dans toutes les langues. Même ceux écrits dans les langues des oiseaux. Dans toutes les disciplines et dans toutes les indisciplines ! Et beaucoup de manuscrits ornés et calligraphiés par les plus grands maîtres du calame à l’image d’El Wassiti et Ibn Moqla.

La bibliothèque, même avec ses milliers de livres et manuscrits, sans la présence des poètes, elle n’est qu’espace mort. Mausolée abandonné. Donc j’ai décidé d’inviter les poètes pour occuper mon Éden. J’ai établi une liste des meilleurs faiseurs de mots ou de papillons. Je les ai classés par ordre de mérite c’est-à-dire par ordre de malédiction. La « malédiction poétique » est un critère littéraire déterminant dans mon choix. Et parce que le paradis est un espace de liberté, j’ai laissé la liste ouverte.

Tunisie des lumières : Haddad, Masika, Ben Achour, Bourguiba...

Ecrit par Amin Zaoui , le Mardi, 07 Avril 2015. , dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques, Côté actualité

Avec une superficie 14 fois plus petite que celle de l’Algérie, 10 fois plus petite que celle de la Libye et deux fois et demi moins que celle du Maroc… la Tunisie est un grand pays. Une terre faite de songes et de symboles. Un pays est grand, non pas par son immensité géographique ou par le nombre de têtes de sa population, mais par le génie de ses habitants. Par l’intelligence approuvée à travers son Histoire par ses élites politiques, culturelles et religieuses éclairées, la Tunisie fait partie de ces pays des grands. La Tunisie est le pays du « vivre ensemble ». D’hospitalité. De parfum de vie. De respect de l’autre. De différence.

En guise d’une leçon immortelle, l’histoire de la musique, du théâtre et de la résistance culturelle des années trente, a inscrit en lettres d’or le nom de Habiba Msika (1903-1930), artiste tunisienne juive. Elle était aimée jusqu’à l’adoration par tous les citoyens tunisiens, toutes religions confondues. Sa mort tragique, tuée par un amant jaloux, un juif tunisien, a mis tout le pays dans la tristesse et la peine. En signe de respect, image forte de la culture de la citoyenneté, le jour de son enterrement, les Tunisiens en foules étonnantes, ont accompagné son cercueil vers sa demeure dernière. Ont prié sur son âme. La citoyenneté avant la religiosité est le principe fondateur de la personnalité tunisienne. Précocement, l’enterrement de Msika fut un barrage contre toute culture d’exclusion, de xénophobie ou d’inquisition.

Souffles - Pourquoi les salafistes algériens ont marché sur Alger ?

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 25 Mars 2015. , dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques, Côté actualité

 

Parce que l’islam d’aujourd’hui a été vidé de toutes cultures universelles, le musulman, le bon croyant, à son tour, s’est trouvé conditionné, automate. C’est triste mais c’est la réalité amère. Pourquoi est-ce que les salafistes algériens sont-ils sortis coléreux et en force, cette semaine, dans les rues d’Alger ?

Serait-ce pour dénoncer les injustices sociales ? Non.

Pour réclamer l’augmentation des salaires ? Mais non !

Pour dire non à l’exploitation du gaz de schiste ? Pas du tout.

Pour dénoncer la mauvaise et louche distribution des logements sociaux ? Ceci n’est pas important à leurs yeux.

Pour dénoncer la corruption qui gangrène l’économie algérienne ? Ceci, à leurs yeux, relève d’el-mektoub, du Ciel.

Polar algérien vous avez dit ?

Ecrit par Amin Zaoui , le Mercredi, 11 Mars 2015. , dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques

 

Nous sommes une société où on parle beaucoup et de tout, sans tradition de l’écrit. Pas de trace. Sommes-nous encore dans les temps de l’oralité ? Nous avons toutes les sauces pour en faire le roman noir, mais nous n’avons pas d’écrivains de polar ! Nous vivons dans une société violente. Toutes les violences imaginables et inimaginables ; dans les langues, dans les gesticules, et même sur les traits des visages… font le quotidien des Algériens.

L’Algérien ne sait pas comment sourire !

Nous disposons de beaucoup de policiers, des centaines de milliers, tous genres de policiers, ceux en tenue officielle et ceux qui sont sans tenue officielle !! Tous grades. Toutes appellations possibles, et nous n’avons pas d’écrivains de polar ! Yasmina Khadra, tu me dis, une hirondelle ne fait pas le printemps. Et sa trilogie du commissaire Llob ne couvre pas tout ce paysage absurde.

Nous avons la corruption, tous genres de corruptions, économique, politique scientifique et culturelle. Nous avons des prisons remplies, surchargées. Toutes les couleurs de crimes. Du crime d’honneur jusqu’au crime de religion. Et nous n’avons pas d’écrivains de polar capables de dénicher les abeilles et les mouches, les éléphants et les singes !